
Les récentes catastrophes à Valence, Mayotte et Los Angeles révèlent la vulnérabilité de notre monde face à la crise climatique. Plutôt que de sombrer dans l’inaction, ces crises peuvent devenir des opportunités pour une bifurcation écologique, à condition de raviver des récits d’un avenir désirable.
Inondations à Valence, cyclone à Mayotte, incendies à Los Angeles : autant de signes de la vulnérabilité d’un monde qui peine à anticiper ses crises et à se réinventer. Alors que l’inaction climatique dessine peu à peu notre trajectoire vers le scénario catastrophe d’un réchauffement de +4°C à la fin du siècle, il ne s’agit plus de savoir si les territoires seront affectés, mais plutôt quand et avec quelle ampleur. Ce constat pousse à nous demander pourquoi ces crises sont des accélérateurs de la crise climatique et comment on peut en faire des moments de bifurcation vers un nouveau modèle. Selon Hannah Arendt, aguerrie aux périodes de bouleversement social, une crise devient catastrophe lorsqu’elle est abordée par des idées toutes faites, étouffant toute réflexion nouvelle.
L’inaction, le choix des catastrophes
La vérité, c’est que dans notre société occidentale, une très grande majorité d’entre nous n’est pas prête, aujourd’hui, à sacrifier individuellement son confort pour réduire drastiquement son empreinte carbone. Même ceux qui s’efforcent sincèrement d’agir font face à des limites : peut-on vraiment vivre sans avion, sans voiture, à quatre dans 50 m², en se nourrissant de produits locaux de saison bio, sans café ni chocolat, tout en limitant Internet, les appareils numériques et ménagers ? Pourtant, nous n’avons jamais décidé collectivement que, tant pis, nous ferions face aux conséquences de la crise environnementale. C’est un choix par défaut, inscrit dans des habitudes collectives et des structures que nous n’avons pas encore eu la force de transformer.
“Nous n’avons jamais décidé collectivement
que, tant pis, nous ferions face aux conséquences de la crise environnementale.
C’est un choix par défaut.”
Les responsables politiques doivent simultanément mener des politiques de décarbonation et anticiper les catastrophes. Pourtant, alors qu’agir en amont pour ralentir le réchauffement climatique devrait être une priorité au coeur des débats, les discours antiécologiques décomplexés, abusant des fake news, prennent de l’ampleur. Dans le même temps, au lendemain des crises, la pression populaire pour une meilleure gestion de ces crises devient de plus en plus forte, à l’image des protestations massives à Valence, où la réponse insuffisante du gouvernement face aux inondations a enflammé les rues.
Business as usual
Les incendies en Californie ont révélé ce à quoi il fallait s’attendre dans une société inégalitaire et profondément individualiste et libérale, avec l’exemple caricatural que peut être Los Angeles. Face à l’ampleur des feux et des secours débordés, certains ultra-riches ont fait appel à des pompiers privés pour protéger leurs villas des flammes. Et comme dans toute crise, cela a aussi été l’occasion d’observer des comportements opportunistes. Les prix du logement ont flambé dans une région où ils sont déjà élevés, devant la demande accrue de relogement de ces déplacés climatiques.
“Un véritable système de résilience collective et solidaire
devrait reposer sur des services et infrastructures publiques solides.”
À l’inverse, un véritable système de résilience collective et solidaire devrait reposer sur des services et infrastructures publiques solides. Mais il est vrai que les politiques d’austérité les mettent à mal et fragilisent notre capacité à faire face collectivement aux crises. Pour ce qui est des hôpitaux par exemple, pourra-t-on encore compter sur les services publics pour répondre à une nouvelle crise majeure, ou faudra-t-il y payer cash pour espérer être soigné ? Comment réagiront les structures de santé en Iparralde, déjà surchargées ? Grâce à nos écosystèmes locaux, un réseau de solidarité pourrait efficacement prendre le relais des services débordés. Cette légitimité collective permettrait de contester toute reconstruction rapide qui ne correspondrait pas à nos aspirations et la nécessité de changement.
Stratégie du choc 2.0
La biologiste Raïma Fadul déplorait ainsi que le plan “Mayotte debout” ignore la destruction de la biodiversité par le cyclone et fasse l’impasse sur des mesures ambitieuses, comme le reboisement, pourtant crucial pour préparer le territoire aux bouleversements climatiques à venir. Si demain sur la Côte Basque par exemple, des zones gravement sinistrées étaient à reconstruire, on pourrait en profiter pour en redéfinir la destination, quitte à revenir en arrière en termes d’urbanisme. Dans sa célèbre thèse de “la stratégie du choc“, Naomi Klein affirme que les crises sont souvent utilisées pour renforcer des politiques néolibérales, au détriment du bien-être collectif. Une dynamique qu’il nous est possible d’inverser, en transformant ces crises répétées en leviers pour initier une bifurcation écologique. Et si… on ravivait ces récits de changement et de solidarité, forgés pendant la crise du COVID ?
covidaren denboran indarrean ezarri zuten zokoratze aldietan airearen kutsadura dezente apaldu zela ohartu zuten agintariek. Hortik ikasi beharko genuke; zergatik hilabete guziz bi zokoratze egun ez egin?