LGV : la fracture environnementale

Action anti-LGV à Bayonne en 2012

Bonne nouvelle que les désaveux cuisants de l’Autorité environnementale et du Conseil national de protection de la nature sur le premier volet du projet de LGV GPSO qui concerne les aménagements ferroviaires au nord de Toulouse ! Pour autant, ces avis vont-ils influer sur les décideurs politiques, figés sur des schémas d’aménagement d’un autre temps ?

Deux avis négatifs de poids

Sur le volet environnemental, les conclusions de deux instances nationales concernant le projet de LGV GPSO sont arrivées coup sur coup. Elles sont toutes les deux cinglantes. Elles concernent la première étape du projet : les aménagements ferroviaires au nord de Toulouse (dits AFNT) dont la composante principale est la mise à quatre voies du tronçon existant entre la gare Toulouse-Matabiau et le raccordement avec les lignes à grande vitesse, sur un linéaire de 19 kilomètres.

Le premier rapport est celui de l’Autorité environnementale (AE). Elle s’étonne d’abord que contrairement aux engagements pris, le public n’a plus été associé au projet depuis 2016. Surtout, elle constate tout simplement qu’il lui est impossible… de donner son avis, le dossier étant incomplet sur de nombreuses questions. La semaine suivante, le Conseil national de protection de la nature (CNPN) a rendu à son tour son rapport : il émet un avis défavorable aux dérogations demandées pour la destruction d’espèces protégées. Là encore, ce qui est reproché, c’est l’insuffisance des études.

Et maintenant ?

L’Autorité environnementale conclut ainsi : « L’AE ne pourra instruire ce dossier que s’il lui est de nouveau présenté avec une étude d’impact actualisée ». Or, l’instruction du dossier par l’AE est un préalable obligatoire. Tout reste donc à faire pour SNCF Réseau en charge des études. Quant au CNPN, son avis consultatif est également obligatoire. Les carences du dossier initial pourraient faire considérer l’avis du CNPN comme provisoire, l’instance n’ayant pas pu examiner les mesures finales.

Que va-t-il se passer maintenant ? Sur le tronçon AFNT, les travaux devaient démarrer dès 2024. Pour cette première phase, et en cascade sur les suivantes, du retard est probable le temps que les dossiers soient complétés et réexaminés. Mais s’agit-il d’un coup d’arrêt ? On peut en douter, à moins d’un réveil politique majeur face aux promoteurs du projet LGV. Il est utile de rappeler qu’en 2015, la commission d’enquête publique (réunissant 28 commissaires enquêteurs et enquêtrices) avait également émis un avis défavorable, ce qui constitue un événement assez extraordinaire concernant des projets d’infrastructures. L’État avait passé outre, prenant quand même les Déclarations d’utilité publique. Attendons de voir la suite, mais à la sortie du rapport de l’AE, le préfet de la région Occitanie a indiqué prendre acte de cet avis « qui ne remet naturellement pas en question le principe de la réalisation de cette opération AFNT ».

La fracture dans la prise de conscience environnementale

Que vont donc peser les avis de ces experts face à des visions étatiques et politiques figées dans des schémas de développement désuets ? Nous sommes dans ce paradoxe où les outils légaux de préservation de la biodiversité existent, mais où les décisions politiques en font fi. Le désaveu des experts sur le projet LGV est certes une bonne nouvelle, mais ce n’est malheureusement pas le signe d’un changement dans la vision du monde par l’Etat, ni même d’une simple inflexion pour prendre en compte les enjeux actuels, que ce soit au niveau du climat ou de la biodiversité. En effet, ces avis ne sont en rien un auto-contrôle de l’Etat. Ces deux instances qui portent la mission officielle d’analyser les projets sous l’angle environnemental sont des structures autonomes, non soumises à l’autorité de l’État. Leur parole est libre, c’est aussi ce qui fait leur force. Leur avis d’experts indépendants prouve que le fossé se creuse toujours plus entre la bonne application des lois environnementales et les décisions politiques sur la LGV. Cette fracture entre, d’une part, la prise en compte vitale de notre environnement et, d’autre part, des décisions d’aménagement, existe aussi sur des projets beaucoup plus locaux qui peinent à se réactualiser devant l’accélération pourtant nette du changement climatique et l’effondrement de la biodiversité. C’est le cas par exemple à Cambo sur les terres agricoles de Marienia ou sur les barthes du CEF de Mouguerre pour lequel le CNPN vient également de rendre un avis défavorable. Savoir modifier des décisions prises plusieurs années auparavant pour répondre à l’urgence climatique et aux crises actuelles n’est sans doute pas facile, mais cette évolution dans les pratiques politiques est pourtant aujourd’hui indispensable pour nous assurer un avenir soutenable.

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