
Les mauvaises nouvelles climatiques s’accumulent. Mais, pendant que d’autres renoncent, nos territoires inventent déjà des réponses. L’heure n’est pas à l’abandon, mais à la résistance organisée et acharnée.
Voilà, c’est acté. Le seuil des +1,5°C de réchauffement planétaire ne sera pas tenu. L’Accord de Paris ne s’effondre pas, mais il se transforme en symbole. Ce n’est plus une cible, c’est un rappel : celui de notre échec collectif à inverser la courbe.
Et maintenant ? On arrête tout ? On attend la suite, entre déni confortable et fatalisme joliment formulé, comme une manière habile de justifier l’inaction ? Pas sûr que le vivant ait le temps d’attendre qu’on digère.
Il y a quelque chose d’indécent à se résigner trop vite, alors que d’autres – humains et non-humains – se battent simplement pour survivre. Et quelque chose de précieux à s’obstiner à agir, même sans garantie de résultat.
L’enjeu n’est pas seulement de limiter le réchauffement, mais de choisir qui nous voulons être dans ce moment charnière, y compris face à celles et ceux qui continuent, en conscience, à détruire l’habitabilité de la planète pour préserver leurs profits. Et surtout : ce que nous sommes capables de faire, ici et maintenant.
Ce que la grande machine ne fait pas, nous pouvons le tenter
Quand on regarde le monde d’en haut, tout semble bloqué. Les COP s’enchaînent, les grandes puissances s’exonèrent, les lobbies fossiles verrouillent les décisions. Mais à hauteur de territoire, de commune, de vallée, quelque chose continue de bouger.
Les cantines se fournissent localement, les circuits courts se réinventent, les alternatives à la voiture individuelle se multiplient. On y parle d’énergie, d’eau, de logement, de santé, de solidarité. Avec les moyens du bord, souvent. Mais avec détermination.
Et surtout, ces batailles-là produisent du lien, de la fierté collective. Des victoires, parfois. À l’inverse d’un effondrement subi, elles proposent un atterrissage organisé, où chacun peut participer à sa mesure.
On aurait bien besoin de tout faire, de tout résoudre. Mais il y a surtout urgence à faire quelque chose. Ensemble. Parfois, résister se conjugue dans de simples gestes : c’est un repas partagé, un atelier dans un quartier, une berge nettoyée ensemble. Une écologie populaire, qui ne dit pas son nom, mais le fait très bien.
Résister, ce n’est pas souffrir, c’est choisir
Nous avons besoin de voisins qui parlent à leurs voisins. D’élus qui osent. D’associations qui tiennent bon. De coopératives, de grèves, de maraîchage, de luttes concrètes.
Parce que non, résister ne veut pas dire se sacrifier. Cela veut dire retrouver du pouvoir là où on nous l’a confisqué. Sur notre temps. Nos déplacements. Nos repas. Nos décisions. Cela veut dire refuser de laisser le terrain aux cyniques, aux violents, aux rentiers de la catastrophe.
Ici, en Iparralde et sur d’autres territoires, nous avons commencé à construire des morceaux de futur désirable. Rien de parfait, mais une promesse. Celle qu’un autre rapport au monde est possible. Et que nos engagements, même minuscules, sont porteurs de sens. Ce sont ces gestes-là, discrets et obstinés, qui maintiennent le monde en mouvement.
“Il y a quelque chose de précieux
à s’obstiner à agir,
même sans garantie de résultat.”
Résister, c’est aussi croire à ce qu’on ne voit pas encore. Ce n’est pas fuir le réel, mais refuser qu’il soit notre seul horizon. C’est porter l’intuition têtue qu’un autre monde est possible, et déjà en germe dans les marges. Imaginer des villages vivants, des villes respirables, des quotidiens où l’on a le temps de vivre bien. C’est un monde qui veut tenir debout, une utopie concrète. Le rêve n’est pas un luxe, c’est aussi ce qui empêche l’effondrement intérieur. C’est ce qui donne à l’action sa direction, et à nos engagements leur souffle.
Alors non, il n’est pas trop tard. Juste trop tard pour se résigner et continuer comme avant.