Plébiscité au Pays Basque, l’enseignement immersif reste menacé par Paris, en dépit des conventions avec l’Education nationale. Une clarification doit avoir lieu le 14 septembre au ministère de l’Education.
D’un côté, un modèle immersif d’enseignement du basque triomphant, validé par une fréquentation sans cesse en augmentation et l’approbation globale des pouvoirs publics locaux. De l’autre, une bataille sans fin qui ne permet jamais de poser le glaive, lorsque chaque rentrée scolaire promet son lot d’inquiétude et de désagrément.
Défendre l’euskara et son usage à beau être une cause qui ne souffre aucune velléité, il faut encore ferrailler contre des élus locaux qui s’opposent au développement d’une ikastola sous mille prétextes ou surtout, dans cette tâche déjà ardue d’enseignement, contre le Rectorat ou le ministère de l’Education.
“Pourquoi est-ce si difficile de vivre en basque ? Jusqu’où devons nous nous battre pour que les droits de nos enfants soient respectés ?” s’est inquiété Peio Jorajuria, le président de Seaska, en cette rentrée.
Effectifs en augmentation
Sur le papier pourtant, l’école immersive à le vent en poupe. Malgré une baisse notable de démographie dans le département d’un millier d’élèves à chaque rentrée, les ikastola augmentent leurs effectifs de plus de 100 élèves cette année pour atteindre 4200 enfants dans 38 ikastola.
Après mobilisation des parents, l’école publique développe également l’enseignement en immersion. C’est le cas par exemple à la maternelle de Larrau ou en classe élémentaire à Irissarry.
Côté ikastola en revanche, celle de Briscous est toujours à la peine avec un conseil municipal peu enclin à favoriser son expansion. Une broutille mais qui fait sens à l’heure où l’ikastola de Ciboure vient d’accueillir 18 élèves supplémentaires dans ses locaux neufs, grâce à la volonté du nouveau maire abertzale Eneko Aldana qui a trouvé une solution rapide après sept années de crise. Quand on veut…
Mais on ne veut pas toujours. La fédération des ikastola voit aussi les nuages s’accumuler et malgré des propos rassurants du nouveau ministre de l’Education, Pap N’Diaye, rien n’indique que les élèves pourront bientôt obtenir de passer le brevet ou le baccalauréat dans la langue d’Axular.
Aucune matière ne peut plus être présentée en langue basque dans les épreuves finales du baccalauréat et le brevet n’est plus entièrement en euskara, comme cela était le cas avant 2018 et l’arrivée de Blanquer au ministère.
Délogés par la force
Ces dernières années, rassemblements, manifestations, chaînes humaines et occupations se sont succédé sans succès, jusqu’à juin dernier, lorsque les parents d’élèves ont été délogés par la force de l’Inspection académique où ils ne demandaient que le respect d’un acquis. Ce droit reste aujourd’hui menacé. Un courrier de la Direction générale scolaire (ministère de l’Education) en assurait d’ailleurs les représentants de Seaska le 27 juillet dernier. Le 23 août, c’est une “circulaire d’orientation” du Rectorat, adressée aux collèges, qui a laissé le président de Seaska pantois : “Nous ne savons pas dans quelle planète réside madame la rectrice, mais elle fait comme si l’immersion n’existait pas, comme si la circulaire sur les langues du 18 décembre 2021 n’existait pas, limitant la possibilité de l’enseignement bilingue à 50% du temps scolaire...”.
Nous ne savons pas dans quelle planète réside madame la rectrice,
mais elle fait comme si l’immersion n’existait pas,
comme si la circulaire sur les langues du 18 décembre 2021 n’existait pas,
limitant la possibilité de l’enseignement bilingue à 50% du temps scolaire…
Pas de quoi calmer les esprits. A moins que le ministre Pap N’Diaye ne parvienne à arbitrer ce dossier et revenir à la circulaire de décembre 2021 qui prévoit que les élèves des classes immersives “peuvent présenter des épreuves en langues régionales”, conformément à la convention triennale qui lie Seaska à l’Éducation nationale. Une rencontre est justement prévue ce 14 septembre au ministère, avec l’Office public de la langue basque et les parlementaires basques qui plaideront la cause de Seaska. Depuis l’attaque du Conseil constitutionnel français contre les langues régionales, condamnée par le Conseil des droits de l’Homme des Nations Unies, une clarification s’impose.