Parlez-vous Belge ?

Wallonie
Paul Magnette, le ministre-président socialiste de la Wallonie

Nouvelle défaite de l’Europe, titrait Le Monde à l’annonce du rejet par le parlement wallon du traité de libre-échange entre l’UE et le Canada. Mais au-delà de cet Europe bashing tant à la mode, c’était la mise à l’index de ce petit parlement provincial ayant le toupet de prétendre dérégler une énorme machine institutionnelle à l’échelle d’un continent. Qu’un chef de gouvernement hongrois, tel Victor Orban, fut-il détestable, joue les trouble-fêtes, passe encore. Que le parlement polonais s’affranchisse du socle démocratique de l’Union, nous restons encore entre partenaires majeurs. Mais que l’assemblée d’un petit territoire autonome interne à l’un des 28 Etats membres se permette de contrarier un traité international, c’est incongru et, pour tout dire, insupportable. C’est parler hébreu à la France jacobine, ses élites, ses corps intermédiaires et son peuple alors que, curieusement, les Wallons parlent français.

Au panthéon de l’histoire, De Gaulle ne saurait emporter son “Vive le Québec libre”. Et si, au lieu d’ébranler l’Europe, les Wallons lui avaient indiqué la marche à suivre pour mieux construire le vivre ensemble d’une mosaïque de peuples aux langues et aux histoires différentes qui, depuis mille ans, n’ont cessé de se faire la guerre ?

Bien qu’ayant le coeur de la Belgique pour localiser ses différents organes de pouvoir, l’Union, dans la mise en place du CETA, n’a pas tenu compte de la complexité institutionnelle de la Belgique. Etat multinational artificiel, né sur les décombres de l’Empire, il fut le théâtre d’un affrontement permanent entre francophones et néerlandophones. La suprématie linguistique et économique qu’exerça la Wallonie sur la Flandre s’est renversée au tournant de la perte de son industrie lourde et de l’explosion nataliste des Flamands.

Aujourd’hui, apaisée grâce à un fédéralisme très poussé, la Belgique, comme la Suisse, peut servir de modèle à la construction européenne, tant sur l’exercice de la démocratie de proximité que du respect des trois communautés linguistiques, allemande comprise.

Or, les objections des Wallons, leur ministre–président Paul Magnette les avait fait connaître à la Commission européenne depuis un an. La décision du 5 juillet de la Commission de rendre mixte, c’est-à-dire de partager sa compétence sur le CETA avec les 28 partenaires, rendait inéluctable l’approbation du parlement wallon comme cela est prévu dans l’organisation interne de l’Etat fédéral belge. Grâce à cet incident de parcours, c’est toute l’opinion publique européenne qui s’est sentie représentée par Paul Magnette dans sa volonté de dépouiller le traité UE-Canada de ses aberrations les plus inacceptables.

L’accord belgo-belge du 27 octobre qui annule, notamment, les tribunaux privés d’arbitrage, est acté dans une annexe du traité que le premier ministre canadien, Justin Trudeau, et le président du Conseil Européen, Donald Tusk, ont enfin paraphé. Ce psychodrame est porteur d’espérance car il oblige à repenser l’Europe.

L’histoire des nations s’est écrite sur ce continent souvent douloureusement. Mais vouloir construire l’Union comme ont été construites les nations qui la constituent entraîne les perpétuelles crises que l’on traverse. Tendre à une solidarité d’un destin continental ne peut procéder que du respect de nos cultures et sociétés diverses.

Le fédéralisme n’est pas un simple système de gestion des contraires, il est une philosophie qui fonde l’acceptation politique de l’autre. On se rend bien compte qu’on ne peut avancer ensemble sur l’unanimité des 28 pays partenaires. Il nous faut trouver un système qui ne donne pas un droit de veto à chacun sur toutes les politiques communes. L’incident wallon du CETA en est le dernier avatar.

Il nous faut pourtant respecter la souveraineté des peuples. Dressons alors la liste des compétences dévolues à chaque strate institutionnelle. L’agriculture et la pêche sont de la compétence de toute l’Union. Quelles sont les autres ?

L’enseignement relève des Etats ou de leurs communautés autonomes et ainsi de suite. Nous, Basques, avons été les cobayes de la complexité d’une démocratie européenne lors du traité constitutionnel de 2005. Par référendum, les citoyens français l’ont rejeté alors que les espagnols l’ont approuvé. Si le traité de Lisbonne l’a fait rentrer par la fenêtre, qui en est frustré?

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