La Guardia Civil défile

Gardes civils sur la Plaza Nueva de Gasteiz, devant les autorités civiles et militaires, le 12 octobre 2024

Une cérémonie militaire en grandes pompes a eu lieu à Gasteiz le 12 octobre, Jour de l’hispanité (la fête nationale espagnole).

C’ est une grande première. Pour la première fois depuis la mort de Franco, la Guardia Civil a défilé dans les rues d’une ville de la Communauté autonome basque. Plus précisément au centre de Gasteiz, capitale de la province d’Araba, le 12 octobre, fête de la Virgen del Pilar, patronne de la Guardia Civil, et Jour de l’hispanité. Auparavant, les gardes civils en poste en Pays Basque défilaient chaque année ce jour-là, à l’intérieur de leurs casernes.

La cérémonie a eu lieu en présence de l’évêque et de deux personnalités socialistes, la maire de Gasteiz et la déléguée du gouvernement espagnol en Pays Basque. Cette dernière a prononcé une allocution pour souligner “qu’ici personne n’est de trop, si ce n’est ceux qui persistent dans la haine, l’intolérance et le fanatisme excluant, ceux qui rejettent l’Euskadi réel et quotidien que nous construisons entre toutes et tous”. Elle a salué la mémoire des 161 gardes civils tués par ETA. Tous se sont félicités de l’efficacité actuelle de ce corps de police et de sa constante féminisation. Ainsi que de “la détermination sans faille des héros qui ont versé leur sang pour défendre la patrie”. Pendant ce temps, à l’appel du collectif Memoria osoa, une contre-manifestation se déroulait plus discrètement dans un endroit clos, à l’intérieur du musée Artium de Gasteiz. Elle était organisée à l’appel de la gauche abertzale, du collectif pro preso Sare et d’associations de victimes, en particulier celles du 3 mars 1976. Ce jour-là, lors d’une grève générale à Gasteiz, cinq ouvriers furent tués par la police, alors qu’ils sortaient d’une église où venait d’avoir lieu une assemblée générale. Un communiqué a été lu par la soeur de Joxean Lasa, un jeune réfugié politique basque, enlevé par la garde civile en 1983 à Bayonne puis séquestré, torturé, tué, et brûlé dans la chaux vive. Axun Lasa a fustigé “la glorification des tortionnaires” et “la discrimination dont les victimes font l’objet”.

En 2014, les quatre provinces La Guardia Civil défile Une cérémonie militaire en grandes pompes a eu lieu à Gasteiz le 12 octobre, Jour de l’hispanité (la fête nationale espagnole). d’Hegoalde comptaient 17 563 policiers (garde civile et police nationale), soit un taux de 0,63 % de sa population, c’est-à-dire 630 policiers pour 100 000 habitants. Alors qu’en Europe, la moyenne est de 388 policiers pour 100 000 habitants.

Parade du tortionnaire

La garde civile est un corps de police très impliqué dans la répression en Pays Basque et sa pratique de la torture fut généralisée, aboutissant parfois au décès du prisonnier. Une pratique intégrée dans le fonctionnement “normal” de l’appareil d’État en Pays Basque, pendant et après le franquisme, comme en France, pendant les “évènements” d’Algérie. Rappelons que selon l’enquête de l’Université du Pays Basque, 5 667 personnes ont été victimes de tortures et sévices en Hegoalde de 1960 à 2014. Un nombre infime de gardes civils a été condamné pour ces faits, la plupart des dossiers étant classés dans suite. Lorsqu’ils ont abouti, les peines furent symboliques et assorties peu après de promotions. Les cinq généraux qui composent en 2024 la direction madrilène de la garde civile ont occupé des postes importants en Pays Basque, certains ont été impliqués dans des affaires ayant abouti à la mort du détenu.

“Il est systématiquement exigé des militants d’ETA de demander pardon et de rencontrer des victimes pour obtenir leur libération. En revanche, rien de tel pour les gardes civils ayant commis des crimes gravissimes, ni à titre individuel, ni sur le plan institutionnel.”

Il est systématiquement exigé des militants d’ETA de demander pardon et de rencontrer des victimes pour obtenir leur libération. En revanche, rien de tel pour les gardes civils ayant commis des crimes gravissimes, ni à titre individuel, ni sur le plan institutionnel. Aujourd’hui, l’autoproclamé “vainqueur” espagnol parade dans l’espace public basque, y compris en Iparralde, aux côtés de la gendarmerie. C’est extrêmement choquant.

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