Exercice entièrement nouveau, les élections départementales des 22 et 29 mars bouleversent les habitudes. Sont-elles la continuité des cantonales pourvoyant les Conseils généraux? Apparemment oui, mais il ne s’agit plus des mêmes cantons, le scrutin uninominal est devenu bi-nominal et paritaire, l’assemblée départementale est désormais renouvelée pour six ans en son entier et non par moitié tous les trois ans. Ses compétences seront restreintes mais toujours pas définies par la loi en cours d’élaboration qui changera jusqu’à son nom.
A croire le premier ministre Valls dans son discours d’investiture d’avril, l’assemblée départementale devait disparaître, puis seulement maintenue en zone rurale, pour enfin être encore en sursis ce mois de mars.
Cependant cette réforme territoriale convient assez bien aux abertzale. Ils échappent à une loi électorale faisant du département une circonscription unique avec élection par liste pour garantir la parité, type régionales.
Le redécoupage des cantons s’est opéré dans le respect des limites historiques de nos trois provinces. Chacun des douze cantons basques créés devient ainsi une petite circonscription suffisamment peuplée, donc représentative, tout en garantissant les liens de proximité entre les citoyens et les communes.
De 21, nos élus passeront à 24, réduisant quelque peu le différentiel avec les Béarnais. L’obligation du binôme paritaire s’est avérée une redoutable arme anti-notables.
Dans plusieurs nouveaux cantons, n’ayant pas de place pour deux sortants hommes, certains ont renoncé, d’autres attendent le prochain tour de rattrapage des régionales de décembre.
Ceci apporte un peu de fraîcheur à l’offre électorale enrichie de la diversité militante abertzale révélée il y a un an aux municipales. La gauche abertzale repart à nouveau sous les couleurs d’un Euskal Herria Bai plus intégré. Les partis associés ayant heureusement dépassé le débat stérile sur la nécessité d’un front unique sur l’ensemble d’Euskal Herria, s’engagent aujourd’hui dans le combat spécifique à Iparralde. La totalité des énergies est donc mobilisée sur le même objectif.
Reste que l’obstacle sera difficile à franchir car, au-delà de l’audience à élargir, nos candidats devront, pour être présents au second tour, dépasser le seuil des 12,5% du nombre des inscrits, ce qui nécessite, avec une abstention prévisible de 50%, un score de plus de 25% des exprimés. La multiplicité des candidatures rendra l’exercice impraticable, même pour les “grands” partis hexagonaux. Ainsi la chasse au report des voix dominera à coup sûr l’entre deux tours.
Les abertzale, loin d’être mis à l’index, seront courtisés de toutes parts. Devra-t-on, au nom de notre “ailleurs” demeurer dans notre ni-ni tant de fois pratiqué, ou au contraire, dans un scrutin local où tout le monde se connaît, loin des choix de société et de gouvernement, permettre la victoire assumée d’un éventuel partenaire au Conseil des élus ou Conseil départemental s’associant à l’affirmation d’une institution spécifique ou à une avancée de l’euskara?
Doit-on se préparer à une telle sollicitation au niveau du canton ou, pour plus de force et une stratégie plus fine, centraliser l’ensemble de ces dialogues-négociations de second tour?
Bref, s’engager avec tous nos atouts dans cette élection certes légale mais en recherche de légitimité.