DOUX : les enseignements d’une faillite par Michel Berhocoirigoin

«DOUX», l’un des leader mondiaux à l’export
de volailles, fait tristement l’actualité: il est
en faillite! Au-delà de l’échec d’une entreprise,
c’est l’échec d’un modèle agricole…
Entreprise familiale, DOUX est le premier producteur
européen de volailles et de produits élaborés à
base de volailles, avec une production d’un million
de tonnes chaque année! Implanté au départ en
Bretagne, il avait créé son premier abattoir en 1955.
Depuis, il n’a cessé de se développer; il avait notamment
acheté en 1991 la marque «Dodu» au
groupe spécialisé dans la nutrition animale «Guyomarch
», et s’était implanté, en conquérant, au Brésil
en 1998.
La spéculation est devenue
la principale activité des gros céréaliers
Sa stratégie d’expansion était basée sur l’export
vers les régions ou la progression de la consommation
de viande devrait être la plus forte à moyen
et long terme. La volaille est aujourd’hui la deuxième
viande la plus consommée dans le monde. Avec
une progression de 5 à 6% par an, elle sera la viande
la plus consommée dans le monde dans 10
ans… DOUX se sentait sûre de sa stratégie gagnante.
Mais le monde libéral n’est pas parfait! Il peut même
être sans pitié pour ses propres promoteurs! D’une
part, la crise économique et financière qui secoue
la planète depuis principalement 2008 a des conséquences
sur les activités commerciales, mais il y a
surtout l’augmentation des prix des céréales dans
le monde entier. Ce phénomène que les éleveurs
du Pays Basque également connaissent bien à leur
niveau, est une illustration parfaite de ce que peut
produire le libéralisme en agriculture et dans l’alimentation.
Sous l’argument de la compétitivité et de
la concurrence, certaines productions stratégiques
dont les céréales sont livrées au marché libre; les
outils de gestion sont allégés au maximum. En
conséquence, la spéculation est devenue la principale
activité des gros céréaliers! Si on ajoute à
cela le développement des agrocarburants, toutes
les conditions sont réunies pour créer de la tension
sur les marchés, avec toutes les conséquences qui
en découlent…
DOUX n’y échappe pas! Les céréales qui représentent
l’aliment de base de la volaille, contribuent
à hauteur de 50% du prix de revient de celle-ci…
L’augmentation des prix des céréales de ces dernières
années a entraîné une augmentation du coût
du poulet sortie usine de 20%. Quand on est sur des
marchés de consommation de masse à bas prix
(grande distribution, restauration collective, agroalimentaire…),
la répercussion est difficile.
La faillite de DOUX est la faillite d’un système qui
recherche la compétitivité à tout prix, en délocalisant
dans les bassins de production aux coûts les
plus bas, pour traiter les produits alimentaires comme
un minerai exploité industriellement en intégrant
les éleveurs devenus, dans les faits, ouvriers spécialisés
tout en supportant l’endettement: ils cumulent
ainsi les inconvénients des deux bouts de la
chaîne.
Chaque année 63 millions d’aide PAC!
Cette faillite met aussi en évidence cette stratégie
scandaleuse qui consiste à privatiser les bénéfices
(la famille Doux est la 146ème fortune de France, avec
plus de 300 millions d’euros!), et mutualiser les
risques: quel sera le sort réservé aux salariés et aux
éleveurs en détresse? Quels comptes rendra-t-il par
rapport aux colossales aides publiques perçues tout
au long des années pour ses investissements et son
développement? Que penser du fait que cette entreprise
est le premier bénéficiaire des aides PAC en
France: avec 200 à 300 euros d’aide par tonne de
volaille exportée, elle perçoit chaque année 63 millions
d’aide PAC! Pour ainsi dire, elle se paye les
salaires des 3.800 personnes employées en Europe
avec les aides PAC… Et que dire des dégâts
causés par ces politiques d’exportation à bas prix
qui cassent les marchés du Sud, découragent les
paysans locaux et finalement augmentent la famine
dans le monde?
Mais, la machine infernale continue sur sa trajectoire
de Titanic: les activité de DOUX au Brésil sont
confiées à un énorme groupe brésilien, numéro un
mondial de la viande bovine, et qui, avec cette
acquisition, devient le numéro trois mondial de la
volaille. Mais, «le sauveur» n’a pas pitié: il affirme
clairement qu’il n’assumera pas le passif de DOUX
dont les dettes sont estimées entre 300 et 400 millions
d’euros…
En conclusion, espérons qu’il n’y ait pas de suppression
d’emploi ni de disparition de fermes. Et surtout
que ça serve de leçon pour aller vers une
agriculture relocalisée sur les besoins des populations
locales, créatrice d’emplois, fondée sur la qualité
et le respect du paysan, des consommateurs,
de la terre

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