Aux nombreuses manifestations d’agriculteurs, se sont joints des « asyndiqués » tout aussi concernés. Malgré leur méfiance vis-à-vis des divers syndicats, comment les inciter à s’engager, sous quelque forme que ce soit ?
L’hiver qui vient de passer a vu se dérouler d’importantes manifestations d’agriculteurs menées tantôt par la FNSEA, tantôt par la Coordination rurale ou encore par la Confédération paysanne. Le tout mené parfois par de la surenchère, comme un jeu où sortirait gagnant le syndicat qui serait le plus visible et qui s’imposerait en véritable défenseur de l’agriculture. Ceci étant, les différents rassemblements étaient très souvent rejoints par des agriculteurs n’appartenant à aucun syndicat, mais qui décidaient enfin de sortir de leurs fermes pour crier leur détresse. Ces personnes asyndiquées ont très vite attiré mon attention, ne serait ce qu’à travers leurs paroles faisant écho à ce que j’entends souvent autour de moi : « Les syndicats sont de mèche avec les décideurs », « c’est politique tout ça », « les paysans syndicalistes sont éloignés de leur base ». Ces paroles m’ont toujours interpellé dans le sens où moi-même, syndicaliste, je me sens attaqué à tort car je n’ai pas l’impression de faire de la politique, si ce n’est que d’être dans la défense du paysan. Oui, je crois qu’un Arnaud Rousseau a perdu la fibre paysanne au fur et à mesure qu’il montait les échelons à la FNSEA, soudoyé par les lobbies industriels et financiers ; mais pour autant, faut-il mettre tout le monde dans le même panier ?
Que veut-on ?
Je pense sincèrement qu’on fait tous de la politique à partir du moment où on émet notre avis et qu’on a notre vision des choses. Et c’est tout à fait normal car dans une vraie démocratie, toutes les idées sont représentées par une diversité d’organisations. Cela vaut aussi pour le monde agricole où il existe plusieurs syndicats qui émettent eux-mêmes des opinions divergentes, permettant aux paysans de se retrouver chez les uns ou les autres. Veut-on des fermes nombreuses dans un territoire, mais alors petites pour se partager la production ? Veut-on des grosses fermes productives et très techniques pour nourrir la population mondiale à bas prix? Veut-on laisser faire tout et n’importe quoi sans aucune règle ? Autre chose ?
Où se situe l’asyndiqué dans tout cela ? S’il ne se retrouve dans aucune formation, a-t-il encore une autre perception de l’agriculture qui mérite d’être représentée à travers un autre groupe ? Une manifestation d’asyndiqués peut réclamer un meilleur revenu pour les agriculteurs, mais alors, quelles seront les idées à mettre en place pour y arriver ? C’est ce paramètre qu’il me manque afin de comprendre pourquoi un asyndiqué ne veut rentrer dans aucune case !
Ce qui fait un syndicat
Il me semble qu’intégrer un syndicat agricole ayant des valeurs qui nous ressemblent permet de contribuer aux débats pour définir les stratégies et les actions à mener pour défendre les autres ! Ce qui fait un syndicat, c’est avant tout les femmes et les hommes qui le composent ! Ce sont des réunions, des discussions, des sensibilisations des élus, acteurs économiques ou autres pour faire évoluer les réglementations, les lois ou les règles, pour que chaque paysan puisse vivre de son métier dignement.
Quant à moi, j’attends toujours la notice qui me permettra de comprendre comment convaincre un asyndiqué de s’investir dans un syndicat agricole, ou bien de créer sa propre association qui fédérera tout le monde avec des idées nouvelles ! Un asyndiqué est-il tout simplement un individualiste ? Ou bien a-til conscience de la force d’un collectif ? Fera-t-il partie des 50 % d’abstentionnistes habituels lors des prochaines élections syndicales? Cher asyndiqué : les récentes manifestations ont mis en lumière ta colère et ton désespoir : une vocation de militant va-t-elle naître chez toi ? Engage toi : l’union fait la force !