Bizi a annoncé son retrait du Comité Partenarial (Copar) du Plan Climat-Air-Energie Territorial (PCAET) Pays Basque, lors de la dernière réunion de celui-ci, qui s’est tenue le jeudi 20 mai 2021 à Bayonne. L’association, travaillant sur les questions climatiques depuis 2009, a expliqué cette décision difficile par l’arbitrage pris par l’exécutif de la Communauté d’Agglomération Pays Basque (CAPB) renonçant à l’objectif de neutralité carbone pour son Plan climat.
Bizi suivait l’élaboration du PCAET Pays Basque depuis les tout débuts de l’année 2018 et la confection du cahier des charges destiné au bureau d’études travaillant pour la CAPB. Bizi, fidèle à sa culture pragmatique, participait activement au Copar du PCAET même si le Plan climat en préparation était loin de s’inscrire, dès ses débuts, dans une trajectoire compatible avec l’objectif de rester sous les 1,5°C, supposant des programmes d’actions autrement ambitieux, qui sont ceux revendiqués par l’association. Elle a donc participé aux différentes réunions et alimenté les réflexions par divers apports et contributions écrites, pour doter d’un maximum d’ambition ce PCAET.
Bizi a exprimé début 2020 sa satisfaction de l’écoute des élus et techniciens, ainsi que de la prise en compte de ses remarques et propositions. L’association estimait alors que la stratégie énergétique proposée était satisfaisante, avec l’objectif de devenir un territoire à énergie positive (TEPOS) à horizon 2050 (1). Elle saluait la baisse des émissions de gaz à effet de serre des secteurs résidentiel et transport, dans des proportions très ambitieuses. Il sera difficile d’améliorer ces taux si ce n’est en réduisant le nombre ahurissant de résidences secondaires prévues dans le PLH.
L’objectif stratégique de la neutralité carbone (2)
Mais dans le même temps, le mouvement climat du Pays Basque avait clairement indiqué sa ligne rouge : «Il apparaît donc difficile pour un mouvement tel que Bizi de s’associer au plan d’action d’un PCAET qui n’affiche pas l’ambition politique de la neutralité carbone et donc la participation pleine et active du Pays Basque à la lutte contre le changement climatique» écrivait Bizi à Martine Bisauta, vice-présidente de la CAPB en charge du PCAET dès janvier 2020. Cela paraît d’autant moins acceptable que les capacités actuelles de captation de carbone sont élevées par rapport à la moyenne hexagonale, avec un potentiel d’augmentation de stockage carbone grâce à l’amélioration des pratiques agricoles et sylvicoles. Cela revient à laisser reposer des efforts supplémentaires sur les autres territoires, dont ceux avec un bien moindre potentiel de séquestration.
L’association demandait de proposer un plan d’action qui permette de dessiner une trajectoire vers la neutralité carbone en 2050, comme cela a été réussi pour la stratégie énergétique et son objectif TEPOS. Rappelons que la neutralité carbone est un objectif inscrit dans la loi énergie-climat promulguée en novembre 2019. Pour l’atteindre, il faudrait notamment augmenter la capacité du territoire à séquestrer le carbone. D’autres territoires, comme Lille Métropole ou Grenoble Alpes Métropole visent la neutralité carbone et prévoient en plus des actions pour réduire les émissions associées aux importations. Alors que ces dernières ne cessent d’augmenter, elles ne sont presque pas prises en compte par l’actuel Plan Climat. Le plan d’action du PCAET ne laisse pas non plus entrevoir de suivi annuel prévu de l’évolution de la captation du carbone, ni de celle de l’artificialisation qui peut fortement menacer les puits de carbone du territoire.
Pour Bizi, miser sur une stabilité de la séquestration du carbone reviendrait à donner un signal politique négatif, notamment en démontrant l’inefficacité des futures actions du territoire en faveur d’une politique agricole territoriale, visant la souveraineté alimentaire et favorisant l’agroécologie. Le défi de l’agriculture, dans sa participation à la lutte contre le changement climatique, est de stabiliser ou même augmenter sa capacité à stocker le carbone et baisser les émissions non-énergétiques. La profession agricole et la collectivité affichent aujourd’hui leur détermination à faire évoluer le modèle, et cela doit se voir dans les objectifs stratégiques du PCAET.
Le mouvement climat y voyait plus globalement un signal défaitiste. Sans un tel objectif particulièrement volontariste, comment, dans une zone de tension foncière comme la nôtre, parviendra-t-on à maintenir l’actuel potentiel de séquestration carbone ? Comment ré-ouvrir des débats, comme celui de l’éolien ou de l’attractivité du territoire par exemple, si ces choix ne permettent pas in fine au Pays Basque de participer pleinement à la lutte contre le changement climatique ?
Bizi n’a donc pas été entendu sur ce point décisif, défini comme ligne rouge par l’association. Elle en a tiré les conclusions en se retirant du Copar du PCAET Pays Basque. Bizi reste prête à revenir au COPAR et à s’associer pleinement au plan d’actions du PCAET, si les hypothèses et objectifs en matière de séquestration carbone sont revus à la hausse et permettent de viser l’objectif de neutralité carbone à l’horizon 2050.
(1) : Un territoire à énergie positive vise l’objectif de réduire ses besoins d’énergie au maximum, par la sobriété et l’efficacité énergétiques, et de les couvrir par les énergies renouvelables locales.
(2) : La neutralité carbone se définit par le fait de séquestrer autant de carbone que l’on émet, de manière à stabiliser son niveau de concentration dans l’atmosphère et ainsi limiter l’augmentation de la température globale de la planète. Cela suppose d’une part, de réduire drastiquement les émissions, qu’elles soient d’origine fossile ou issues de matière vivante, et d’autre part, d’augmenter les puits (les forêts et les sols) permettant la séquestration du carbone.