L’association Elekatu Elikatu organise une table ronde sur le thème du “Droit de décider” ce jeudi 5 juin à 19h30 au local d’Eusko Ikaskuntza à Bayonne en vue de la Chaîne Humaine organisée par Gure Esku Dago. Enbata.info a posé 3 questions à François Maitia, Vice-Président du Conseil Régional et Conseiller Général socialiste qui présente ici ses réponses en guise d’introduction au débat qui sera modéré par Eneko Bidegain et où seront aussi présents Michel Berhocoirigoin (président d’EHLG et membre de Batera) et Angel Oiarbide (un des animateurs de Gure Esku Dago). La lecture des réponses de François Maitia pourra être complétée par l’interview d’Angel Oiarbide (www.enbata.info/articles/ekainak-8-inflexio-puntu-bat-izango-da-euskal-herrian) qui montre que “la vraie démocratie est celle où chacun participe dans la société dans laquelle on vit en prenant les responsabilités nécessaires en faveur d’une vie meilleure” et “que le moteur des processus de changement en cours en Ecosse et en Catalogne a été l’attitude active et positive des citoyen-ne-s qui montrent aux Etats respectifs qu’ils ne peuvent imposer comme ça leurs décisions sur la volonté démocratique“.
Qu’est que le droit de décider ?
François Maitia : Le droit de décider appartient à celui qui a été reconnu comme étant détenteur de ce droit par les conventions internationales, les lois et règlements nationaux. Le droit international est basé sur le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Ils peuvent en conséquence constituer un Etat national souverain qui organise ses institutions nationales, régionales et locales. Le territoire sur lequel s’exerce l’autorité de l’Etat fait l’objet d’une reconnaissance internationale de l’inviolabilité de ses frontières.
“On vit ensemble, on a le droit de décider ensemble sur l’avenir du pays” mentionnent les promoteurs de Gure Esku Dago… mais est-ce que ce n’est pas ce que font tous les citoyen-ne-s d’Europe (et donc du Nord et du Sud du Pays Basque) en votant aux différentes élections des municipales aux européennes en passant par les différents paliers ?
François Maitia : La loi majeure d’un Etat est sa Constitution. Celle-ci détermine ses éléments constituants et peut renvoyer leur modification à une modification de la Constitution elle-même ou à des lois ordinaires qui organisent les différents organes institutionnels, leurs compétences et le cadre de leur exercice. Ainsi, l’échelon communal a un certain nombre de prérogatives mais ne peut décider de tout. De même pour le Conseil Général ou le Conseil Régional. La loi organise aussi la délégation de compétences d’un organe à un autre. Ainsi pour les intercommunalités. Les citoyens, par leur vote, donnent pouvoir à leurs représentants élus, d’exercer en leur nom, la mise en œuvre des compétences pour lesquelles l’institution est concernée. Les débats politiques reviennent donc d’abord à définir les différentes compétences à exercer par telle ou telle institution puis sur les différents éléments de l’exercice de ces compétences.
Ces derniers temps cette revendication concernant le “droit de décider” est forte en Catalogne et en Ecosse et depuis un an au Pays Basque, grâce à Gure Esku Dago (déjà plus de 60 000 personnes inscrites à la chaîne humain Iruña-Durango). En quoi cela peut changer la réponse des Etats à l’égard de ces revendications citoyennes ?
François Maitia : L’élément central, déterminant, est le citoyen. C’est lui qui choisit ses représentants. C’est lui qui s’associe à d’autres, dans le cadre par exemple de partis politiques, pour formuler une offre politique qui sera débattue (et sanctionnée) lors des élections à tous niveaux. C’est lui qui exerce son pouvoir de conviction, de manifestation, de pétition… La revendication apparue en Catalogne de la constitution d’un Etat indépendant, pour être mesurée officiellement, doit faire l’objet d’une autorisation d’un référendum légal accordée par l’Union européenne dont le traité fondateur reconnaît les frontières inviolables de l’Etat espagnol et par les autorités souveraines d’Espagne dont la Constitution espagnole ne leur accorde semble-t-il pas ce droit. Le recueil d’un million de pétitionnaires peut conduire les autorités européennes à inscrire cette question dans le débat européen. Sur le cas de l’Ecosse, l’accord de l’Angleterre permet l’organisation d’un référendum légal et l’ouverture d’un processus. S’agissant d’Euskadi, le rejet de la demande portée par le lehendakari Ibarretxe devant les Cortes n’a pas permis l’organisation légale du référendum projeté.