Le dimanche 25 septembre, Bizi organise une vélorution festive et revendicative à Saint-Jean-de-Luz, ville du triomphe effrayant de l’automobile et dont le maire est aussi le président du Syndicat des Mobilités de la Communauté Pays Basque.
Début août, je suis parti en vacances, à vélo, en Hegoalde. Longeant la côte basque, nous sommes arrivés à Ondarroa où nous avons passé quelques superbes journées, faites de farniente, lectures, balades à pied ou à vélo entre Gipuzkoa et Bizkaia. Une fois encore, nous avons pu apprécier la différence entre Hegoalde et Iparralde au niveau de la mobilité : les automobilistes respectent une distance latérale permettant de rouler assez tranquillement même en l’absence de pistes cyclables. Les transports collectifs sont bien plus développés et adaptés aux besoins de mobilité. Et nous pouvions rentrer à tout moment dans les trains ou le Topo avec nos vélos, sans payer de supplément, et avec des billets au minimum moitié moins chers que de l’autre côté de la frontière.
Climat d’urgence
Le jour de notre retour, la Gironde était en feu. Les télés, allumées en permanence dans beaucoup de bars et restaurants d’Hegoalde, montraient les images des poids lourds refoulés à Biriatou suite à la fermeture partielle de l’autoroute Bordeaux-Bayonne causée par ces incendies. Une amie nous appelant d’Iparralde nous racontait avec émotion qu’on pouvait sentir la fumée et le brûlé jusqu’à Bayonne ! La presse parlait de dizaines de baigneurs victimes de morsures sur la grande plage d’Hendaye. Ce serait l’oeuvre de poissons plutôt habitués des eaux chaudes mais que le réchauffement climatique pousserait à se rapprocher des plages méditerranéennes d’abord, et désormais basques apparemment. Nous discutions de tout ça, avec le sentiment d’entrer dans un nouveau monde, livré au changement climatique, un monde de plus en plus imprévisible et perturbé. Nous avions en mémoire les premières réactions que nous rencontrions dans notre militantisme, faites d’indifférence et d’incrédulité dans le meilleur des cas, et de railleries méprisantes bien souvent, quand Bizi était né en 2009. Nous plaidions à l’époque déjà l’urgence à baisser radicalement nos émissions de gaz à effet de serre si nous ne voulions pas subir de plein fouet les effets désastreux du réchauffement de la planète qu’elles provoquaient. Nous disions que ces effets ne se ressentiraient pas vers 2100 mais dans les décennies à venir. On y est… Déjà…
Dure réalité
Il y a eu depuis 2009 une vraie prise de conscience au sein de la population, et de certains élus et responsables divers. Mais trop souvent, elle ne s’accompagne pas des changements de politiques et de comportements qu’elle devrait susciter, ou alors à la marge seulement. Comme le dit la climatologue Valérie Masson- Delmotte, coprésidente du groupe n°1 du GIEC “on trottine lentement derrière un climat qui change vite”. La réponse politique reste loin du changement d’échelle nécessaire et reste en décalage par rapport à l’urgence. C’est la dure réalité que nous nous sommes pris en pleine face en rentrant en Iparralde de notre périple à vélo. Après avoir suivi sans problème particulier la montée d’Hendaye à Urrugne, traversé tranquillement cette commune et emprunté la piste cyclable qui mène vers Saint-Jean-de-Luz, nous avons passé un sale moment en circulant dans les rues de cette dernière. Déjà, l’interdiction de rouler à vélo sur le pont, particulièrement large, unissant Ciboure à Saint-Jean-de Luz est particulièrement choquante. Mais la traversée de la cité luzienne, dépourvue de pistes cyclables sécurisées, fut un bon exemple du décalage suicidaire caractérisant notre époque.
Le monde à l’envers
Non seulement la route était saturée d’automobiles, mais plusieurs conducteurs avaient des réactions scandaleuses et dangereuses par rapport aux deux cyclistes que nous étions. Certains nous indiquaient rageusement le trottoir pour nous signifier que nous n’avions rien à faire sur la route normale, deux au moins nous ont volontairement frôlés de près, et nous avons eu un accrochage avec un troisième qui faisait mine d’avancer sur nous à un croisement. Les pouvoirs publics ne mènent aucune campagne volontariste et massive de pédagogie et d’explication sur les changements de comportements et de politiques rendus indispensables par le défi climatique. Résultat : certaines personnes, qui pour se déplacer seules sur deux ou trois kilomètres jugent bon de le faire dans un véhicule d’1,2 tonnes(1) émettant des gaz déréglant le climat, croient que la voirie payée et entretenue grâce aux impôts de tout le monde leur appartient à elles et à elles seules. Bref, il nous fallait défendre notre droit à circuler sans polluer ! Le monde à l’envers ! Et tout cela se passait le jour même où des incendies géants, conséquence du réchauffement climatique en cours, ravageaient les forêts girondines et landaises…
Il nous fallait défendre notre droit à circuler sans polluer !
Le monde à l’envers !
Et tout cela se passait le jour même où des incendies géants,
conséquence du réchauffement climatique en cours,
ravageaient les forêts girondines et landaises…
Mettre la pression
Le dimanche 25 septembre à 15 heures, Bizi organise justement une vélorution festive et revendicative à Saint-Jean-de-Luz, dont le maire Jean-François Irigoyen n’est autre que le président du Syndicat des Mobilités de la Communauté Pays Basque. Cette manifestation à vélo revendiquera des alternatives au tout voiture, transports collectifs adaptés et accessibles et des mobilités douces dans cette commune et sur tout Iparralde. Mais après l’été que l’on vient de connaître, ce rendez-vous doit permettre également à toutes les personnes refusant de se résigner au pire, d’exiger haut et fort des politiques à la hauteur de la situation. Comment comprendre que les moyens et le volontarisme mis en oeuvre contre le Covid ne soient pas déployés contre un péril cent fois plus grave et destructeur ? Si nous voulons éviter aux enfants vivant aujourd’hui avec nous de connaître un véritable enfer sur terre, nous devons mettre la pression, ici et maintenant, pour que se mette en place un “quoi qu’il en coûte climatique” !
(1) Masse moyenne des véhicules particuliers neufs vendus en France en 2019.
JE SUIS TOTALEMENT D’accord avec votre article sur le vélo à s aint jean de luz je pense que nos têtes pensantes ferraient bien de prendre exemple sur les landes. MAIS IL ESTVRAI QUE LE Mètre carré n’a pas le même prix que dans les landes…
Merci pour votre clairvoyance , votre courage générateur d’espoir .J’ai 80ans et je vous suis reconnaissante de vouloir avancer vers des solutions pour les générations futures ..