Chut ! Ne le dites à personne, il nous arrive de regarder TF1 en famille. Enfin uniquement “The Voice”. Bon c’est TF1, certes avec ses pubs -moins nombreuses en replay- mais c’est con à dire : on se laisse prendre au jeu. Comme on adore le chant, que l’émission est bien construite et que les quatre “coachs” ne sont pas des beaufs en puissance (1), on n’a pas raté une émission depuis 12 semaines ! Surtout que cela reste entre nous ! Qué vergüenza !(2) Parce que la honte -pour la France en tous cas- c’est aussi en terme de “voix”, le score du FN du premier tour, déjà élevé avec 7.678.491 soutiens (21,30%), progresse encore démesurément et dangereusement en atteignant, au second tour, les 10 millions 644 mille et 118 voix (33,90% des suffrages exprimés).
Voix sans issue
Au second tour, avec 25,44 % d’abstentions (12.101.416 boudeurs), c’est la première fois depuis 1969 que ce taux est supérieur au premier tour. Si vous rajoutez les 4.068.084 personnes (11,47 %) qui ont glissé un bulletin blanc ou nul dans l’urne sur les 35.467.172 votants, vous obtenez 16 millions de contestataires et de je-m’en-foutiste mélangé(e)s. Sont-ce les prémices d’une contestation profonde d’un système électoral et présidentiel inique ? Si rien ne change aussi au niveau de ses institutions, de ses privilèges et de sa démocratie obsolète, la France risque de vivre d’ici à 2022, ou à partir de 2022 -date des prochaines présidentielles- de graves troubles. Quand bien même le score du FN en Pays basque Nord ne dépasse pas les 12 % au premier tour (3), nous serons impactés par ces dissensions majeures et bien obligé(e)s d’y faire face. D’ici ou en tant que réfugié(e)s en Pays basque Sud !
Pétain outragé, Pétain brisé, Pétain martyrisé…
Cela met cruellement en questionnement la ritournelle habituelle des anti fascistes en vigueur ces 30 dernières années face au FN. En synthèse : c’est un parti raciste et xénophobe, puisqu’on vous le dit ! Ces mots-là n’ont plus de prise tellement la réflexion basique, le sentiment d’abandon, l’inculture ou le nationalisme français bêta ont pris le pas sur toute autre considération intellectuelle. Il y a les fachos, les vrais qui ont toujours existé depuis l’émergence de la France en tant qu’État. Et puis il y a pour le reste un attelage hétéroclite de positionnements plus ou moins construits, plus ou moins irrationnels qui ne voit d’autres issues à leur malaise que de s’accoquiner avec cette extrême droite qui a su si bien surfer ces dernières années sur les crises économiques, sociales, culturelles ou identitaires.
… mais Pétain ressuscité !
Ces dernières années plus encore, Marine Le Pen, née avec une cuillère d’argent à la bouche, a fait croire, par des postures racoleuses et démagogiques, qu’elle était la digne représentante du “peuple” et “anti système” auprès d’un certain nombre d’ouvriers et employés, d’exploités et opprimés, des plus faibles aux plus fragiles. Cela implique que les partis de gauche traditionnels -le PS embourgeoisé et le PCF franchouillard- se sont lentement mais inexorablement détournés des classes populaires en laissant le champ libre aux populistes néo fascistes. Le pire de tout, ici tout du moins, c’est que -et c’est finalement encore bon signe- nous sommes en tant qu’humanistes bien peu enclins à repérer autour de nous celles et ceux qui, en toute discrétion, ont franchi le pas de l’innommable.
Passé (dé)composé !
Une chose est sûre, Macron a réalisé un joli coup personnel en atomisant le PS et la droite classique à la présidentielle. La question à terme sera de savoir si à cette démarche narcissique se confortera une majorité à la chambre des député(e)s. Pour l’heure, tout porte à croire que cinq pôles se disputeront un certain leadership aux législatives du 11 et 18 juin dans cette nouvelle recomposition politique : Les Républicains, le PS, la France insoumise, En Marche et le FN. Cette réalité sera ici, en Pays basque Nord, toute aussi vivace. Avec, en sus, les trois candidatures de l’UDI dans nos provinces basques ! Du coup, que reste-il aux “petites” formations politiques ?
Stratégies et non-dits
C’est que cette stratégie quasi immuable pour elles paraît, de prime abord, assez incompréhensible. Elles n’ont aucune chance de figurer au second tour dans ces élections sans pitié pour les plus faibles et certaines loin d’atteindre les 5 % des suffrages exprimés, sésame du remboursement de 47 % du plafond fixé à 38.000 euros soit près de 18.000 euros. C’est sans compter la manne financière que représente 1,40 euro par voix aux partis ayant présenté sous sa bannière plus de 50 candidatures à la condition d’obtenir 1 % des suffrages. On comprend mieux pourquoi on retrouve par exemple ici des candidatures comme l’UPR (Asselineau), L.O. ou Résistons ! (Lassalle). Ce qui expliquerait aussi la concurrence très proche entre France insoumise et PCF : les premiers voulaient imposer aux cocos de dépendre de leur association de financement !
Cacophonie de voix aphones !
Enfin, quels sont les objectifs politiques pour PNV, EELV ou EH Bai (voire certaines candidatures mélanchoniennes pas trop jacobines) de présenter des candidats séparément si ce n’est pour faire acte de témoignage ? Or la position pour le second tour est elle aussi connue d’avance : c’est souvent le “ni-ni”. En réalité, les reports de voix de ces formations s’effectuent majoritairement à gauche au grand bénéfice du PS ! Et sans aucune contrepartie ! Alors que le bon sens devrait inciter ces partis à négocier, bien avant le premier tour, quelques points auprès de candidats putatifs du deuxième tour sans se renier. Si l’on se réfère aux résultats des législatives de 2007 et 2012, on constate que ces groupes pourraient enclencher une dynamique nouvelle en s’alliant et pourraient atteindre et dépasser les 10 % dans les 4ème et 5ème circonscriptions et plus de 15 % dans la 6ème. Et là, il y aurait matière à peser pour faire avancer quelques idées et les faire mettre en application ! Et si on organisait les assises, en Iparralde, des formations aux programmes alternatifs (Altermondialiste, écolo, abertzale, …) sur la thématique des diverses échéances électorales ?
(1) Zazie, Mat Pokora, Mika et Florent Pagny
(2) En juillet 2004, Patrick Le Lay, PDG de TF1, affirmait : “Il y a beaucoup de façon de parler de la télévision. (…) à la base, le métier de TF1, c’est d’aider Coca Cola, par exemple, à vendre son produit (…). Nos émissions ont pour vocation de rendre disponible le cerveau : c’est à dire de le divertir, de le détendre pour le préparer entre deux messages. Ce que nous vendons à Coca-Cola, c’est du temps de cerveau humain (sic!) disponible (…).”
(3) Quoique si l’on prend le comparatif des scores du FN sur nos trois provinces basques lors du second tour des présidentielles de 2007 (6%) et 10 ans après (23,48%) -soit 10 % quand même en dessous de la moyenne hexagonale- il n’y a pas de quoi fanfaronner !