L’annonce de la tenue d’une conférence internationale pour la paix qui se tiendra la semaine prochaine est une première dans l’histoire du conflit en Pays Basque. Vis-à-vis de l’opinion publique internationale, cette conférence aura d’abord le mérite de replacer le conflit basque à l’échelle de la scène européenne, puisqu’en effet, ce conflit est le dernier conflit du type de celui de l’Irlande du Nord au sein de l’Union européenne. Par ailleurs, la mobilisation de la communauté internationale en faveur de la résolution du conflit basque a aussi pour conséquence de mettre en exergue le fait qu’il ne relève pas seulement d’un problème «interne» à l’Espagne et à la France, mais constitue bien un problème relatif à l’existence d’une identité nationale différenciée qui nécessite une médiation internationale au même titre que la question irlandaise ou palestinienne. Maintenant, pour nous en Iparralde, l’enjeu des mois à venir et des prochaines années consiste à faire en sorte que l’Etat français ne puisse se dédouaner des responsabilités qui sont les siennes vis-à-vis du dépassement de ce conflit. L’Etat français en est en effet partie prenante à double titre. Il est d’abord partie prenante de ses expressions violentes. Dans les différentes chroniques du conflit en Pays Basque, on ne peut oublier par exemple l’époque du GAL, ou ce qui est arrivé à Popo Larre, et tout récemment encore, l’enlèvement et la mort provoquée de Jon Anza. Comment faire l’impasse aussi de la situation de près de 150 prisonniers incarcérés dans les prisons françaises? Ou comment «oublier» que Paris participe directement à une répression qui cherche à emprisonner des militants abertzale comme Aurore Martin dont l’engagement politique constitue le seul «délit». Mais plus fondamentalement, l’Etat français est partie prenante des causes du conflit du fait, de la négation totale qu’il impose à Iparralde no-tamment en matière de reconnaissance politique et institutionnelle de notre territoire. Soulignons d’ailleurs sur ce point que l’Etat français s’est fait tirer les oreilles à l’occasion du dernier rapport de la Commission des droits de l’Homme de l’ONU (juillet 2008) le concernant. Car il lui a été alors rappelé que les droits des minorités nationales relèvent des droits de l’Homme. Nous devons donc faire en sorte que l’Etat français s’implique directement sur les deux plans que nécessite le développement du processus de résolution du conflit: le dépassement de ses expressions violentes et la normalisation de la vie politique en Pays Basque d’un côté, et de l’autre, le processus politique dont le caractère démocratique tient du respect des positionnements majoritaires en Euskal Herria concernant en particulier la question des cadres et statuts institutionnels. Mais au-delà des seules sphères parisiennes, l’enjeu est aussi d’impliquer les acteurs politiques locaux dans cette démarche de dépassement du conflit. En la matière par exemple, on ne peut pas tolérer les propos d’un Georges Labazée qui, dans le cadre de la campagne des sénatoriales à l’occasion de laquelle un accord avait été passé avec AB, se permet de dire que ce n’est pas «son» problème, que c’est un problème strictement espagnol! Face à ces enjeux, et alors qu’une page historique est en train de se tourner en Euskal Herria, il est temps qu’en Iparralde aussi les abertzale s’inscrivent de façon unie dans la nouvelle donne qui se met en place. Evidemment, on ne peut faire une totale abstraction du passé, mais une fois dit que chacun a sa part de responsabilité dans ce qui a été mal fait ces dernières années, il faut considérer que le passé est derrière nous, et nous tourner résolument vers l’avenir. La démarche de Bildu en Hegoalde, et plus récemment la candidature d’Amaiur, nous montrent la voie à suivre. En Iparralde également, nous devons dépasser le stade des querelles de chapelles et des alliances tactiques ou de circonstances, pour élaborer ensemble un schéma de travail global qui nous permette d’aborder de façon cohérente et efficace la gestion du processus de résolution du conflit, mais aussi des chantiers comme ceux de la revendication institutionnelle ou de la stratégie de construction nationale. Sachons donc faire preuve de générosité mais aussi de responsabilité, et être à la hauteur de l’Histoire qui est aujourd’hui en marche en Euskal Herria!