L’on reproche au président de la République Française de ne pas tenir ses promesses : mais il en a fait très peu de concrètes au cours de sa campagne électorale de 2012. De plus pouvait-il gouverner pour sa seule base électorale, qui a d’ailleurs fondu comme neige au soleil, ou bien devait-il prendre en compte l’ensemble des citoyens ? Vaste débat …
En tout cas il mérite clairement le reproche d’avoir ignoré la gravité de la crise économique : on le lui faisait d’ailleurs observer dans cette même tribune lors des présidentielles de 2012.
Ses appels constants à la croissance et à l’embauche n’auront probablement pas beaucoup d’effet, car cette crise n’est pas accidentelle, conjoncturelle, passagère, mais profonde et durable, autrement dit structurelle, liée à la nature même du système productiviste.
Quand on atteint un certain niveau de richesse, la poursuite de la progression n’a plus d’effet sur le sentiment de bien-être ressenti par la population, et les progrès deviennent très difficiles.
C’est ainsi que la courbe de la croissance française ne cesse de se modérer depuis 1960 : selon l’INSEE elle était de 5,7 % par an dans la période 1960-1969, 3 % sur 1970-1979, 2,4 % sur la décennie suivante, etc.
Pour faire simple et facile à saisir en attendant mieux, prenons comme exemple un fait aussi banal que basique : quand on a mangé à satiété l’on ne cherche pas à se goinfrer pour le plaisir de faire grimper les bénéfices de l’agro-alimentaire et des grandes surfaces, ainsi que le niveau du PIB, dont le système de calcul est d’ailleurs à revoir, quand on voit que les marées noires et les inondations, entre autres malheurs, le font progresser …
Mais le fait le plus décisif est que la croissance générale est devenue “géologiquement impossible” : on ne peut pas avoir un développement matériel illimité sur une planète aux ressources limitées.
On ne peut pas avoir
un développement matériel illimité
sur une planète
aux ressources limitées
En étendant au monde entier le niveau de vie européen, il faudrait trois planètes à l’ensemble de l’humanité, et quatre ou cinq avec le modèle américain qui est encore plus gourmand et gaspilleur. Les sources d’énergie classique et de matières premières baissent déjà très fortement, par exemple l’uranium nécessaire aux centrales nucléaires, les métaux dits rares ou stratégiques qui alimentent l’électronique et l’informatique, et même le pétrole dont le pic d’exploitation mondial serait déjà dépassé.
Certes la révolution informatique apporte un profond changement dans la communication et la vie économique, mais elle ne réglera pas le problème du chômage ; bien au contraire elle l’augmentera, car l’automation qui s’ensuit est globalement dévoreuse d’emplois : le robot remplace les ouvriers et employés. Donc il faudra bien en venir soit au partage du travail, soit à la répartition autoritaire des revenus. Or nos gouroux ultra-libéraux ne veulent surtout pas d’assistanat, et à priori ça paraît sensé.
Mais en contrepartie sont-ils capables de créer des emplois pour tous ? Evidemment non ! En conséquence ils devraient professer et prophétiser avec moins d’arrogance et penser urgemment à changer de logiciel.
Le modèle actuel est déjà périmé, il continue de fonctionner malgré tout en vertu de la vitesse acquise, mais il va dans le mur. Le monde économique d’en haut avance le nez dans le guidon. Les dirigeants politiques font de même, bloqués dans le court terme, obsédés par les prochaines élections qu’il doivent absolument gagner pour éviter leur propre chômage, du moins s’ils viennent du privé.
Heureusement une autre économie, presque souterraine, commence à germer un peu partout, certes très modestement, mais de façon encourageante. Elle porte l’espoir de solutions alternatives. On le sait déjà, la chute des dinosaures n’est pas la fin du monde…