Après une laborieuse négociation avec Geroa Bai, la socialiste Maria Chivite est reconduite présidente de la province basque, grâce à l’abstention des neuf députés foraux d’EH Bildu.
Plus de deux mois après les élections du 28 mai, une majorité « progressiste » composée du PSOE (onze députés), Geroa Bai (sept) et Contigo Zurekin (trois) dirigera la Navarre. Seule, l’abstention des neuf députés d’EH Bildu a permis d’écarter le retour au pouvoir d’une coalition dirigée par l’UPN (quinze élus), soutenue par le PP (trois) et Vox (deux élus). L’attitude d’EH Bildu est d’autant plus remarquable que les socialistes ne lui ont pas rendu la politesse : ils se sont abstenus pour faire élire la droite UPN-PP dans la capitale Iruñea, à Lizarra, et dans d’autres cités navarraises. La formation a pris la précaution de consulter sa base : 82,7 % des militants navarrais d’EH Bildu ont approuvé l’abstention de leurs députés foraux et de faire élire Maria Chivite.
Son élection a été retardée pour deux raisons. Les élections législatives anticipées ont eu lieu le 23 juillet et le PSOE ne voulait à aucun prix donner des arguments de « philoterrorisme » à une droite espagnole déchaînée qui lui reproche de devoir le pouvoir aux « héritiers des terroristes basques ». Et pour cela, de leur faire de scandaleuses concessions en faveur des preso. Il était donc préférable de laisser passer les élections générales avant d’élire la présidence navarraise.
Geroa Bai menace de quitter le gouvernement
L’autre raison de ce retard est liée aux négociations entre PSOE et Geroa Bai, proche du PNV. Le score de cette formation aux législatives du 23 juillet est très modeste, 2,9 %, et précédemment, elle a perdu deux députés foraux au profit d’EH Bildu. Les socialistes font tout d’abord à leur principal partenaire une offre très à la baisse, « humiliante » selon Uxue Barkos, leader de Geroa Bai, en diminuant de moitié le nombre des portefeuilles, deux au lieu de quatre précédemment. Alors, Geroa Bai menace de ne pas participer au gouvernement régional. Aussitôt, EH Bildu s’engouffre dans la brèche grande ouverte : pour éviter le retour de la droite et sauver la majorité progressiste, il est prêt non plus seulement à s’abstenir, mais à voter pour un gouvernement PSOE/ Contigo Zurekin, « sans condition préalable, ni ligne rouge ». Ambiance au parlement navarrais, aussi électrique que lorsque les toros Miura déboulent calle Estafeta. Finalement, le PSOE baisse la garde. Dans la répartition des postes, grosso modo, il reconduit la formule en vigueur de 2019 à 2023 : huit portefeuilles de conseillers pour le PSOE, quatre pour Geroa Bai et un pour Contigo Zurekin. Les trois formations détiennent chacune une vice-présidence et se sont mis d’accord pour un programme de 58 pages. Le chapitre consacré à la langue basque indique qu’il faut « éloigner définitivement l’euskara du débat partisan et de la confrontation, en bannissant tout sentiment de discrimination chez les citoyens ». L’important est d’impulser « un large accord socio- politique autour de l’euskara, reflet de l’idiosyncrasie et de la réalité sociolinguistique navarraise (…), permettant à chacun de se sentir libre sur la manière d’entrer en relation et de cohabiter dans les langues parlées dans la communauté forale ». Sans trancher le débat, le texte fait référence aux conflits actuels sur la carte des zones linguistiques appelée à évoluer, aux débats difficiles sur l’offre d’enseignement ou la place de l’euskara dans les critères d’embauche des emplois publics.
Un dernier point dans l’accord conclu entre le PSOE et Geroa Bai permettra à Uxue Barkos d’être élue sénatrice.