IL existe bien d’autres modèles que le modèle allemand tant prisé en France, du moins par une certaine frange de la diversité politique. En matière linguistique les re-gards devraient se tourner, non point vers l’Est, mais plutôt vers le Sud, au-delà des Pyrénées où, aussi bien à l’Ouest qu’à l’Est, le catalan comme le basque chevauchent allègrement la frontière.
1) Tout commence trois mois après le décès de Franco quand le gouvernement espagnol, par décret royal du 26 février 1976, reconnaît l’Académie de la langue basque / Euskaltzaindia comme académie royale. La même académie n’a pas les mêmes honneurs en France.
2) Vient ensuite l’article 3 de la Constitution espagnole de 1978 qui déclare dans son deuxième alinea que les autres langues d’Espagne seront aussi officielles dans les Communautés autonomes en accord avec leurs statuts.
3) La loi organique du 18 décembre 1979 concernant le statut d’autonomie du Pays-Basque déclare dans son article 6, premier alinéa: l’euskara, langue propre du Peuple basque aura comme le castillan le caractère de langue officielle en Euskadi et tous ses habitants ont le droit de connaître et d’utiliser les deux langues. Cela signifie que Euskadi est bilingue et je garde le souvenir des discussions et prises de position de l’époque où l’on faisait remarquer que l’égalité entre les deux langues n’existait pas dans la mesure où la connaissance de l’espagnol est obligatoire alors que celle de l’euskara est facultative.
4) Enfin, le 24 novembre 1982 le Parlement basque vote la loi fondamentale de la normalisation de l’usage de l’euskara. En préambule est affirmé que la langue propre du Pays-Basque est l’euskara et que les deux langues officielles de la Communauté autonome sont le basque et l’espagnol (article 1 à 4).
L’article 5 traite des droits des citoyens et des devoirs de la puissance publique: droit de s’adresser dans chacune des langues, soit par écrit, soit oralement à l’administration où à quelque organisme que ce soit, implanté dans la Communauté autonome; droit à être enseigné dans chacune des langues; droit de recevoir en euskara des publications pé-riodiques, des programmes de radio ou de télévision ou autre moyen de communication; droit de développer les activités professionnelles, politiques et syndicales en basque; droit de s’exprimer en euskara dans n’importe quelle réunion. Dans le paragraphe 3 la puissance publique garantit l’exercice de ces droits sur tout le territoire de la Communauté autonome. Cette politique linguistique de la puissance publique est amplement développée dans les articles suivants: administration (articles 6 à 14), enseignement et mass media (articles 15 à 25), usage social (articles 26 à 29).
Tel est le modèle basque, celui d’une société bilingue où sont affirmés à la fois les droits linguistiques des citoyens et les devoirs de la puissance publique. Cela étant défini, il reste aux habitants à exercer ces droits, à ne pas se contenter d’être basque (euskotar), mais à être totalement basque, c’est-à-dire euskaldun et donc, possesseur de la langue basque. Le cadre légal est tracé: les euskalduns sont totalement responsables de la survie et du développement de l’euskara en Euskadi. Quand donc nos dirigeants prendront-ils conscience que le modèle basque fait rêver les Basques d’Iparralde et qu’ils combattent pour que ce rêve devienne réalité? A quand une véritable politique linguistique, une nouvelle législation donnant à l’euskara et aux autres langues de France le rang et le respect qui leur sont dus? A quand la fin de l’autisme?
Le poète Oxobi, en hommage à Axular, nous encourage:
“Legunak ez loker:
Aditurik elkar
Dugun Euskara sar
Eder, jori, hazkar,
Orotan!!”