L’Edito du mensuel Enbata
Refonder l’abertzalisme en Iparralde, c’est l’objectif du processus Bagira. L’abertzalisme s’est déjà réinventé plusieurs fois. Après la disparition du régime foral, Sabino Arana proposa aux Basques un récit national, celui d’une nation moderne du XIXème siècle dotée de tous ses attributs (drapeau, hymne, etc.). Le nationalisme basque évolua durant le franquisme, en s’ouvrant aux luttes ouvrières et sociales, en adoptant une conception volontariste de la nation, et en se définissant comme un mouvement de libération nationale. Et en Iparralde, c’est la charte d’Itxassou qui définit en 1963 un cadre de référence qui donna une cohérence aux multiples combats des abertzale. Au Sud comme au Nord, l’abertzalisme doit à nouveau se réinventer. Dans un contexte où le réchauffement climatique et la chute de la biodiversité menacent l’Humanité, personne ne peut raisonnablement espérer que les abertzale rassemblent une majorité sociale au nom du respect du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes sans proposer de réponse à ces défis. Nous devons intégrer ce contexte à notre récit national.
Mais on ne se rallie pas à un récit national par injonction comme le pensait Sarkozy : « Quelle que soit la nationalité de vos parents, jeunes Français, au moment où vous devenez français, vos ancêtres, ce sont les Gaulois et c’est Vercingétorix », mais aussi Mélenchon : « À partir du moment où l’on est français, on adopte le récit national. » Est-ce parce que les manuels exhortaient : « Tu dois aimer la France, parce que la Nature l’a faite belle et parce que l’Histoire l’a faite grande » que les Basques ont abandonné leur langue natale ? Ou bien parce que l’école publique gratuite mais francophone leur offrait des perspectives d’ascension sociale inespérées ? Ou parce qu’être français permettait de bénéficier du programme social du Conseil National de la Résistance qui annonçait des « jours heureux » ?
De manière plus surprenante vu les circonstances, même le mouvement politique écologiste peine à proposer un récit fédérateur. Les mobilisations contre les grands projets inutiles sont indispensables mais ne constituent pas un projet de société. Pas plus que les démarches de sobriété extrême qui ne sont pas généralisables à l’ensemble de la population dans les délais qu’impose l’urgence climatique. Une partie du mouvement écologiste souffre de s’être construite dans une opposition un peu binaire entre sobriété et technologie qui semble la brider pour proposer un modèle de société crédible.
Le développement des énergies renouvelables (EnR) nous offre un cas pratique intéressant. La CAPB et la Région viennent d’annoncer un projet de ferme houlomotrice et la loi d’accélération des EnR de mars 2023 ouvre de nouveaux marchés aux professionnels. Certains groupes écologistes affichent une opposition catégorique à toute installation d’EnR à cause des atteintes à la biodiversité. À l’opposé, certains gros industriels lorgnent sur ces marchés sans se soucier le moins du monde des conséquences pour le territoire.
Les abertzale ont dans leur logiciel les moyens de proposer une autre vision. Iparralde doit pouvoir choisir sa propre capacité de produire son énergie sans que cela nuise aux autres populations (il faut donc assurer une juste part de l’effort de production de l’énergie que nous consommons et les nuisances éventuelles qui vont avec). Avec I-Ener et Enargia, nous avons les outils pour construire un modèle économique qui assure que les retombées financières de la transition énergétique bénéficient à la population et pas à de grands groupes motivés par leurs seuls bénéfices. Nous devons appliquer à l’énergie la même approche qu’avec l’agriculture paysanne ou l’euskara. Nous ne défendons pas l’agriculture paysanne uniquement pour la quantité de nourriture produite, mais aussi pour son rôle structurant dans la société. Il est de même de l’euskara, témoin d’une résistance à l’uniformisation, et dont la survie rassure même les non bascophones. En suivant ces deux exemples, nous devons construire un modèle énergétique qui ne se résume pas à des kWh, mais qui fasse de l’énergie un bien commun. Un modèle dans lequel la vue d’un panneau photovoltaïque ne soit pas vécue comme une nuisance, mais nous inspire la fierté d’avoir construit un modèle énergétique qui, comme le modèle coopératif de Mondragon en son temps, pourrait servir d’exemple. Nous pouvons nous aussi promettre des « jours heureux ».
c est certainement la voie à suivre, non, à créer, ce shema peut être d adhesion, pour jeunes et moins jeunes, ou âgés tout simplement.
j en suis.
et tout cela en euskara, c est si beau de tenter de parler, de comprendre, mintzatuko, ulertuko….