Recentrer le débat

Les propos caustiques répétés du préfet confirment que si sa feuille de route est d’apporter une réponse “interco” au dossier de la gouvernance du territoire, elle est tout autant de  désamorcer le problème posé par  le vote du Conseil des élus de fin 2012.
“Les propos caustiques répétés du préfet confirment que si sa feuille de route est d’apporter une réponse “interco” au dossier de la gouvernance du territoire, elle est tout autant de désamorcer le problème posé par le vote du Conseil des élus de fin 2012.”

Qu’en est-il du débat sur l’avenir institutionnel d’Iparralde depuis que le préfet a écarté la création d’une collectivité territoriale à statut spécifique, qui faisait consensus, au profit d’une intercommunalité unique ? Voici le point sur la question.

A plusieurs reprises au cours des derniers mois, dans ses interventions publiques ou lors d’entretiens, le préfet a déclaré que le projet de Collectivité territoriale à statut particulier voté par le Conseil des élus fin 2012 représenterait une strate supplémentaire dans l’organisation administrative. Pourquoi un tel contresens alors que le projet décrit clairement une collectivité agissant en lieu et place du département ?

La méconnaissance du dossier étant peu probable, la seule explication est celle d’un acte de mauvaise foi au service d’une lutte idéologique contre l’option Collectivité territoriale. En bref, “qui veut noyer son chien l’accuse de la rage.” Il s’agit là d’un préalable à l’exercice auquel le préfet veut soumettre les élu-e-s du territoire: choisir dans un éventail restreint, une option institutionnelle pour le Pays Basque.

La tâche n’est politiquement pas simple car l’exercice proposé a déjà été fait sans limites pré-établies et la solution, simple et logique, déjà trouvée… à l’article 72 de la Constitution française. Le refaire aujourd’hui a quelque chose de surréaliste. Il est même un peu cruel pour les experts mandatés qui doivent “oublier” leurs conclusions précédentes et étudier deux nouvelles options (Communauté d’agglo et urbaine) qui n’ont pas été conçues pour un regroupement de communes si nombreuses et diverses par leur nature et leur taille.

Le préfet fait le job

En bon serviteur de l’État, le préfet fait le job, palliant le manque de courage de l’exécutif socialiste qui, entre 2012 et 2013, n’a dépêché aucun ministre au Pays Basque comme annoncé  pour entendre et discuter, ni n’a apporté le moindre argument juridique ou politique pour refuser de donner suite au projet travaillé par divers secteurs de la société, mis en forme par des juristes et porté par un large consensus politique. On subodore que la raison d’État ou des considérations diplomatiques y sont pour quelque chose mais silence radio : les habitant-e-s du Pays Basque et ses élu-e-s ne méritent aucune explication. Tout au plus une missive de Ayrault fin 2013 : vous faites fausse piste, cherchez ailleurs…

Depuis, les propos caustiques répétés du préfet sur l’heure de vérité pour les élu-e-s, leurs rivalités ou calculs politiciens et l’attachement égoïste de chacun à son EPCI, éléments assez  probables et logiques au demeurant, confirment que si sa feuille de route est d’apporter une réponse “interco” au dossier de la gouvernance du territoire, elle est tout autant de  désamorcer, d’une façon ou d’une autre, le problème posé par le vote du Conseil des élus de fin 2012. Là où la Collectivité territoriale rassemble, il amène des propositions qui divisent.

Mais les données de l’exercice restent pour la plupart inconnues à ce jour : taille des futures interco, maintien ou disparition du département 64, répartitions des compétences (et pour chacune d’entre elles, du segment d’exercice effectif par une interco unique) entre les différents niveaux institutionnels. Le calendrier présenté par le préfet n’est déjà plus tenable, l’examen de la loi sur la nouvelle organisation territoriale étant reporté au début 2015.

Recentrer le débat

Ironie de l’histoire, certains juristes, bien conscients que la montée en puissance des grosses interco se heurte à leur mode d’élection et de gestion, évoquent déjà leur évolution possible  en nouvelle Collectivité territoriale… grâce à l’article 72. Dans ce paysage confus où chaque semaine amène son lot de rumeurs et d’hypothèses contradictoires, il est fondamental ici au  Pays Basque de recentrer le débat sur les objectifs et besoins fondamentaux à partir desquels, une fois et une fois seulement le nouveau cadre législatif défini, il faudra juger de l’intérêt  des options possibles, à savoir :

• le désir social, le besoin et la légitimité d’une reconnaissance politique et territoriale du Pays Basque
• la nécessité d’un outil efficace de gouvernance au niveau Pays Basque assurant solidarité interne et cohérence du territoire
• la représentation équilibrée et démocratique des habitant-e-s dans des organes de fonctionnement simples et lisibles élus directement par les citoyen-ne-s
• des compétences et un budget permettant au territoire de prendre en main son évolution et de gérer au plus près ses enjeux spécifiques.

Les propos caustiques répétés du préfet
confirment que si sa feuille de route
est d’apporter une réponse “interco”
au dossier de la gouvernance du territoire,
elle est tout autant de  désamorcer
le problème posé par le vote du Conseil des élus de fin 2012.

Marcher sur la tête

L’expression a souvent été entendue ici ou là pour qualifier la réforme territoriale mise en chantier par les socialistes.

A l’époque où tout et son contraire semble envisageable, un peu  d’humour pour finir : pourquoi ne pas demander le retour de l’Aquitaine sous domination anglaise comme au XIIIème siècle afin de négocier avec Londres, à l’instar des Ecossais, une consultation démocratique des habitant-e-s du Pays Basque Nord sur leur avenir institutionnel ?

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