Englués !

oiseau-englue-petrole-deverse-largeNous vivons au sens premier du terme, la plus extraordinaire campagne pour l’élection présidentielle que la Ve république ait connue. Les images qu’elle suscite s’apparentent à ces oiseaux réchappés de la marée noire, englués dans un liquide visqueux et nauséabond et qui tels l’albatros sont “exilés sur le sol au milieu des huées” !

A la fin de l’année 2016, l’élection inattendue aux Etats-Unis d’une sorte de bateleur d’estrades, a provoqué en France beaucoup d’ironie et même une certaine arrogance. Nombre de commentateurs avisés ont fait part de leur étonnement, et ont théorisé un délitement inquiétant de la démocratie dans le premier pays du monde.

Que n’a-t-on entendu, parfois de façon justifiée, sur l’évolution effrayante de ces populismes qui peu à peu envahissent le champ politique dans de nombreux pays? Dans un monde de plus en plus incompréhensible, la simplification de la pensée et la recherche des boucs émissaires devient une solution aux yeux du plus grand nombre. On a beaucoup moqué sans trop s’interroger toutefois sur la confiscation des pouvoirs qui induisent de facto des réactions problématiques !

Nous avancions rassurés, il n’est pas question de cela chez nous, et nous imaginions une séquence électorale, certes sur fond de couleur marine, mais persuadés qu’une fois encore nous saurions juguler le danger. Mais de cela, il ne fut rien ! Après le feu d’artifice d’une primaire que tous s’accordaient à trouver des plus réussies, nous devions connaître le retrait de la course du président sortant, empêtré qu’il était dans des confidences malvenues. Ce fut le premier coup de tonnerre de cette campagne trop particulière. Mine de rien cela confrontait la gauche à une situation inédite celle de se chercher un champion présentable et crédible dans un temps record. Le premier des ministres se voyait déjà en haut de l’affiche, oubliant qu’il avait joué un rôle majeur dans l’impopularité du locataire de l’Elysée.

De l’autre côté de l’échiquier politique, on bichait, cette élection se transformait en simple formalité tant leur candidat était légitime et compatible avec la fonction. Certes il avait un peu disparu des écrans radars après l’épisode de la privatisation partielle de l’assurance maladie et l’annonce faite aux fonctionnaires de la disparition programmée de 500.000 d’entre eux … Broutilles !

Le chrétien se repointait aux premiers jours de l’année, nous priant (c’est le mot) de bien vouloir acter que son éthique personnelle liée à ses convictions religieuses ne pouvait en aucun cas laisser le moindre doute sur son humanité, son intégrité, sa sincérité… dans un couplet genre “en vérité je vous le dis”. Ce soir-là, j’étais hallucinée qu’un candidat puisse mettre en avant ses choix spirituels pour gagner la première place de la république la plus laïque de la planète. “In God We Trust”(*) me semblait assez exotique dans un pays qui raffole des symboles entre Bastille et Nation ! Fallait-il en sourire ou déjà discerner dans cet acte de foi, un affolement des repères d’un homme qui manifestement avait perdu le sens commun ou plutôt tentait d’en flatter un, beaucoup plus dangereux celui-là. Dans un deuxième tour, face à un douloureux choix, mon bulletin blanchissait sérieusement.

Dans un monde
de plus en plus incompréhensible,
la simplification de la pensée
et la recherche des boucs émissaires
devient une solution
aux yeux du plus grand nombre.

Le pire ne se fit pas attendre, et s’il n’est pas question ici de reproduire toute la saga, elle fut d’une rare cruauté accréditant l’image de cette marée noire et insidieuse qui peu à peu bloque tous les ressorts de la démocratie. Peu importe de savoir quelle sera la vérité judiciaire, il est patent que le candidat “du sang et des larmes” pour les autres, a volontairement utilisé le système à des fins d’enrichissement personnel, et que son maintien parce qu’il n’y a rien de mieux en magasin, est une insulte qui nous est faite.

On a focalisé sur les emplois fictifs dans cette affaire, moins sur le consultant payé grassement par AXA numéro un en matière de santé et de prévoyance, qui avait beaucoup à espérer d’un plus grand espace pour le secteur privé. Et pourtant, là est le plus grave. Pour l’un des avantages, pour l’autre une rétribution pour sa complaisance, c’est la définition même de la corruption. Ne plus rigoler des Etats-Unis devient urgent.
Se taire c’est se faire complice de cette mascarade. Et ce n’est pas, comme on tente de le faire croire, l’accablement d’un candidat parce qu’il serait de droite, mais bien la désillusion et la colère devant une persistance aussi indigne. Le “pénélopegate” n’arrange personne, il aurait été primordial que le débat ait véritablement lieu, qu’il offre des choix entre des visions différentes voire opposées de la société.
Au lieu de cela, les errements d’un homme conduisent à s’en remettre au gouvernement des juges, ils nous contraignent à attendre pour savoir, si un des plus possibles présidents de la République est passible ou non de la correctionnelle. Inexorablement la marée noire vient nous engluer.

(•)  Nous croyons en dieu – devise des USA –

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