Jean-Luc Berho, organisateur des débats d’Inxauseta
En France, le logement représente 23 % du PIB soit environ 500 milliards d’euros. Le logement interagit sur la qualité de vie à plus d’un titre.
Pouvoir d’achat
Le taux d’effort qu’un ménage consacre au logement représente environ 22 % de ses revenus. Comme toutes les moyennes, ce chiffre cache d’importantes disparités. Ce sont des dépenses contraintes, ce qui signifie que pour les personnes ayant des revenus modestes : salariés pauvres, étudiants, petites retraites…, le taux d’effort avoisine, voire dépasse 50 % des ressources. En effet, le logement induit des dépenses annexes (énergie, entretien, taxes..) de plus en plus couteuses. D’ailleurs, l’injustice de la taxe d’habitation vient d’être pointée par un candidat à l’élection présidentielle.
Qualité de l’habitat
L’environnement immédiat du logement (commerces, école, services) est un critère de choix qui prend de plus en plus d’importance. C’est d’autant plus vrai qu’il faut savoir qu’à la sortie de la guerre, si une personne passait 34 % de son temps de vie au travail, aujourd’hui, elle y passe en moyenne 10 %. Le temps de vie passé dans le logement ou son environnement immédiat est évalué par la même étude à 65 %. D’où l’importance de la qualité de l’habitat. 50 milliards d’euro ont été investis sur le programme de rénovation urbaine. 4 à 5 fois ce montant serait nécessaire pour véritablement requalifier les 1 500 quartiers en politique de la ville. Et encore, il n’est pas fait état de la nécessité de requalifier les centres villes et les centres bourgs dégradés ou en déshérence.
En matière de foncier, il est en moyenne bétonné tous les dix ans la superficie d’un département (5 000 km²). Le pays basque est à bien des égards, concerné par cette utilisation de l’espace.
Emploi et logement
L’inadéquation entre les besoins et l’offre, a tendance à se creuser sur certains segments. C’est notamment vrai sur l’accès au crédit, c’est également vrai dans l’accès au logement locatif. Impossible d’accéder au crédit avec un statut de salarié non consolidé (CDD, intérim…) ou un statut d’auto entrepreneur, ubérisé ou pas. De même pour accéder à un logement locatif, fut-il social. On est là dans un paradoxe extraordinaire où il est demandé davantage de flexibilité dans le travail, voire d’agilité (terme aujourd’hui utilisé) et dans le même temps, il est demandé stabilité et garantie pour accéder au crédit ou au logement. Bizarrement, la résorption de ce paradoxe n’est pas à l’ordre du jour de la campagne présidentielle…
Gouvernance du logement
Principalement exercée par l’Etat et ses agences jusqu’à aujourd’hui, les loi ALUR et Egalité et Citoyenneté vont dans le sens d’une mise en responsabilité plus importante des EPCI. Ces nouvelles responsabilités nécessiteront, pour les élus, de mettre en place des outils de connaissance de la demande, notamment des plus fragiles. Seule une connaissance fine de la demande permettra de mieux répondre aux besoins. Il s’agira de prendre en compte le transport, la qualité du cadre de vie, de favoriser la cohésion sociale, de rechercher des solutions économes en foncier . Pour ce faire, il faudra savoir résister aux lobbys des opérateurs dont la logique économique n’est pas souvent compatible avec l’intérêt général.
Cohérence et incohérence du législateur
Comment ne pas pointer du doigt, le manque de cohérence du législateur sur certains aspects. La loi de 2000 sur l’instauration d’un pourcentage minimum de logements sociaux renforcée par la loi ALUR se complètent parfaitement avec la loi de 2003 sur la rénovation urbaine, avec un objectif clair de lutter contre la gentrification de certains espaces. Mais la loi de 2007 sur le droit au logement opposable ne s’appliquant que sur le logement social voit l’effort de l’accueil des personnes fragiles être principalement porté par les communes fortement dotées en logement social, avec comme conséquence de les paupériser davantage.
Idéologie et logement
Dans certains cas, l’idéologie ou la doctrine dominent. Rappelons-nous : en 2007, le projet politique du nouveau président de la République en matière de logement tenait en une phrase « une France de propriétaires ». Il était dit qu’avec 58 % de propriétaires, la France était en retard sur les autres pays européens, la moyenne étant de 70 %. Etait citée en exemple l’Espagne avec 86 % de propriétaires. On oubliait que propriétaire n’était pas forcément synonyme de qualité de l’habitat et qu’une mixité de statut pouvait signifier une capacité pour la société à être plus mobile. On a vu malheureusement pour nos voisins espagnols, ce que miser sur « le tout propriétaire » pouvait générer. Quant aux Etats Unis d’Amérique, emprunter pour acheter un logement et gager cet emprunt sur la valeur du logement et non pas sur les revenus du ménage, a créé un désastre social et économique dont les répercussions dix ans après se font toujours sentir.
Pour la suite, rendez-vous le 24 mars à Espelette (voir l’affiche ci-dessous et le lien ci-après : www.enbata.info/articles/logement-en-pays-basque-aller-plus-loin) :