La Soule exportatrice d’énergies renouvelables

Enbata: La prise en compte par la Soule des questions énergétiques, et par là même climatiques, ne date pas d’aujourd’hui. Pouvez-vous nous en dire un peu plus?
Bertrand Dhulst: Si on extrapolait les questions climatiques, on pourrait dire que depuis plus d’un siècle, la Soule s’est chargée de répondre à la demande des besoins en énergie pour son territoire! En effet, les nombreux cours d’eau qui la sillonnent, étaient régulièrement ponctués de moulins dont les meules fonctionnaient grâce à la force hydraulique. Très vite (depuis 1891 à Mauléon), là où le débit de l’eau le permettait, les moulins se sont transformés en usines hydroélectriques alimentant plusieurs des bourgades les plus importantes. Même si les petits moulins chargés de moudre le grain ont, pour la plupart d’entre eux disparus, la production hydroélectrique locale actuelle dépasserait les besoins de l’énergie électrique consommée. La Soule, avec sa douzaine de centrales hydroélectriques, exporte de l’électricité! Diverses initiatives montrent cette prise en compte. En 2004, des citoyens et acteurs du territoire organisés au sein de l’association EKHI GEO (composée de chefs d’entreprise, d’élus, d’architectes, d’agriculteurs, d’exploitants de centrales hydroélectriques…), se sont plusieurs fois mobilisés pour organiser des salons sur les énergies renouvelables à Mauléon, des conférences sur les solutions alternatives de production et de consommation d’énergies, ou sur les effets de la consommation en général. De même, quand on se ballade en soule, il n’est pas rare de voir des toits couverts de panneaux photovoltaïques.
La Communauté de communes de Soule-Xiberoa a été à l’initiative de soutiens spécifiques au développement durable et à l’usage des énergies renouvelables. Elle a initié des études de faisabilité d’installation de réseau de chaleur pour des établissements scolaires de Mauléon et de Chéraute, et mis en place des aides financières pour encourager l’installation de panneaux permettant la production d’eau chaude sanitaire solaire.
Depuis octobre 2011, elle a créé un poste de chef de mission «ENR» (énergies renouvelables, NDLR) dont l’un des objectifs et d’étudier la possibilité de mise en œuvre d’une filière Bois-Energie à partir des bois issus des forêts de la montagne basque.
Je peux vous dire que les interlocuteurs que je rencontre dans le cadre de ma mission démontrent que les énergies renouvelables ont toute leur place en soule.

Enb.: Quels enseignements peuvent être tirés des premières actions et démarches accomplies?
B. D.: La priorité de ma mission a été de rencontrer les consommateurs d’énergies à potentiels relativement élevés. Je peux té-moigner que chaque fois, j’ai été accueilli avec intérêt et beaucoup d’attentes sur le sujet des énergies renouvelables.
Je dois aussi vous avouer que la raison essentielle n’est pas la réduction des gaz à effet de serre mais la prise en compte des intérêts à l’usage d’énergies locales ou d’indépendance énergétique. Parfois aussi, la curiosité sur les process liés à l’usage de la biomasse et bien sûr, la recherche d’une économie sur les coûts énergétiques.
La réduction des gaz à effet de serre n’est en réalité que la conséquence positive de la volonté de développer l’usage des énergies renouvelables tout en travaillant sur l’efficacité énergétique.
Cette quête est une évidence sur un territoire qui possède de l’eau, du soleil, du vent et dont la surface boisée représente 40% du total.
Concrètement, cette animation a révélé des opportunités et des projets sont à l’étude. Par exemple, le prochain groupe scolaire qui va se construire sur la commune de Chéraute sera doté d’une chaudière à bois.
A des fins de chauffage, pour de la construction neuve, et ce malgré un coût du gaz naturel encore compétitif, le bois peut se placer correctement grâce aux appuis de l’ADEME, de la Région, du Département et de la Communauté de communes de Soule-Xiberoa. Dès qu’il n’y a pas de chauffage central avec un réseau de radiateurs à eau dans les bâtiments, l’installation devient trop coûteuse.
Pour les industries, que ce soit pour produire de l’eau chaude, des calories ou de la vapeur, la chaudière biomasse peut même parfois permettre de ressourcer certains déchets à des fins de combustibles!

Enb.: La question des énergies renouvelables ou de la réduction des émissions de gaz à effet de serre est l’affaire de tous. Comment faire, selon vous, pour favoriser les synergies entre secteur public et privé ou encore entre initiatives collectives et individuelles?
B. D.: Toute initiative publique a une conséquence à termes sur le privé. Prenons l’ex-emple de l’usage de la biomasse pour le chauffage. Par effet d’échelle, le développement de l’usage de la biomasse devrait permettre d’organiser une filière bois qui permettra de rassurer les consommateurs en termes d’approvisionnement de combustible. L’appui au développement des projets par la collectivité publique territoriale pourra servir, de ce fait, aux privés.
Inversement, la moitié des surfaces boisées appartient à des propriétaires privés! Un patrimoine très important dont l’entretien pourra produire une ressource pour le propriétaire et pour la collectivité. D’ailleurs, chez certains d’entre eux, des chaudières bois se sont installées avec l’usage du bois en buche mais également avec du bois déchiqueté. Ce genre d’initiative est loin d’être une utopie car j’ai rencontré plusieurs agriculteurs propriétaires forestiers, se po-sant la question d’un débouché pour leur activité en plus de l’intérêt de chauffer les 300 mètres-carrés de leur maison souletine.

Enb.: Le samedi 22 septembre a eu lieu, à Mauléon, une conférence-débat co-organisée par l’association Bizi! et la communauté de communes, sur le thème «Bois-énergies et autres énergies renouvelables: vers un territoire à énergie positive», avec la participation de Michel Maya maire de la commune de Tramaye. Quelles conclusions tirez-vous de cette conférence?
B. D.: Cette initiative de Bizi d’associer la communauté des communes pour cet événement est une belle preuve de convergence du public et du privé sur l’animation autour de ce sujet. Michel Maya est maire de Tramaye, commune de 900 habitants près de Mâcon. Sa commune possède un hôpital, une école, des logements privés. Cette configuration ressemble fortement à notre territoire… En mettant en œuvre de petites initiatives favorisant les économies d’énergie et le développement durable dont l’usage de la biomasse pour un réseau de chaleur, on se rend compte que l’on peut faire bouger les lignes.
Michel Maya est un élu, impliqué, qui est venu nous raconter comment il est possible de devenir un territoire à énergie positive. Nous avons entendu parler de la maison basse consommation, des bâtiments passifs ou à énergie positive. Cette fois, il s’agit de produire plus d’énergie que l’on n’en consomme, au niveau d’un territoire donné! C’est une conférence débat qui, je crois, a répondu à de nombreuses interrogations.

Enb.: Pensez-vous que la Soule puisse un jour devenir un territoire à «énergie positive»? Quelles seraient les actions à mener et, à l’inverse, les freins à lever?
B. D.: Bien sûr! On bénéficie de températures relativement clémentes ne nécessitant pas une consommation d’énergie aussi élevée que celle que l’on peut connaître à Mâ-con.
La Soule possède des ressources énergétiques de substitution aux énergies classiques, peu émissives en CO2 (gaz carbonique, le plus important des gaz à effet de serre, NDLR). La croissance des coûts des énergies fossiles va devenir rapidement préoccupante. Même s’il existe un réel intérêt sur le sujet, le frein essentiel est le temps nécessaire à la mobilisation pour mener à terme un projet. Le durable nécessite de l’anticipation. De même, je pense qu’on demande parfois un peu trop au développement durable. De façon inconditionnelle, on exige de lui de l’efficacité, de l’écologie, le moins de contrainte possible et un prix plus compétitif! Il y a visiblement un problème d’équité par rapport à notre jugement sur nos habitudes de consommations.

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