Black and basque, comme à la maison

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Jules-Edouard Moustic en DJ sur la scène de Black and Basque. Photo Fred Bonello

Jules-Edouard Moustic nous a déjà fait le coup du saumon, celui qui revient frayer à ses origines basques. Celui de la blague des Black Panthers qui arboraient nos bons bérets. Celui du rêve fébrile, tendance « I have a dream », le mix improbable de voix puissantes du gospel et du Pays Basque. Et finalement celui de la carpe et du lapin qui bondissent entre chaque question pour échapper à l’étiquetage Black and basque. Résultat : un festival à son image, foutraque comme ses conférences de presse, rigolard en surface, mais au fond intuitif, sensible et cohérent.

Un festival structurellement made in basque, Etxean bezala, conçu comme une maison à l’heure de l’apéro, avec tout le confort de discussions, de rencontres, d’échanges et de confrontations, ces conditions idéales qui font parfois jaillir le feu sacré des esprits et des barbecues.

Un festival à prendre au sérieux même si son auteur ne peut prononcer ce mot sans déclencher l’hilarité. La rançon d’une gloire construite dans un argile bête et méchant dont l’humour, noir-anar, tâche finalement comme le gros rouge. Les gens d’ici ne s’y sont pourtant pas trompés, qui avaient compris que le loustic préférait soutenir une Chambre d’agriculture du Pays Basque que cautionner les tapages de ses collègues du show biz, campés sur leurs promontoires dorés, les yeux vers l’horizon marin et le dos tourné au pays. Loin des préoccupations de l’intéressé qui a déduit, en un clin d’oeil facétieux, le caractère de « gens qui ne lâchent rien », touchant du doigt, au-delà, l’enjeu majeur du combat des minorités.

Dans ce registre, il en va de la politique comme de la musique et ce n’est pas un hasard si Christian Borde de son état civil, balance une programmation musicale sur le fil quand il prend les manettes du Mouv’ ou qu’il mouline en continue les plus rares galettes sur la web radio qu’il a justement baptisé « I have a dream ». Un art délicat et téméraire, qui prend le parti objectif de proclamer que la bonne musique existe, avant de plonger dans la mêlée radiophonique et sa bouillie commerciale.

 

Photos Fred Bonello
Photos Fred Bonello

Un combat de minorités que 250 bénévoles rejoignent ces 6, 7 et 8 septembre à Bayonne, au moment opportun du reflux estival, dans les règles d’un festival basque où la culture afro-américaine trouve sens. Derrière la farce des black panthers en bérets basques se joue la résistance des cultures, d’un festival sorti de terre et pas tombé du ciel, où l’on entend mieux le message du groupe Kassav qui derrière un zouk puissant, défend une langue, une identité une culture. Où les photographes d’ici et d’ailleurs interrogent les constructions identitaires. Où arts primitifs et contemporains se mêlent en une troublante symbiose. Où Angela Davis a quelque chose à dire sur les prisonniers. Où les Kalakan cadencent les pas de danseurs du Bronx et de Brooklyn sur des tempos séculaires. Où l’africaine Angélique Kidjo reprend en choeur basque le battement sourd des identités sans bannières. Et où les arts finalement, se mêlent comme les discussions au rythme d’une musique exutoire, celle que les blacks discriminés ont inventée comme une revanche joyeuse au mortel ennui d’une Amérique monocolore.

On n’est pas loin d’une photo kitsch d’Igotz Ziarreta, les pieds droits dans les abarkas et la tête au présent d’un monde changeant. « La fête oui, la lutte aussi » scandaient les jeunes abertzale des années 80. Pour Moustic, qui pète en rigolant mais jamais gratuitement, le festival Black & basque pourrait se résumer à cette vigilance festive, comme l’envie simple de créer des connexions nouvelles et durables. Ce n’est pas la moindre des ambitions.

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A Bayonne, jusqu’au 18 septembre, exposition Primitif & Contemporain au Carré, dans le cadre du festival Black & Basque. Photo Rémi Rivière

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