En experte, Maryse Cachenaut, ramène inlassablement à une agriculture humaine. Sa parole n’est pas singulière, car elle recouvre une démarche collective qui transforme le Pays Basque.
Le premier week-end de juin nous étions nombreux à Bayonne pour manifester notre volonté de voir le Pays Basque doté d’une collectivité territoriale; chacun avec ses motivations, personnelles ou collectives… En tant que paysans, nous pensons en effet depuis longtemps qu’un outil institutionnel doté de moyens suffisants, capable de volontarisme pour promouvoir une agriculture de qualité et à taille humaine, en lien avec le terroir dans lequel elle s’inscrit, est nécessaire… C’est dans ce sens que Euskal herriko laborantza ganbara a été créé et préfigure cette orientation.
C’est aussi ce même week-end de début juin qu’a choisi la délégation italienne du mouvement Slow Food pour visiter des fermes du Pays Basque. Slow Food est un mouvement éco-gastronomique international œuvrant dans plus de 120 pays du monde entier pour diffuser les valeurs d’une alimentation bonne, propre et juste (voir slowfood.com). Slow Food reconnaît comme produits “sentinelles” des productions en lien au terroir, produites à petite échelle et menacées…
Défense de la biodiversité
Au Pays Basque des paysans se sont organisés autour du collectif Amalur pour la sauvegarde, la promotion et la commercialisation de produits issus de la biodiversité. Ces paysans se sont engagés dans une démarche de qualité, travaillent avec des races ou variétés locales parfois laissées de côté à l’époque de la modernisation et de la spécialisation de l’agriculture dans les années 60… (maïs hybride qui est venu remplacer le grand roux basque , disparition ou déclin des vergers de pommiers et cerisiers…). Mais depuis une, voire deux décennies, des hommes et des femmes s’appliquent à sauvegarder des productions, les valorisent par la vente directe, et participent ainsi à améliorer la viabilité de leur ferme tout en entretenant la biodiversité cultivée…
Souvent ces races ou ces variétés locales s’avèrent rustiques et capables de valoriser les herbages et les landes (comme le canard, la sasi ardi ou le porc basque), s’adaptent à nos climats comme la cerise, le piment… C’est ainsi qu’on découvre ou redécouvre des saveurs et des goûts très intéressants qui enrichissent notre gastronomie: le jambon de porc basque (2.000 porcs abattus chaque année alors que la race était en voie de disparition), la cerise d’Itsasu (plus de 3.000 arbres plantés ces quinze dernières années), le canard kriaxerra élevé par 25/30 éleveurs, la polenta de maïs population… et bien d’autres sont une part de notre identité mais surtout présupposent une façon de travailler. C’est-à-dire des pratiques agricoles transparentes, respectueuses de la nature, des saisons…
Agriculture, reflet de notre société
Bien sûr, ces petites productions ne sont pas et ne seront pas à même de nourrir la population du Pays Basque mais elles aident aux maintien de petites fermes, créent de l’emploi et contribuent à l’entretien du territoire.
L’agriculture est le reflet de notre société de nos modes de vie, de nos fonctionnements. L’industrialisation de l’agriculture, la production de produits standardisés, ont fait beaucoup de dégâts, développant la malbouffe, réduisant considérablement le nombre de paysans. A nous de résister dans nos actes de production et de consommation! Mais d’une nécessaire phase de sauvegarde, nous voulons aller au-delà, pour construire et faire vivre. Tout comme on ne peut se contenter de sauvegarder notre langue, encore faut-il la vivre dans nos quotidiens.
Pour conclure, je vous invite à passer cet été pendant les fêtes de Bayonne au quai Chaho à l’espace gourmand animé par les paysans d’ELB qui vous feront découvrir le fruit de leur travail et les qualités gustatives de produits exclusivement locaux.