Après dépouillement de 100% des bulletins de vote, déposés par 71,69% des 35,7 millions d’Espagnols appelés aux ur-nes, le PP est crédité, avec 44,62% des suffrages, d’une double majorité absolue parlementaire, soit 186 des 350 députés et 136 des 208 sénateurs. Aux précédentes législatives, en mars 2008, il avait obtenu 39,94% des voix, 154 députés et 101 sénateurs.
Conduit aux élections par l’ex-ministre de l’Intérieur Alfredo Perez Rubalcaba, le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) du président du gouvernement sortant, José Luis Rodriguez Zapatero, qui ne se présentait plus, n’a séduit pour sa part que 28,73% des électeurs, contre 43,87% en 2008, obtenant 110 députés (-59) et 48 sénateurs (-40). Il s’agit du plus mauvais résultat des socialistes depuis le rétablissement de la démocratie après la disparition du dictateur Franco, mort en novembre 1975. Seule l’Union du centre démocratique (UCD) avait subi, en 1982, après avoir piloté la transition démocratique, une débâcle d’une telle ampleur.
Le triomphe du PP de Mariano Rajoy est de la même proportion que celui qu’il avait déjà remporté en mai dernier aux élections municipales et régionales. Ajoutant le contrôle du Parlement et du gouvernement à celui qu’elle exerçait déjà sur la ville de Madrid, ainsi que sur la quasi totalité des capitales provinciales et sur 11 des 17 régions dites autonomes du pays décentralisé, la droite jouit désormais du pouvoir le plus absolu jamais détenu par une seule famille politique de l’Espagne démocratique.
Que les socialistes aient perdu 4,3 millions de leurs 11,2 millions d’électeurs de 2008 et subi la déroute dans 50 des 52 provinces, ainsi que dans leurs fiefs historiques qu’étaient encore avant le scrutin la Catalogne et l’Andalousie.
Le point le plus noir est le taux de chômage de 21,52 % —45,8% parmi les jeunes de moins de 24 ans— qui portait fin septembre à 4.978.300 le nombre de chômeurs recensés par l’Institut national de la statistique. Un million et demi d’entre eux ne perçoivent plus la moindre indemnité. Le taux de croissance est en outre retombé à zéro au troisième trimestre.
L’Europe et l’Espagne
José Luis Rodriguez Zapatero est demeuré invisible au soir de la déroute de son PSOE. Mariano Rajoy, par contre, acclamé par des milliers de partisans devant le siège madrilène du Parti Populaire, s’est adressé solennellement à la “nation espagnole” dans un discours télévisé en direct par toutes les chaînes.
Affirmant n’avoir “pas d’autres ennemis que le chômage, le déficit, la dette excessive et la stagnation économique”, prétendant “rendre aux Espagnols l’orgueil d’être tels”, M. Rajoy a estimé que “notre destin se joue en Europe et avec elle”.
La débâcle socialiste a fait le bonheur aussi, outre celui du PP, de onze petits partis qui dessinent un Parlement très fragmenté. Attirant probablement une partie des “indignés” qui ne se fient ni au PP ni au PSOE, les écolos-communistes de la Gauche unie (Izquierda Unida, IU) décrochent, avec 6,92% des suffrages, 11 députés contre à peine 2 en 2008. Les centristes de Union progrès et démocratie (UPyD), crédités de 4,69% des voix, comptent désormais 5 députés contre un seul dans la législature sortante.
Les élus basques d’Amaiur
siégeront à Madrid pour
y réclamer l’autodétermination
Mais ce sont à nouveau la Catalogne et le Pays Basque qui se distinguent le plus. Vainqueurs habituels de scrutins régionaux, les nationalistes catalans modérés de Convergence et Union (CyU) remportent pour la première fois une élection nationale dans leur région, au détriment des socialistes, envoyant à Madrid 16 députés (+6) et 9 sénateurs (+5).
En Euskadi, redistribution totale des députés. Le PNV perd un siège et passe de 6 à 5, les socialistes tombent à 4 députés et 3 reviennent au PP qui reste au même score qu’en 2008. Regroupés au sein de la coalition Amaiur (nom basque de la localité navarraise de Maya, célèbre pour sa résistance au 16e siècle à la couronne de Castille) les souverainistes obtiennent 7 députés contre aucun en 2008 où Batasuna était interdit. Les citoyens basques offrent à Amaiur 3 sénateurs et ceux de Navarre réélisent la députée sortante de “Geroa bai!” (PNV + indépendants).
C’est la première fois que le PNV est surpassé par la représentation politique souverainiste, tolérée à nouveau depuis le printemps dernier avec le succès de Bildu.
Les élus d’Amaiur affirment qu’ils siégeront à Madrid pour y réclamer au nom des Basques “le droit à décider”, c’est-à-dire l’autodétermination.
Ce qu’il faut retenir
l Poussée du PP
— majorité absolue au Cortes avec 186 députés sur 350.
— gain de 50 sièges sur l’élection en 2008.
— gain de 600.000 voix.
— gain dans toutes les autonomies, sauf en Pays Basque
où il maintient ses 5 députés tout en perdant 6.197 voix.
l Débacle du PSOE
— 110 députés contre 159 en 2008.
— perte de 4,3 millions de voix.
— perte de 77.917 voix en Hegoalde.
— perte de 6 sièges sur les 10 de 2008.
l Majorité abertzale sur l’ensemble des 4 provinces d’Hegoalde
— 13 députés sur 23.
— 7 députés pour Amaiur, 5 pour le PNV + 1 en Navarre avec Geroa bai!
— constitution pour la première fois d’un groupe Amaiur
aux Cortes après 15 ans d’absence.
— 333.628 voix pour Amaiur (Bildu, mai dernier, 310.000 voix)
et 323.517 pour le PNV (sans la Navarre).