D’un point de vue strictement abertzale, les élections présidentielles énervent. Elles nous paraissent tellement loin de nos (pré)occupations, tellement ancrées dans un territoire qui ne nous parle pas, ou si peu, que l’on est tenté d’attendre qu’elles passent. Notre re-gard de citoyen français, lui, nous ramène à une lecture plus globale d’un système électoral pervers qu’une démocratie pleine et entière ne saurait tolérer.
Les présidementielles!
Car peu de voix hexagonales s’élèvent pour critiquer un spectacle récurrent d’un niveau affligeant pour élire l’homme providentiel. Cette campagne présidentielle renvoie la politique à un exercice pitoyable où le bagout et les petites phrases l’emportent sur un vrai débat d’idées, de choix de société. Cela s’inscrit dans un en-semble électoral pas vraiment démocratique avec la quasi absence de proportionnelle, des circonscriptions iné-gales entre elle, des centaines de milliers de personnes exclues du droit de vote, des mandats renouvelables ad vitam aeternam, la non reconnaissance des votes blancs et nuls ou le toujours cumul des mandats. De plus, le syndrome de la présidentielle d’avril 2002 est venu renforcer ce système inique du vote utile où le choix, dès le premier tour, ne peut se faire qu’entre deux candidats si l’on veut éviter l’accession au second tour de la candidate de l’extrême droite.
«Il ne faudrait pas que Sarkomence! …»
Comment peut-on se passionner pour une telle élection qui permet à un homme seul de cumuler tant de pouvoirs dévoyant un régime qui se voudrait parlementaire?
N’y a-t-il pas matière à ce que ces
parlementaires, des partis politiques, des journalistes… réfutent ce simulacre de démocratie en appelant à une refonte totale du schèma structurel de l’Etat français? Ne peut-on pas minimiser le rôle d’un président en le faisant élire à nouveau par un collectif d’élus à l’instar des IIIème et IVème républiques, et qui n’aurait qu’une simple fonction de représentation en laissant un gouvernement et les assemblées élues gérer les affaires?
«…Sans croire Hollandemains
qui chantent!»
Alors pourquoi ne pas faire face collectivement à cette élection et aux législatives afin de faire du lobbying à la veille d’un changement probable de majorité? Pourquoi penser que sur le plan électoral notre salut ne viendra que de nous-mêmes alors qu’en groupant des forces au-delà même du mouvement abertzale, comme le fait Batera au niveau sociétal, nous pourrions instaurer un vrai rapport de force en n’étant plus la cinquième force politique en Iparralde? Seuls les Conseils des élus et de développement dont quelques élus abertzale affiliés à AB font pression pour pousser le PS à se positionner sur un statut de notre langue ou la reconnaissance de notre territoire. Cela sera-t il suffisant?
Individuellement que nous reste-t il à faire? Faut-il la boycotter totalement pour un résultat pas vraiment visible? Ne s’y exprimer qu’au premier tour et plutôt pour la candidate d’Europe Ecologie la plus pro-che de nos idées, la seule à oser questionner ce système électoral et le danger d’un tel régime présidentiel? Voter aussi au second tour pour le moins pire sans se faire d’illusions contrairement à il y a 31 ans avec l’avènement du PS en France?
50 ans et toutes ses dents!
Le referendum d’octobre 1962 initié par De Gaulle et passant outre l’adhésion des deux assemblées du Parlement (déjà!) va fixer dans le marbre l’élection d’un mo-narque républicain au suffrage universel. La constitution du 4 octobre 1958 ne le prévoyait pas du fait que celles de la IIIe et de la IVe République avaient également exclu ce mode de désignation du chef de l’État, car il s’était soldé le 2 décembre 1851 par le coup d’état de Louis-Napoléon Bonaparte qui avait entraîné la chute de la IIe République et le rétablissement de l’Empire. Les français de 2012 seront-ils encore «dévots»?