Pour la SNCF, le chiffre d’affaire annuel est de 30.7 milliards d’euros, mais son endettement se monte à 8.6 milliards d’euros. En ce qui concerne RFF (Réseau ferré de France), le chiffre d’affaire est de 3.3 milliards d’euros (redevance qu’il perçoit de la SNCF) mais son endettement est de 29 milliards d’euros…
La scission entre les deux organismes, il y a une dizaine d’années, avait été réalisée pour que la SNCF «parte d’un bon pied» en se débarrassant de ses dettes, mais ce modèle de gestion n’a pas tenu les espérances initiales, car les montants consolidés (RFF + SNCF) de ces dettes ont augmenté dans la période.
Au-delà des chiffres globaux,
la nécessité de renouveler le matériel roulant
L’explication donnée par les responsables sur l’incident du 26 décembre du Strasbourg/Port Bou (24h de trajet incluant 15h de retard), a mis en relief ce dysfonctionnement important.
Le matériel roulant est en mauvais état: RFF impute 70% des retards au matériel de la SNCF et à son organisation (plus modérés, la Fédération des usagers et les syndicats évoquent un retard sur deux). Il est estimé un besoin en investissement sur le matériel roulant de 20 milliards d’euros. Les premières lignes TGV mises en service en 1981 devraient être renouvelées à partir de 2014. Ce renouvellement est repoussé à cause du contexte de l’endettement actuel. Dans les trains Corail, la situation est plus dramatique, ces trains sont «à bout de course». En ce qui concerne les TER, les régions (c’est leur compétence) devront investir une dizaine de milliards.
Mais, il faut aussi rajeunir l’infrastructure (30.000 km dont 50% à rénover, 46.000 ponts dont 60% sont centenaires, 2.250 postes
d’aiguillage à remplacer d’ici 2030)
Des rails qui cassent, des ponts qui ne supportent plus les charges, des signalisations qui tombent en panne, mais aussi, des passages à niveau dangereux, etc.
Le centre d’aiguillage de la gare de Lyon date des années 1930. Une partie des caténaires datent de la période 1920-1950. Le nombre de kilomètres sur lesquels on doit rouler moins vite a doublé en cinq ans (1.700 km actuellement).
C’est le domaine de la RFF et son objectif est un plan d’investissement sur l’infrastructure de 2 milliards de travaux par an. Il serait ici trop long de détailler les besoins (se reporter au n°3221 de l’Usine Nouvelle, fort bien documenté), mais, de l’avis de nombreux spécialistes, c’est plus du double (soit 4 milliards par an) qu’il faudrait investir pendant au moins 10 ans.
La question est de combien RFF augmentera le péage à la SNCF pour investir ces milliards annuels et résorber sa dette actuelle. Et la question de la question est de combien la SNCF augmentera les billets pour transférer ce surcoût, investir dans le matériel roulant et rembourser sa dette (la sienne).
Il faut enfin revoir l’organisation
Ce n’est pas à nous qu’il faut évoquer les difficultés des organisations tentaculaires et centralisées… Plusieurs «dinosaures» pourraient ici servir d’exemple dans l’hexagone.
Le secrétaire Unsa-Transports évoque «une balkanisation du système ferroviaire» avec trop de décideurs et trop d’acteurs: RFF, les diverses branches de la SNCF, autorités de contrôle: «on ne peut plus utiliser une loco du fret pour venir en aide à un Corail en panne…». Les cloisonnements entre statuts des cheminots «grande ligne», «frêt», «TER» sont aussi mis en exergue. Bref vive les macro organisations!
Et la nouvelle ligne dans tout ça!
L’article n’évoque pas le sujet, car, ce n’était pas son objet… Mais il parait relativement clair, au moins pour certains, que le projet pharaonique de la 2ème ligne LGV, survient dans un contexte très délicat pour les sociétés RFF et SNCF en difficultés d’endettement, de gestion, d’organisation et devant faire, même si la nouvelle ligne n’est pas créée, des investissements de pérennité, très importants.
Dés lors, on comprend mieux, que le «banquier» de l’opération soit la société concessionnaire Veolia qui avancerait l’argent, contre un pont d’or (les péages pendant cinquante années). C’est un rôle de «méga-banquier» que seule une société de ce type peut assurer.
RFF ne toucherait les péages qu’après «amortissement» de Veolia. Cette opération ne facilitera donc pas la rentabilité de RFF, et, «au bout du bout» les seuls garants «solvables, au sens financier du terme» de ce montage risquent fort d’être les contribuables de l’Etat, des régions et des conseils généraux. Vus les endettements, ce n’est ni RFF, ni la SNCF que nous pouvons qualifier de responsables ou de solvables (si j’ai bien compris…).