Il ne se passe pas un jour sans que les medias nous parlent de “la crise migratoire” et plus récemment du démantèlement de la jungle de Calais. Petit à petit, le poison de la peur et de la haine est distillé et les consciences s’en imprègnent.
Au cours de la conférence d’Ustaritz, organisée par le collectif migrants d’Iparralde, intitulée De Calais à Vintimille construisons des ponts et non des murs, quelques faits et chiffres sont ressortis : Coût des 50 kilomètres de barbelés et des vigiles et autres forces de l’ordre : 150 millions d’euros. Efficacité du dispositif : nulle. Passage plus coûteux et plus dangereux. Beaucoup de blessures, de mains entaillées, développement du business des passeurs : de 2014 à 2016, le passage de Calais à Douvres est passé de 600 euros à 6.000 euros.
Les migrants souhaitant se rendre en Grande-Bretagne sont plus déterminés que jamais. Tôt ou tard, le temps de travailler au noir pour payer les passeurs, les migrants souhaitant traverser la Manche réussissent par d’autres villes, y compris de Belgique, ou décèdent.
Voilà la triste réalité.
Tous ces dispositifs n’ont aucun effet dissuasif sur des personnes fuyant la mort et la misère. Ce gaspillage d’argent public engraisse quelques multinationales et autres sociétés de vigiles et rassure le bon citoyen électeur. On se prête à rêver de la qualité de l’accueil qui aurait pu être réservé à ces migrants de Calais avec cette somme.
Environ 10.000 migrants, dont des femmes seules et des enfants, ont longtemps vécu sous des tentes dans un climat froid et pluvieux jusqu’en janvier 2016, date de la construction de 2.000 cabanes par des ONG. Pourtant, le camp de Calais fut un espace riche d’expériences humaines, sociales et culturelles où diverses communautés s’organisaient entre elles et mettaient en place des stratégies d’apaisement spontanées en cas de conflit.
300 à 400 bénévoles associatifs se débrouillaient pour cuisiner des repas pour 2.000 personnes et répondre aux demandes les plus urgentes.
Expérience positive
L’an dernier, le ministre de l’intérieur, Bernard Cazeneuve, a mis en place des “boîtes à dormir avec douches” destinées aux femmes et enfants, mais qui ne couvraient que 25% des besoins.
Aujourd’hui, le camp est démantelé et les personnes du camp sont envoyées dans des Centres d’accueil et d’orientation (CAO). Ceux ci sont une réponse à une petite moitié des migrants de Calais. Environ 2.000 migrants réfractaires à l’enfermement s’étaient déjà évanouis dans la nature avant d’avoir à monter dans un bus .
Alors qu’initialement un CAO était prévu au Pays Basque, seul le Béarn en a ouvert deux, pour 24 personnes à Gélos et 20 à Pau. Ce ne sont pourtant pas les logements vacants qui manquent l’hiver ici. L’expérience très positive du VVF de Baigorri, l’hiver dernier, prouve que lorsqu’une mairie s’implique dans la réussite de l’accueil, assistée de bénévoles locaux, en lien avec des associations spécialisées, l’accueil est une réussite et c’est la première étape vers l’intégration (cours de français, ballades en montagne, parties de foot…).
Les bénévoles de Baigorri continuent à entretenir des relations avec les anciens occupants du VVF, les invitent régulièrement. Cette expérience mérite d’être renouvelée et étendue à d’autres communes du pays Basque.
On observe une recrudescence des poursuites
à l’encontre des aidants de personnes sans papiers
en s’appuyant sur une législation destinée, en principe,
à lutter conte le trafic d’êtres humains.
Politique policière inhumaine
L’essentiel des réfugiés dans le monde, soit environ 21 millions restent dans les pays voisins du leur : pays africains, Liban, Turquie… Seuls les plus aisés tentent leur chance vers l’Europe. La plupart ont des qualifications et apportent leur contribution à la croissance du pays d’accueil, comme en témoignent les statistiques de la Suède ou de l’Allemagne qui les ont accueillis en nombre.
Le gouvernement français est responsable de cette politique policière inhumaine. Si la mobilisation des associations a abouti à quelques réformes dont celle du 31 décembre 2012, supprimant “le délit de solidarité” pour ceux qui assuraient aux étrangers des conditions de vie dignes et décentes, les choses empirent avec l’état d’urgence.
On observe une recrudescence des poursuites à l’encontre des aidants de personnes sans papiers en s’appuyant sur une législation destinée, en principe, à lutter conte le trafic d’êtres humains.
Le 23 novembre dernier, a été jugé un chercheur du CNRS de Nice accusé d’avoir recueilli trois jeunes Erythréennes perdues sur une route de campagne près de la frontière de Vintimille. Arrêté par la PAF avant l’arrivée à la gare, il a passé 36 heures en garde-à-vue pour “délit de solidarité”.
Nous ne pouvons pas accepter que 10.000 personnes meurent dans l’indifférence, en traversant la Méditerranée, en quête d’une vie meilleure alors que des bénévoles paient pour un geste d’humanité.
Les camps de Paris sont un espace de contrôle et d’expérimentation policière qui pourront un jour servir à d’autres luttes citoyennes.
Mobilisons-nous pour arrêter de véhiculer de fausses idées et changer de discours.