“Ce qui est en jeu, c’est l’avenir de l’humanité”
La démission de Nicolas Hulot pose un problème de fond qui ne peut plus attendre : celui de la nécessaire transition écologique, très difficile à réaliser dans une économie libérale dont la loi fondamentale est le “toujours plus”, avec l’exploitation des ressources jusqu’à l’épuisement, le gaspillage des produits pour assurer leur renouvellement, et l’accumulation de leurs déchets.
L’opposition de SA Majesté présidentielle n’a vu dans cet événement que l’occasion de régler des comptes personnels “avec Macron” comme disent ses leaders, sans aucun égard pour cette fonction suprême qu’ils convoitent pourtant de toutes leurs forces.
Refusant le verdict électoral de 2017, ils rejouent constamment le second tour. Leurs commentaires ne sont pas à la hauteur de la situation, laissons-les donc à leurs mesquines querelles politiciennes, typiquement franco-françaises, et tournons-nous vers l’essentiel, car ce qui est en jeu, c’est l’avenir de l’humanité.
Est-ce que le gouvernement français prend pour de bon le chemin de la transition écologique ? Ma réponse est non. Elle n’a rien d’original, car tout esprit lucide peut constater la lenteur, les atermoiements, les contradictions du pouvoir central dans sa politique de l’environnement, et les résultats sont là, décevants.
Certes la France a fait de petits pas, et c’est elle qui en fait le plus, mais comme le dit l’adage populaire, au royaume des aveugles les borgnes sont rois, il n’y a pas de quoi se vanter, et surtout c’est terriblement insuffisant face à l’extrême urgence de la situation.
“Notre maison brûle et nous regardons ailleurs” disait le président Chirac voici déjà une douzaine d’années. On a fini par voir le feu, mais qu’a-t-on fait pour l’arrêter ? On a pris des seaux et des pelles, ou quelque chose de ce genre. Tandis que cette résistance progressait au pas de la tortue, le dérèglement climatique s’est emballé. Au total, l’émission de carbone continue d’augmenter, ainsi que l’utilisation des pesticides, le recul de la biodiversité, l’épuisement de l’eau propre et du sable, les incendies de forêts, le bétonnage et le goudronnage des meilleurs sols agricoles, etc…
Le bilan global ne cesse de se dégrader malgré quelques efforts et avancées à la marge du système.
Par exemple, à quand le virage vers une agriculture plus autonome, plus économe, plus respectueuse de l’environnement, des agriculteurs et des consommateurs ?
Le précédent ministre de l’agriculture, Le Foll, avait pris des initiatives dans ce sens. Mais l’actuel et bien nommé Travert a constamment coupé la route aux propositions de Hulot, suivant les positions conservatrices de la corporation paysanne hélas majoritaire, attachée à l’agriculture industrielle héritée des trente glorieuses, avec l’utilisation intensive des pesticides comme le glyphosate ou Roundup.
Sa myopie a largement bénéficié des arbitrages favorables du premier ministre et du président, et voilà le résultat : le gouvernement se trouve amputé de son aile progressiste et populaire.
Monsieur Hulot, je vous tire mon béret. Vous avez bien fait de quitter le vaisseau royal piraté par les lobbys de la grande marée atomique, carbonique, chimique et bancaire.
Bon vent à vous sur ce voilier fragile mais insubmersible, celui du juste combat : continuez votre marche à l’étoile, rappelez-nous toujours le bon cap !
Le fond de l’affaire, au delà des disputes égotiques du village gaulois, c’est que le système économique actuel n’est plus soutenable dans sa fuite en avant. Si on le laisse faire, il entraînera l’humanité dans sa faillite. Il nous faut changer de direction sans attendre un mythique grand soir, ni monter à l’assaut de leur ligne Maginot : la contourner par des initiatives à notre portée, ouvrir des alternatives à l’échelle humaine.
Dans notre jeunesse nous appelions çà “l’autogestion”. Mais le mot importe moins que la démarche, autant que possible collective et solidaire.
A la longue le grignotage suffira-t-il ? Finira-t-il par ronger le système de l’intérieur ? Ou bien tôt ou tard faudra-t-il pousser très fort ? La Révolution ne se décrète pas, ne se prévoit pas non plus. C’est le peuple qui la fait sans même le savoir, à la façon prosaïque de monsieur Jourdain, quand il cesse de croire au système régnant. Pour le moment on en est loin, apparemment…