Hier ils harcelaient les ikastola et Herrikoa ou plus récemment Laborantza Ganbara, aujourd’hui ils déposent un recours contre la convention signée par la municipalité de Bayonne pour utiliser l’eusko. Décidément les gouvernements français quels qu’ils soient et leurs représentants à la préfecture de Pau ne parviennent pas à se départir des oripeaux jacobins qui leur collent à la peau. Éclairage sur l’importance de l’eusko dans une perspective de développement durable d’Iparralde.
L’enjeu est de taille. Demain, les collectivités locales pourraient s’assurer qu’une partie de leurs dépenses et de leurs subventions soient obligatoirement réutilisées sur leur territoire. Elles pourraient garantir que cet argent revienne vers l’artisanat, l’agriculture, les services, l’industrie et le commerce locaux, et ne puisse pas aller vers la grande distribution, alimenter le e-commerce international, ou irriguer la spéculation financière.
L’économie réelle de proximité en bénéficierait au détriment des logiques de délocalisation : celles-là mêmes qui démultiplient les transports émetteurs de gaz à effet de serre, et mettent en compétition les territoires, entraînant tout le monde vers le moins-disant social et écologique.
La délibération que la mairie de Bayonne a votée en juillet 2017 pour pouvoir effectuer le versement d’indemnités aux élus, de subventions aux associations ainsi que le règlement de factures avec la monnaie locale Eusko suscite un fort intérêt auprès de nombreuses mairies et agglomérations de tout l’Hexagone.
Elle leur offrirait un nouvel outil renforçant leur capacité d’agir localement. Elle ouvrirait une voie riche de possibilités pour des politiques de relocalisation et de dynamisation de l’emploi de proximité.
L’eusko, tourné vers l’avenir
C’est bien cette voie-là que le préfet des Pyrénées-Atlantiques entend fermer en attaquant au tribunal administratif cette délibération municipale. Déboutés de leur contestation car ils ne se sont pas attaqué au bon texte (sic), les services de l’État ne désarment pas et dénoncent désormais la convention signée entre la Ville de Bayonne et l’eusko. Qualifié par le quotidien d’information économique et financière Les Echos “d’exemple de réussite dans l’univers hexagonal des monnaies locales”, en pleine progression (40% de hausse de la masse monétaire Eusko en circulation en à peine un an), à ce rythme, l’eusko sera très prochainement la première monnaie locale d’Europe. Ayant lancé une carte de paiement digitale, servant de référence à des villes comme Nantes, Lille, Angoulême ou Grenoble et à divers travaux universitaires ou encore à des agences comme l’ADEME, l’eusko s’inscrit dans une vision porteuse d’avenir : relocalisation, écologie, transition énergétique, soutien à l’euskara, à l’agriculture paysanne, au commerce et à l’emploi de proximité, renforcement du tissu associatif et de la démocratie locale.
Le préfet à la rescousse du vieux monde
Le préfet s’en remet quand à lui à des logiques du passé, au niveau juridique comme au niveau politique. Il attaque la convention entre la mairie de Bayonne et l’eusko au nom d’un arrêté du 24 décembre 2012 énumérant les moyens de règlement à disposition des collectivités locales, dans une liste ne citant pas les monnaies locales. Mais la législation à ce sujet a évolué depuis 2012, grâce à la loi sur l’économie sociale et solidaire (ESS) du 31 juillet 2014, dite loi Hamon. Celle-ci reconnaît les monnaies locales complémentaires comme moyens de paiement en les inscrivant dans le Code monétaire et financier. La mairie de Bayonne et l’association Euskal Moneta s’appuient sur la jurisprudence du Conseil d’Etat stipulant que lorsque deux textes juridiques se contredisent, le plus récent et/ou celui qui est de niveau plus élevé dans l’ordonnancement juridique l’emporte. Mais c’est surtout au niveau politique que le préfet s’arc-boute sur le vieux monde. A l’heure du dérèglement climatique, des ravages sociaux et écologiques causés par la mise en concurrence des territoires, des pays, voire des continents, combattre un instrument de relocalisation pouvant s’avérer être un puissant outil au service de la transition énergétique et d’un développement local et plus équilibré est révélateur des logiques périmées de ceux qui nous administrent. Le maire de Bayonne et président de l’Agglomération Pays Basque M. Jean-René Etchegaray, parle même de “crispation jacobine” et croit que cette attaque trahit une “volonté de recentralisation”.
Qualifié par Les Echos
“d’exemple de réussite
dans l’univers hexagonal
des monnaies locales”,
en pleine progression
(40% de hausse
de la masse monétaire Eusko
en circulation en à peine un an),
l’eusko sera, à ce rythme,
très prochainement
la première monnaie locale d’Europe.
Faire front avec l’eusko
Le Pays Basque ne peut accepter une telle agression contre un des nombreux outils dont il s’est doté pour construire un avenir plus soutenable et mieux maîtrisé. Au cours de son histoire, d’autres symboles de cette volonté de se prendre en main ont ainsi été attaqués par l’Etat : coopératives, ikastolak, Herrikoa, Euskal Herriko Laborantza Ganbara etc.
A chaque fois, la société basque a fait front, a refusé les diktats venus d’en haut, rejeté la résignation, multiplié les formes de solidarité, s’est mobilisée de manière déterminée et a finalement eu gain de cause.
C’est aujourd’hui autour de l’eusko que nous devons démontrer notre volonté inébranlable de construire ce Pays Basque que nous appelons de nos voeux, plus libre, plus souverain, plus euskaldun, plus solidaire et plus durable.
L’Eusko Eguna, qui se tiendra le dimanche 4 mars à Bayonne (à Glain), nous en donnera l’occasion.
Participons-y nombreux-ses pour afficher notre pleine solidarité avec l’eusko et la mairie de Bayonne, et notre détermination sereine à prendre notre avenir en main.
Euskoa denen esku !