L’évêque qui divise

La mitre Aillet.
La mitre Aillet.

Depuis sa nomination à la tête du diocèse, Mgr Marc Aillet a souvent défrayé la chronique par ses prises de position conservatrices. Retour sur le désarroi qui a gagné une partie de la communauté chrétienne du Pays Basque.

Mgr Marc Aillet aussi actif que médiatique passe pour un excellent communicant. Mais il est pourtant arrivé à l’évêque de Bayonne Lescar et Oloron de se fourvoyer sur des sujets exigeant plus de mesure que de provocation. On se souvient de son funeste tweet sur l’avortement entré dans les annales (janvier 2016): “L’Etat prétend protéger les citoyens contre Daech et s’engage dans une campagne pro-IGV condamnant des innocents à la violence : illisible !” Les réactions furent telles (la ministre de la Santé jugea ses propos “insupportables, inacceptables et irresponsables”) que Mgr Aillet demanda à ses ouailles de lui pardonner ce que très miséricordieusement l’on pourrait appeler “faux-pas”. “Avec le recul, dit-il quelques semaines plus tard sans se dédire pour autant, je reconnais toutefois que ce tweet a été mal compris…”Le prélat parvint tout de même à trouver un “aspect positif” à une affaire qui selon lui, illustrait “le climat d’intolérance qui caractérise notre société”.

Déclarations clivantes

Mgr Aillet, issu de la Communauté Saint Martin, arrivé du diocèse de Fréjus (novembre 2008) précédé d’une réputation de conservateur invétéré, n’aura eu de cesse de se livrer à un chapelet de déclarations clivantes touchant à des problèmes de société bien typés: avortement, homosexualité, mariage pour tous notamment.

L’on se souvient de l’épisode Gay Pride de Biarritz (juin 2009) et des flèches acérées que Mgr Aillet décocha au maire Didier Borotra, lequel répliqua en invoquant les lois de la République distinctes de celles de l’Eglise.

Attaques en règle aussi contre le Salon de l’érotisme de Pau (octobre 2009).

Messe célébrée le 26 juin 2010 à Bayonne pour l’anniversaire de la mort du fondateur de l’Opus Dei, Mgr Escriva de Balaguer dont l’influence se ressent particulièrement en Navarre.

Ce chapelet, le prêtre Michel Oronos l’a égrené sans détours ni concessions dans l’ouvrage (janvier 2013) intitulé Enfin Don Aillet vint, paru bien avant donc que l’effigie de Mgr Aillet ne soit brûlée au Carnaval de Saint-Jean-de-Luz-Ciboure sur l’autel de San Pantzar (février 2016). La Conférence épiscopale de France dénonça l’attitude “indigne” des protagonistes, mais ceux-ci inscrits dans l’esprit licencieux de la tradition carnavalesque pure, plaidèrent non coupables.

Mgr Aillet, arrivé du diocèse de Fréjus
précédé d’une réputation de conservateur invétéré,
n’aura eu de cesse de se livrer
à un chapelet de déclarations clivantes
touchant à des problèmes de société bien typés.

Gernika interdite

Huit années ont passé depuis que l’évêque du diocèse a brandi l’étendard de la nouvelle évangélisation prônée par le très doctrinaire Benoît XVI, prédécesseur de l’actuel Pape François. Le prélat a tissé son réseau, installé ses adeptes aux postes clefs du diocèse et des prêtres issus de communautés étrangères au diocèse dans des paroisses telles que Saint-Martin à Biarritz et Saint-Amand à Bayonne. Deux paroisses dont Maite Irazoqui, laïque impliquée dans l’Eglise (ex-directrice de l’enseignement catholique dans le diocèse) évoquait la situation dans une chronique tranchante publiée par Herria (mars 2016). Elle y décrivait l’errance de nombreux paroissiens (allant “d’église en église, quelques- uns ici et d’autres là, nomades de relais en paroisses, de couvent en monastère”) et la désaffection de laïcs qui se sont sentis rejetés. Alors que s’impliquaient de nouveaux pratiquants proches des thèses pré-conciliaires Vatican II, le latin faisait ainsi son retour, les fillettes- enfants de choeur étaient éloignées du choeur des églises. Et Gernika la grande cantate de Pablo Sorozabal se voyait interdite en la cathédrale de Bayonne (juin 2011).

Un diocèse cassé

Il y a quelques semaines Maite Irazoqui racontait un diocèse “cassé” sous la houlette d’un évêché “dont les propos semblent liés à l’extrême droite”, un diocèse “triste”, “blessé”, divisé en courants en voie de radicalisation. Un diocèse où le clergé lui-même connaît une situation difficile partagé qu’il est entre prêtres appréciant la tonalité nouvelle impulsée par la force montante des “traditionalisants” après des décennies de désaffection des églises et ceux restés dans le sillage de Vatican II où nombre d’entre eux se sentent traités comme des exécutants.

En d’autres termes le malaise ne fait que grandir. Jusqu’ou ? La dernière assemblée du mouvement Elizan Mintza (30 mai 2016), lieu de réflexion plurielle et de parole libre, reflétait parfaitement cette situation. Pour l’illustrer relevons l’absence de réponse véritable de l’évêché face à la requête formulée en 2009 pour la création d’une pastorale basque, l’éloignement de la jeunesse, la place de plus en plus réduite de l’euskera dans la vie de l’Eglise, les attentes de mieux-être observées en Euskadi et Navarre…

Une Eglise basque corsetée

Côté sud, la nomination du nouvel évêque de Vitoria-Gasteiz a semé surprise et expectative. Le Vatican dont nos voisins sensibles aux promesses du Pape François attendaient plus d’audace, a en effet opté pour le Navarrais Juan Carlos Elizalde jusqu’ici prieur de Roncevaux. Ordonné évêque le 12 mars 2016 il n’est pas vraiment connu pour ses idées progressistes. Les trois autres diocèses basques (Saint-Sébastien, Bilbao et Pampelune) étant dans les mains de prélats nommés par Benoît XVI, l’Eglise basque reste sous la coupe d’une prélature conforme à la feuille de route signée par la Conférence épiscopale espagnole des années 2000 hostile à la communauté chrétienne réputée progressiste. Surtout à Saint- Sébastien où le groupe Eutsi Berrituz (laïcs, prêtres, religieux) s’exprimait encore récemment (février 2016) pour stigmatiser une église locale “divisée et sans vie”. Ceci six ans après la nomination du Guipuzcoan José Ignacio Munilla qui succédait à Juan Maria Uriarte très impliqué dans la recherche de la paix au Pays Basque. Question qui malheureusement, n’intéresse pas Mgr Aillet.

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3 thoughts on “L’évêque qui divise

  1. Que Mgr Aillet aille voir les eglises d”Amerique du Sud et leur debauche ( au bon sens) de musique avec les orchestres dans l’eglise et les participants ebaucher un pas de danse en allant a la communion : tout n programme ; voulons nous reconquérir les jeunes et leur comportement et s’adapter ; il faut evoluer

  2. de toutes les maladies mentales que l homme s est implantées systématiquement dans son cerveau,la peste religieuse est certainement la plus horrible

  3. Mgr Georg gänswein, actuel secrétaire de Benoît XVI, disait que les critiques constructives sont toujours justes ( Bild, avril 2010). Quand aurons-nous un pasteur ayant pour souci le salut de toutes les âmes (can.1752) comme le pape François ?

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