Le Monde diplomatique publie un numéro de son supplément Manière de voir, intitulé «L’engrenage identitaire, ethnicité, minorités, diversité».
Le titre et la couverture faisaient craindre le pire: un énième brulot contre le communautarisme. Mais il n’en est rien. Avec les questions posées par l’immigration, l’affaiblissement des Etats et des religions européennes traditionnelles, enfin l’émergence des combats pour la différence sexuelle, le débat public sur ces questions a pris une nouvelle vigueur sur notre continent. Il se poursuit depuis au moins le XIXe siècle, comme nous le toucher du doigt ce recueil d’articles, tous parus ces dernières années dans le Monde diplomatique. A cette différence près qu’hier la prise en compte des minorités et des ethnies ne suscitaient que mépris et sourires condescendants. Nous en savons quelque chose.
Margaret Thatcher pouvait affirmer sans grande contestation: «La société, ça n’existe pas. Il y a des individus, hommes et femmes et il y a des familles». Quant au fameux «Le barbare est d’abord l’homme qui croit à la barbarie» de Claude Lévi-Strauss, la formule peine encore à pénétrer les esprits occidentaux. Mais la crise du modèle identitaire monolingue et mono-religieux n’a jamais été aussi forte. Le grand mérite de ce recueil est de présenter un état des lieux centré sur les faits et de les doubler d’un recul historique et géographique. Cela permet de mettre à plat, de dépassionner des questions complexes, si marquées sur le plan idéologique et qui dérapent vite. Sans faire l’impasse sur les ravages du métissage et de l’acculturation ou le passif de la colonisation qui demeure le grand non-dit de nos sociétés. Au fil des pages, le lecteur découvrira avec intérêt les doutes qui ébranlent «le modèle républicain d’intégration» dont la France s’enorgueillit et qui n’a jamais fonctionné.
Les politiques de la diversité sont elles aussi abordées, de Rome à la Chine, en passant par le Liban ou l’Afrique du Sud. L’universalisme et le principe d’égalité ont trop souvent masqué la négation des minorités et de leurs communautés qui sont bâties et fonctionnent différemment. Ces questions épineuses sont abordées au travers d’exemples et d’expériences multiples. Le tout est illustré par un étonnant florilège de photographies réalisées par Charles Fréger qui vient d’exposer ses derniers travaux au Musée Basque de Bayonne : «Suite basque, silhouettes photographiques». Non sans humour, Manière de voir nous donne à voir une série de personnages de carnaval venus de plusieurs continents. Il nous révèle ainsi un kaléidoscope de notre humaine condition où, quoi que nous voulions, le monde ancien irrigue encore le présent, où les liens sociaux, les croyances et les relations communautaires qui en découlent, fondent notre humanité.
+ Manière de voir n° 152, Le Monde diplomatique : L’engrenage identitaire, ethnicité, minorités, diversité, avril-mai 2017, 100 p. 8,50 euros.
“A cette différence près qu’hier la prise en compte des minorités et des ethnies ne suscitaient que mépris et sourires condescendants. Nous en savons quelque chose.”
Et quand on est anarchiste au pays basque c’est aussi quelque chose. Faire comprendre ou même juste respecter que son identité et son drapeau ne sont pas liés à une nation mais à une pensée est très dur (à droite comme à gauche). On peut être heureux de vivre ici et d’y agir mais sentir qu’au fond de son cœur et de sa tête que notre identité est plus politique et sociale que linguistique et/ou territoriale.
Souvent au pays basque l’obligation d’être basque entraîne la négation des autres identités et la possibilité d’identités plurielles et multiples.