Pas un séisme

SéismeLa progression du vote en faveur du Front National d’élection en élection, plaçant ainsi la France dans la seule première place qu’elle occupe parmi les pays développés, suscite bien des analyses médiatiques sommaires. Raison de plus pour apprécier la lecture lucide et intransigeante qu’en fait Mixel Berhocoirigoin.

Au soir des élections européennes, le mot séisme est revenu en long et en large, pour qualifier le score du Front National. Un séisme est un événement soudain, imprévu, c’est-à-dire, tout le contraire du phénomène que nous venons de vivre avec le score historique de l’extrême droite.

Je ne vais pas jouer au prévisionniste qui arrive à prévoir ce qui vient d’arriver. Simplement, en tant que citoyen engagé, j’ai un avis sur la question. Pour moi, c’est tout sauf un accident.

Depuis longtemps, les conditions sont en train d’être réunies pour produire ce genre de comportement. Je vais, ici, m’attarder un peu sur la responsabilité des pouvoirs successifs surtout au niveau central. Ce n’est pas pour renvoyer la faute aux autres et dédouaner notre propre responsabilité en tant que citoyen. Je sais et je le dis chaque fois que l’occasion m’est donnée, que, autant les problèmes (quels qu’ils soient) que les solutions, sont du ressort de nos comportements individuels et des politiques publiques qui sont menées.

Coller à l’opinion

Mais, pour revenir à mon sujet du jour, et avant d’aborder la responsabilité des pouvoirs en place, je dirai qu’évidemment chacun d’entre nous a sa part de responsabilité. Chaque fois que, en tant qu’individu, nous simplifions à outrance les éléments d’un débat ou d’un problème (alors qu’ils sont toujours complexes), chaque fois que nous relativisons nos  comportements quelques fois douteux en nous justifiant que ce n’est pas bien grave au regard de ce que d’autres se permettent de faire, chaque fois que nous usons du bouc émissaire facile, chaque fois que nous sommes témoins de propos populistes qui font le lit des idéologies réactionnaires, chaque fois, nous façonnons un peu plus ce terreau qui permet les conditions du développement de l’extrême droite.

Lorsque le terrain et le climat sont favorables à la plante vénéneuse, celle-ci pousse… Mais, permettez-moi de venir à la responsabilité “des politiques”, au plus haut niveau. Je suis très loin de connaître l’ensemble des tenants et aboutissants de tous les dossiers.

J’ai juste la prétention de connaître un peu deux domaines, et donc d’avoir le droit d’exprimer un avis. Ces deux domaines sont la question basque et la question agricole.

Je me dis : si tous les dossiers sont traités comme ces deux dossiers, pas étonnant que le Front National monte, en tirant sur sa trajectoire, avec plus ou moins de distance, la plupart des autres forces politiques, avec l’argument de coller à l’opinion.

Sur la question basque, malgré des années et des décennies de travail, de pédagogie, de lutte démocratique et non violente, aucun pouvoir, quelle que soit sa couleur politique, n’a répondu de façon structurelle à la question institutionnelle ou à la co-officialisation de l’euskara.

Un pouvoir qui n’écoute pas et qui n’entend pas, génère du mépris à son égard (“tous pourris, tous pareils”), et discrédite les forces sociales de terrain (“ça sert à rien de bouger”). Voilà des ingrédients essentiels que le Front National adore.

Ne l’oublions pas : le Front National fait son miel à partir des problèmes des gens et des fautes commises par les pouvoirs en place. Si l’attitude de mépris des pouvoirs en place à l’égard de la question basque ne profite pas, autant qu’ailleurs, au Front National, c’est parce que le mouvement est animé par des forces progressistes qui sont intransigeantes sur le caractère non ethnique et non xénophobe de leur combat (n’en déplaise à ceux qui aimeraient jeter le bébé avec l’eau du bain.)

Seuil d’exclusion

Sur la question agricole, le hasard a voulu que le ministre annonce, le surlendemain des élections, les derniers arbitrages sur la réforme de la PAC. On y trouve, entre autres, l’arbitrage sur les aides à la vache à viande : un dossier emblématique où l’enjeu était de savoir si les petits éleveurs allaient être exclus ou pas. La confédération paysanne en général, et ELB tout particulièrement, s’étaient fortement mobilisées.

Mais, ce que l’on craignait est arrivé : les éleveurs de moins de dix vaches n’auront pas d’aide ! Le socialiste Le Foll met un seuil d’exclusion à 10 vaches. L’UMP Barnier, lors de la dernière réforme, il y a six ans mettait le seuil à 3 vaches… Chercher l’erreur ! Que le pouvoir ne veuille pas d’une discrimination positive en faveur des petits paysans, est une chose (ce serait pourtant tout à fait légitime au nom de toutes les valeurs ajoutées qu’ils apportent à la société : emploi, qualité, paysage, biodiversité…), mais, autre chose est de tirer sur eux, pour les éliminer : la décision sur les 10 vaches revient à ça, et ce n’est qu’un exemple tout comme celui d’une mesure spéciale “petites fermes” que la réforme de la PAC propose aux Etats qui le souhaitent de mettre en place, et que la France a refusée !

Dans le même temps, il faut se battre et entrer dans l’illégalité, pour que la ferme-usine de 1.000 vaches laitières ne voie pas le jour. Tout ceci, parce qu’il y a une obsession absurde, imbécile, aveugle sur une notion archaïque de la compétitivité, véritable fourre tout où on met toutes les politiques qui tuent l’emploi et les territoires. Les conséquences sont dramatiques, et elles alimentent abondamment le Front National .

C’est gravissime, mais on a à faire à des gens qui ont un vrai problème de logiciel dans leur tête !

Puis, un lundi matin, tous ces gens-là vont se réveiller avec la gueule de bois, parce qu’ils ne comprennent pas ce qui vient d’arriver avec une Le Pen à 25%…

(Sur le même sujet :  www.enbata.info/articles/pourquoi-le-front-national-doit-rester-tabou)

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