Que l’on veuille bien m’excuser, mais les fêtes de Bayonne n’ont que quatre-vingts ans alors que les fêtes patronales au Pays-Basque existent depuis des siècles et des siècles. Fêtes patronales, c’est à dire dédiées au saint patron de la paroisse avant même que la paroisse ne devienne commune avec la Révolution française. Les vieilles coutumes qui ont perduré jusqu’au XXème siècle voulaient, comme à Sare par exemple, que le dimanche soit “Eliza besta”, le jour de fête réservé au saint patron, la fête laïque, la fête populaire, commençant le lundi.
Fête patronale débutant le 7 juillet, jour de la “San Fermin” et se terminant le 14 avec le traditionnel “Pobre de mi!”, celle de Pampelune, capitale de la Navarre, est d’abord celle de tous les Navarrais avant même d’être célébrée par Hemingway. La San Fermin a servi de modèle aux nouvelles fêtes de Bayonne inaugurées en 1932, époque de l’entre deux guerres qui fut celle de la joie de vivre dans le souvenir de l’horrible tuerie de 1914-1918 et de la victoire, malgré les difficultés inhérentes à la crise de 1929. Joie de vivre, désir de vivre, de jouir pleinement de la vie.
1932: année idéale pour inaugurer des fêtes, année qui précède l’arrivée d’Hitler au pouvoir ainsi que l’affaire Stavisky qui secoue Bayonne et la Côte Basque, trois ans avant le soulèvement franquiste et la guerre civile espagnole, décennie qui se termine par le début de la deuxième guerre mondiale, l’effondrement de la France, le régime de Vichy et l’occupation.
1932: à l’instar des fêtes de Pampelune, Bayonne se met en fête avec l’assentiment de la municipalité radicale-socialiste de l’époque. En fait de saint patron rien de mieux que la fête nationale, le 14 juillet qui est le symbole même de l’unité de la nation si chère à cette IIIème République qui l’a instaurée il y a plus de cinquante ans. Quelques jours de liesse où “la verve gasconne, partout s’épanouit”. C’était le temps de l’”entre nous”, de la joie de faire la fête ensemble.
Après le grand “black out” de l’occupation, les fêtes reprennent, toujours en juillet, et, d’année en année, elles prennent de l’ampleur. Les juilletistes inaugurent la saison d’été d’un tourisme florissant qui déverse sur la côte basque le flot des aoûtiens. C’est le moment où le comité des fêtes abandonne la mi-juillet au profit du début d’août. Dès lors; commence la politique du chiffre. On entend, y compris à la radio française ainsi qu’à la télévision que Bayonne accueillera un million de “festayres”. Un million! chiffre magique, chiffre rond, tout rond avec ses six zéros. Dax et Mont-de-Marsan s’y mettent à leur tour. Des fêtes on passe à la “feria”, à la foire donc, avec tous ses excès. D’autant que cela coûte de plus en plus cher et qu’il convient de raison garder.
Cettte année, délaissant août on revient à la fin juillet, ce qui peut diminuer l’affluence ainsi que les débordements. De plus, depuis quelque temps, la fête basque s’installe au pied du Château-Vieux avec le “karrikaldi” où s’affirme la culture basque, ses danses, ses chants, ses “bertsulari” et ses farandoles, tout cela empreint de la joie du “vivre ensemble”.
C’est la vraie fête, celle des Basques de Bayonne, des communes avoisinantes et de tous leurs amis, celle qui donne à Bayonne son image de capitale du Pays-Basque, tout comme Pampelune est celle de la Navarre.