Il est des êtres rares que l’on rencontre seulement dans le combat qui est le nôtre. Longtemps nous l’avons connu comme notre mystérieux abonné lillois, puis auteur de plusieurs articles et dossiers retentissants dans les colonnes de ce journal et enfin avocat d’Enbata devant la Cour européenne des droits de l’homme.
Arrivé en Pays Basque en 1998, Didier Rouget est déjà un militant très engagé depuis plus de 25 ans, non seulement au service des combats abertzale, mais également dans de nombreuses luttes sociales et politiques. Il fait partie de ces militants des années 70 qui, par conviction, quittent leur classe d’origine et “s’établissent» dans le monde ouvrier. Conscient que le combat passe par le champ du droit, il reprend ses études et passe une thèse consacrée aux Droits de l’homme et aux différentes conventions européennes qui y sont attachées.
Maître de conférence de droit public à l’université de Paris, il devient avocat et plaide de nombreux dossiers auprès de la Cour européenne des droits de l’homme.
En 1997, Didier Rouget parvient à faire condamner trois gardes civils coupables d’avoir torturé Kepa Urra.
En 1999, il obtiendra la condamnation de l’Etat français par le Comité contre la torture des Nations Unies, pour la remise en 1987 de Josu Arkauz à l’Etat espagnol.
Didier Rouget, demeurera dans l’histoire du combat basque comme l’homme qui fit tomber la “Doctrine Parot». Le 23 octobre 2013, l’avocat obtint auprès de la Cour européenne des droits de l’homme la condamnation de l’Espagne pour un montage juridique inique qui violait le principe de non rétroactivité de la loi et permettait à cet Etat de prolonger indéfiniment l’incarcération de nombreux militants abertzale. Grâce à l’opiniâtreté de Didier Rouget, près de 70 militants furent ainsi été libérés.
Avocat, enseignant universitaire, mais aussi élu, Didier Rouget, engagé dans la lutte contre la ligne LGV, fut aussi conseiller municipal abertzale d’Ustaritz de 2012 à 2014.
Dès que le journal Enbata fut attaqué en diffamation par le commissaire de la PAF d’Hendaye, Joël Catala, Didier Rouget vint au 3 rue des Cordeliers pour nous dire que si nous n’obtenions pas gain de cause auprès des tribunaux français, il se proposait de plaider notre cause devant la Cour européenne des droits de l’homme. Son offre nous toucha d’autant plus qu’à cette époque, notre ligne politique devenait de plus en plus critique à l’égard de Batasuna et d’ETA. Mais il en fallait beaucoup plus pour freiner Didier Rouget dans sa générosité et sa détermination.
C’est dire la dimension de cet homme, elle n’eut d’égale que sa modestie et sa discrétion. En lui brûlait l’âme de la Résistance. Il l’incarnait. Une force étrange brillait dans son regard, sûrement celle de Marie Durand, l’irréductible protestante, enfermée pendant 38 ans (1730 1768) dans la Tour de Constance à Aigues Mortes, pour avoir refusé d’abjurer. Et dont il nous reste un seul mot, “Register”, résister, qu’elle grava dans le granit de sa cellule.
Pour saluer Didier Rouget, laissons la parole au poète Bitoriano Gandiaga qui mieux que tout autre, définit celui qui “ne s’attarda jamais à l’ornière des résultats”, qui toujours fut “du bond et non pas du festin son épilogue” : “Plazan ezagutzen da bat gizon ote den. Proba ederra dugu euskaldunok hemen. Asko ez da oraindik burrukara irten, nahiz ikusi Herria sokatira galtzen. Ea nortzuk duten behar hainbat kemen gogor dut galdetzen hitz gorriak ezten, gaurko gizonoz bihar lotsa ez daitezen.”
“N’attends pas que les événements arrivent comme tu le souhaites !Tu risque d’être déçu et vaincu!
Décide de vouloir ce qui arrive…! Et tu seras toi-même, à partager avec les autres …libre…et.. heureux!”
Voila son message!
” Année 2015, Didier ROUGET nous laisse ,c’est la seule fois où il nous a fait une très grande peine! A nous de nous montrer dignes de lui, de ses engagements pour tous ceux qui subissent l’absence de démocratie véritable, de ceux qui souffrent d’inégalité et manquent de liberté!
Pour lui, être basque est celui qui le veut bien..et le prouve!
Il l’a prouvé mieux que beaucoup sinon de quiconque!
Agur Jauna! Jauna Agur!
Pour lui, ce chant bien de chez nous ,chanté par une famille irlandaise, très,très émouvant!
Et pour voir la video: :………..https://www.youtube.com/watch?v=xNMaMNMpYEk&feature=youtu.be