Comme 7.000 autres, j’étais à la pastorale Pitrau. Le temps m’y a paru court, tellement elle m’a plu. Voyant des têtes bien connues, je me demandais : “Qu’est-ce qu’ils peuvent bien penser, eux qui croient au développement, à la croissance et dans tous les dogmes de la postmodernité?” Sans doute : “Quel doux rêveur que ce Pitrau! Complètement dépassé!”
Il se bagarrait pour tenir ouverte cette école sur les flancs de la Madeleine, alors que nous fermons celle de Hélette (750 h.).
Nous sommes entrés dans le monde de la rentabilité, suivant la ligne moderne des fermetures d’épiceries, bistrots, artisans, presbytères, PTT, postes d’essence etc.
Pitrau tenait aux petites fermes de montagne alors que les brebis lacaunes remplissent aujourd’hui par milliers les bergeries de la plaine souletine. Elles vivent très bien avec la luzerne de Navarre, grâce aux camions : un secteur de l’économie en plein essor. Vous me direz que cela pollue l’atmosphère. C’est ce que prétend le lobby des prophètes de malheur du milieu écolo.
Il prêchait le slogan “vivre et travailler au pays”. Il aurait voulu que les jeunes restent ici au lieu d’émigrer à Paris ou en Californie. Il ignorait les bienfaits de la mondialisation. Où en serait la France sans les millions d’immigrés?
Les Belges qui firent les beaux jours des filatures du Nord, les Italiens fournissant des manoeuvres à la grande industrie, les Polonais descendant dans les mines de charbons, les Algériens construisant des HLM à partir de leurs bidonvilles, les Portugais arrivant par semi-remorques entières.
Aujourd’hui, qui balaierait le métro sans les noirs ? Sans tous ces “gens de couleur” qui récolterait médailles d’or et d’argent aux jeux olympiques, marquerait les buts de match de foot faisant la gloire de la France!
Ce doux rêveur de Pitrau n’a pas réalisé combien de milliards a économisés la France en important, prêts au travail, ces millions d’immigrés, à la charge d’un autre pays depuis leur naissance jusqu’à l’âge où ils sont devenus productifs.
J’allais oublier ces 200.000 tirailleurs dits “Sénégalais”, 300.000 Maghrébins etc. combattants de 14-18! Le sang de 80.000 Africains (dont 10.000 Maliens, soit dit en passant!) a abreuvé les sillons de “leur” patrie.
En 2006 la retraite d’un ancien combattant Algérien était huit fois moindre que celle d’un Français. Un chapitre d’économies supplémentaires pour nous.
Laissons de côté les slogans surannés. Importons avec pétrole et métaux rares, tous les bras qui permettront à notre grande Europe de s’hyper-développer, et à notre cher Pays Basque de couvrir de hangars et de résidences secondaires ces terres agricoles que Lurrama s’imagine encore préserver.
Lorsqu’il n’y aura plus un are de terrain libre entre Bayonne et Mauléon, la douzaine d’autoroutes sillonnant le Pays Basque prouvera aux plus sceptiques que nous aurons atteint le sommet du développement. Nous serons au rang des mégapoles, avec Buenos Aires, Shanghai ou Mexico.
C’est ainsi que nous connaîtrons ce Grand Soir que les communistes nous avaient promis … en vain.
Quant à celui des chrétiens… “il y a bien longtemps, bien longtemps qu’on l’attend” comme le dit la chanson.
Alors, mangeons et buvons car demain nous mourrons.