Pour les langues régionales l’année 2015 avait plutôt mal terminé, les sénateurs de l’opposition enterrant définitivement tout espoir de voir un jour ratifiée la charte européenne des langues régionales et minoritaires. Porté en se bouchant le nez par la majorité présidentielle, les observateurs ne prédisaient pas un grand avenir à ce texte, cela n’aura donc surpris que les non initiés… Le parti socialiste a parfaitement manoeuvré pour remplir deux objectifs : mettre une croix en face d’une promesse de campagne, et ne pas se fâcher avec l’aile jacobine du parti.
Besoin d’un cadre juridique pertinent et partagé
La charte européenne, texte écrit dans les années 90 est-il encore d’actualité ? Doit-on continuer à perdre de l’énergie à convaincre les 3/5 des parlementaires pour un cadre obsolète ? Nous le disons clairement, nous n’avons pas besoin d’un vote symbolique, nos langues n’ont pas besoin de beaux discours, mais de politiques linguistiques dignes de ce nom ! Nous avons besoin d’un cadre juridique pertinent et partagé, qui mettra chacun à la hauteur de ses compétences, du Ministère de l’Education ou de la Culture à la plus petite commune, sans oublier les Régions, les Départements et les EPCI.
C’est ce que proposait l’élu du groupe écologiste Paul Molac dans la proposition de loi qui a été rejetée à une voix près le jeudi 14 janvier dernier !
Ce texte aurait pu être une avancée majeure pour le travail des élus de terrain qui portent les politiques linguistiques à bout de bras depuis tant d’années. A main levé les articles qui avaient été rejetés par la commission ont été réintroduit dans la soirée. Pendant quelques minutes, les langues régionales bénéficiaient d’une meilleure exposition dans les médias, d’un financement pour la production audiovisuelle, d’une signalétique tant sur les routes que dans les lieux publics, d’un saut qualitatif conséquent dans l’enseignement public et d’une reconnaissance des écoles associatives immersives laïques que je représente en tant que président d’Eskolim.
28 votants, 27 exprimés, 13 favorables, 14 contre. Les députés socialistes ont rejeté le texte par une simple manoeuvre : Ils demandent un vote public (vote électronique) in extremis et en faisant valoir quatre pouvoir ils obtiennent la majorité nécessaire au rejet du texte.
Rejet a priori de toute avancée législative concernant les langues régionales
Le candidat Hollande avait promis la ratification de la charte, le président a créé le contexte de son rejet définitif par les sénateurs. Cette nuit du 14 janvier les députés ont rejeté un texte qui aurait permis de mener localement les politiques dont nos langues ont tant besoin.
Nous connaissons maintenant le vrai visage des députés socialistes par rapport aux langues régionales, et la nouvelle preuve d’hostilité donnée cette nuit ne fait que confirmer les sentiments que nous avons eu en entendant les propos injurieux et irrespectueux pour les locuteurs de langues régionales et leurs cultures après le discours en langue corse du nouveau président de l’Assemblée territoriale, président pourtant élu comme tous les élus de la République au suffrage universel !
Eskolim prend donc acte du rejet a priori de toute avancée législative concernant les langues régionales par la majorité présidentielle. Le cadre législatif minimum à la mise en place des outils nécessaires à la survie de nos langues est rejeté de manière dogmatique… Le jacobinisme parisien continue de dédaigner toute les expressions culturelles patrimoniales au nom d’une Egalité qu’il méprise ce faisant…
Eskolim tient à remercier le député Molac qui a porté cette proposition de loi et les députés qui ont porté ce combat tard dans la soirée et ne doute pas de la volonté collective de continuer le combat en faveur des langues régionales.
Un rendez-vous manqué…
Nous notons également l’absence des députés du 64 lors de ce vote…
Avec le vote positif de 2 des 3 députés du département, les 34 ikastola et les 10 calandretas auraient eu le cadre nécessaire à leur développement, l’OPLB et l’OPLO se seraient vu confortés dans leurs actions, les gares et les postes du Pays Basque auraient pu renouveler leur signalétique en bilingue, France 3 Pays Basque aurait eu plus de moyen pour produire des émissions en basque, etc…
Pour la langue basque, après le rendez-vous manqué du contrat par les élus territoriaux, un nouveau petto des députés… Il faudrait que les actes soient à la hauteurs des engagements pris… Le temps n’est plus aux discours mais aux actes concrets.
Paxkal INDO
Président d’Eskolim (Seaska, Calandreta, Diwan, ABCM, Bressola)