La gauche abertzale préfère négocier au cas par cas, loi par loi, plutôt que de signer un contrat de législature. Cette « patience stratégique » entend conforter la normalisation politique et la fiabilité d’une gauche abertzale, d’abord opposée à un retour au pouvoir de l’extrême droite alliée au PP.
Seulement une photo. La porte-parole d’EH Bildu au parlement Mertxe Aizpurua serre la main de Pedro Sanchez. Les six députés de la gauche abertzale votent le 16 novembre pour l’investiture du premier ministre socialiste, sans demander au préalable que le PSOE s’engage à concéder ce qui s’apparente pour les autres alliés à un tableau de chasse qu’ils montent en épingle auprès de leurs électeurs.
En somme, la gauche abertzale tient compte du fameux adage « les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent ». Mais EH Bildu entend demain négocier loi par loi, tant sur les questions territoriales et d’identité nationale que dans le domaine social, les retraites ou la modification de la « loi bâillon » sur les libertés publiques. Gageons que se poursuivront les négociations discrètes auprès du ministère de l’Intérieur pour obtenir l’élargissement des preso après leur rapprochement.
Dans un contexte difficile, tant le corps des magistrats et celui des institutions policières entravent ce processus. Il s’agit aussi pour la gauche abertzale de montrer sa détermination absolue à faire barrage à l’arrivée au pouvoir de l’extrême- droite alliée au PP. Elle ne tombera pas dans les erreurs fatales du Parti communiste allemand des années 30…
Ce choix lui a permis de nettement progresser lors des dernières élections régionales, même si le PSOE n’a pas eu l’élégance de lui renvoyer l’ascenseur en Navarre et en Gipuzkoa. EH Bildu veut par cette attitude de « patience stratégique » se refaire une virginité, surmonter son image de parti infréquentable lié à son passé et briser le plafond de verre qui l’empêche d’accéder au pouvoir dans les institutions d’Hegoalde.
L’intransigeance est l’arme des faibles. La gauche abertzale est-elle devenue assez forte pour faire des concessions sans perdre son âme ? L’avenir le dira.
Pour l’instant, la droite espagnole crie toujours au loup et parle d’accords secrets entre Arnaldo Otegi et Pedro Sanchez.