Parce qu’ils voulaient rompre l’odieux immobilisme pudiquement baptisé « processus de paix », que cinq de nos amis, dont plusieurs rédacteurs réguliers d’Enbata, ont été interpellés par la police française à Louhossoa, dans la nuit de vendredi à Samedi dernier, 16 décembre.
Selon une correspondance entre eux et ETA, rendue publique après cette arrestation, l’organisation armée « déléguait à la société civile la responsabilité politique du désarmement ». Elle répondait ainsi à l’offre de trois signataires de cette société civile, Michel Tubiana, président d’honneur de la ligue des Droits de l’Homme et de deux militants abertzale, Michel Berhocoirigoin et « Txetx » Etcheverry, « voulant poser cet acte fort, créer le déclic permettant à tous les protagonistes potentiels d’un processus de paix juste et durable au Pays Basque et s’y impliquer pleinement, de le rendre possible, rapidement et totalement. »
Hélas, la réponse de la France fut d’encercler Errekartea, la nuit tombée, par un impressionnant dispositif du Raid et de proclamer avoir porté un « coup dur à ETA ». Par contraste, le Pays Basque a opposé au cynisme de l’Etat sa solidarité envers ces « faiseurs de paix » et s’est spontanément mobilisé. 4.000 manifestants à Bayonne, dont nos trois parlementaires socialistes, le maire de la ville, et de multiples élus qui tiendront conférence de presse.
Solidarité évidente tant les protagonistes sont la chair même de notre mouvance basque, en sont les têtes de proue dans maints domaines, des constructeurs, des justes diront certains.
Tellement engagés et muris au service de notre société qu’on mesure aisément l’ampleur de leur lucidité sur les risques inhérent à cette initiative de paix. N’ignorant rien de la sophistication des écoutes jusqu’au téléphone d’Angela Merkel, cette remise partielle des armes d’ETA souligne leur courage et confirme leur générosité. Le gouvernement français ne peut désormais s’en tenir au suivisme irresponsable de l’Espagne car c’est la meilleure conscience basque d’Iparralde qui l’aide et le contraint à s’impliquer dans une fin honorable et réconciliatrice du drame basque. Nos « faiseurs de paix » de Louhossoa, cinq ans d’immobilité après Aiete, s’emparent de l’exigence qu’ETA n’a pas assumée, comme sut le faire l’IRA, par un cessez-le-feu unilatéral, sans négociation sur le sort des preso et la remise de son arsenal. Le geste d’aujourd’hui peut être le déclic de la liquidation de ce lourd passif, la mise en mouvement des institutions laïques, le pardon réciproque.