Certains abertzale pointent le risque que la proposition du préfet d’une communauté d’agglomération ou urbaine unique pour Iparralde ne soit une fin de non recevoir définitive à la revendication d’une collectivité territoriale spécifique. Pourtant, l’Etat, confronté à son importante réforme (et souhaitable), semble avoir la volonté de la traduire en Pays Basque, dans une perspective d’ouverture qui fera évoluer la situation.
La réforme territoriale voulue par l’Etat est, sans nul doute, intéressante pour la France, elle est aussi ambitieuse et courageuse. Elle vise une montée en puissance des régions, une disparition des départements, un renforcement des collectivités (Epci, communautés, agglos, etc.) et une limitation des communes dans leurs pouvoirs (36.000 en France). Ces évolutions ont déjà commencé : diminution des dotations de l’Etat aux communes et pertes de compétences, transfert des compétences (routes et écoles) du département vers les régions, taille minimum des communautés de communes, structuration juridique des communautés, etc. avec, en parallèle, un mouvement analogue sur les universités, les chambres consulaires, etc.
Appliquée et traduite en Iparralde, cette réforme, telle que proposée par le préfet (dans sa version d’intégration maximale) est une occasion unique depuis la création des départements dont le découpage avait choqué nos députés historiques, les frères Garat (au cri du fameux ma province proteste !). Pourquoi ne pas en convenir, simplement ?
Disparition du département
Il ne faut pas évoquer le terme (polémique ?) de disparition, car il pourrait choquer les républicains de 1789 néo conservateurs. Evoquons donc plutôt, le maintien du titre de conseiller général mais l’assèchement des budgets et le transfert des compétences dans les deux sens, vers la région et vers les communautés de communes. Comment ici ne pas réagir favorablement en citant les incessants combats qui ont touché notre reconnaissance.
Je n’en rappellerai ici que quelques uns : le pouvoir universitaire palois dont le ratio professeur/étudiant nous a toujours été défavorable et dont les disciplines nous ont été transférées au compte goutte, en ne nous confiant, par exemple, que les premières années, alors que le souhait exprimé et le dynamisme de la population plaidaient pour une unité de plein exercice. Beaucoup d’universitaires d’ici pourrait en témoigner.
L’opposition sémantique des termes Université des Pays de l’Adour et celui de Campus Pays Basque (n’existant encore que dans les cerveaux des acteurs du Conseil de développement) pourraient aussi cristalliser, si besoin, cette différence de concept, traduite dans les faits par la conception du plan stratégique à cinq ans de l’université de Pau, sans travail en commun avec le conseil de développement.
Nous pourrions aussi évoquer les chambres consulaires départementales de l’agriculture et des métiers dont les actions de terrain s’avèrent inadaptées par rapport aux contextes. Pourquoi ne pas parler de l’Agence du tourisme dont le budget important s’efforce de vendre un territoire et un logo sans caractéristique signifiante et sans culture vivante et qui n’apporte pas aux acteurs terrains (cluster goazen, entre autres) les appuis nécessaires. Quel touriste précise « je pars cette année en vacances dans les Pyrénées Atlantiques »? Nous pourrions aussi mentionner l’existence même du conseil général et ses leitmotivs sempiternels sur des équivalences imbéciles du type « si on fait cela pour les basques il faut aussi le faire pour les béarnais… », ou bien encore des exemples caractéristiques tels que l’introduction d’un bilinguisme de façade dans les
locaux du conseil général de Bayonne alors que ceux de Pau en sont souvent dépourvus. Ces exemples sont aussi ceux que l’on trouve dans l’université de Montaury alors que j’ignore s’il y a du béarnais dans l’université de Pau.
Le département pourrait disparaître. Vivent la région et la future communauté Pays Basque, mais encourageons le Béarn à faire de même. Déjà, à la demande du conseil général, une initiative « Herriko Ogia » sera sans doute promue en Béarn (la permanente du cluster Uztartu ayant été invitée à transférer la méthode utilisée). Dernièrement, en effet, les propos du récent maire de Pau ont paraît-il vanté les mérites des acteurs du Pays Basque et suggéré que les méthodes équivalentes soient développées dans une future communauté Béarn (à la différence de ce qu’aurait pu penser M Habib, peut être ?).
Autres conséquences des propositions du préfet
La prise en compte du territoire historique est un point indéniablement important. Elle n’était pas gagnée d’avance. Et, bien entendu, les conventions extraterritoriales avec nos voisins et amis (bassin de vie, transfrontalier, région), ne devront pas nous laisser nous engourdir dans un enferment d’un autre siècle. Le surplus de dotation de l’Etat si on choisit cette formule est, bien entendu, un avantage : sur la base 2013, dotation de 34.9M€ par an, avec +9.5% si choix communauté d’agglomération et avec +14.1% si choix communauté urbaine. Il faudra donc que ces options soient analysées par les experts qui avaient déjà planché sur le
sujet de la collectivité.
Les communautés de communes qui n’atteignent pas 20.000 habitants devront, de toute façon, fusionner. Il s’agit de Nivadour (18.932 habitants), Pays de Bidache (5.755), Pays d’Hasparren (14.897), Xiberoa (13.982), Amikuze (9.972), Garazi Baigorri (12.826) et Ostibarre (3.835). il faudra, aussi et surtout, éviter d’ancrer et pour longtemps, la séparation Côte/Intérieur qui serait désastreuse pour l’avenir (riche/pauvre, activité/désert, engorgement/soupape foncière, étudiants et technicité/réserve d’indiens, etc.) alors qu’une gestion commune de l’espace et des projets peut avoir un début de réelle réciprocité (liaisons est-ouest,
implantations économiques, désengorgement du BAB, politique pôles d’enseignement technique ou supérieur…). Tout plaide pour l’ensemble unique et commun.
La prise en compte du territoire historique
est un point indéniablement important.
Elle n’était pas gagnée d’avance.
Et, bien entendu, les conventions extraterritoriales
avec nos voisins et amis
(bassin de vie, transfrontalier, région),
ne devront pas nous laisser nous engourdir
dans un enferment d’un autre siècle.
Système évolutif
Le préfet a abordé les aspects de la loi et comparé un système fédératif à un système intégratif. L’intégration est adossée à des compétences et des budgets importants. La société civile devra être informée des conséquences qui sont très importantes pour l’avenir d’Iparralde. Les caricatures et les désinformations seront aussi nombreuses, il appartiendra, en partie aux abertzale, d’être particulièrement lucides, pragmatiques et
de bonne volonté.
L’Etat, confronté à son importante réforme (et souhaitable), semble avoir la volonté de la traduire en Pays Basque, dans une perspective d’ouverture qui fera évoluer la situation. L’opportunité semble unique depuis plus de 200 ans, ne laissons pas passer le train, sans perdre ni notre âme ni notre avenir. N’opposons pas, de façon mesquine, des intérêts qui peuvent concourir.
Ados naiz : ne laissons pas passer le train, sans perdre ni notre âme ni notre avenir…..
Bihar arte ?