Notre riche société occidentale vit dans le mensonge, l’illusion, la dette, l’intérêt immédiat. Le long terme n’existe plus, le moyen terme est renvoyé aux calendes grecques. C’est la fuite en avant. Mensonge des superprofits qui éclatent en bulles, entraînant la banqueroute et le désastre économique. Nos hardis traders vendent des choses qui n’existent pas encore, d’autres malins les leur achètent pour de l’argent virtuel, et les grands banquiers encouragent hypocritement les uns et les autres.
Mensonge de la mondialisation: elle est faite par les mêmes, au service d’actionnaires qui trahissent de bonnes entreprises à 10% de dividendes, pour cueillir 15% dans les paradis fiscaux et les néo-colonies à très bas salaires. Mensonge de la retraite à 62 ans: avec 42 ou 43 ans de cotisations, beaucoup la prendront à 65 ou 67 ans. Mensonge de l’Etat démocratique, belle ligne Maginot contournée par les panzers de la finance, survolée par les stukas de la spéculation à mort. Même le patron d’antan est laminé, réduit à faire la police sociale du travail, et l’Etat aussi est rabaissé à cette fonction dite régalienne: le tout sécuritaire.
Mensonge des élections “libres”: les grands partis sont dopés par les puissances d’argent au prix de leur docilité. Les grands élus prétendent tout régenter, mais leur marge de manœuvre ne cesse de se réduire. Le mensonge inverse est aussi à rejeter: ils ne sont pas totalement impuissants, ils gèrent quand même près de la moitié de nos revenus. Leur souci principal semble être de se faire réélire, et c’est humain, car la politique est devenue un métier, d’autant plus qu’en s’y jetant, l’on a tous les risques de sacrifier sa carrière professionnelle, du moins dans le secteur privé. De ce fait les partis politiques gèrent l’immédiat sans préparer suffisamment l’avenir. L’on tape à suivre dans des budgets fortement déficitaires. La masse des pauvres et demi-pauvres croit que le déficit est quelque chose de théorique: or il s’agit bien de dettes réelles que nos enfants et petits-enfants devront rembourser dans un contexte plus difficile que le nôtre. Quant à la planche à billets, parfois souhaitée dans les mêmes milieux populaires, elle ne produit que de la monnaie de singe, elle ne fait que doper les prix.
Mensonges électoraux, promesses intenables, parfois sincères hélas, et c’est ça le pire, cet aveuglement à fixer le guidon au lieu de regarder plus loin la route! Le candidat Sarkozy promettait l’amélioration du pouvoir d’achat: la crise est venue, et l’on connaît la suite, mais il était déjà mal parti. Et voici qu’un possible candidat pour 2012, François Hollande, enfourche le même dada, mais sur une selle de gauche, comme en amazone, nous promettant radiophoniquement l’amélioration du niveau de vie et le progrès, comme s’il suffisait de vouloir. Mais quelle sorte de progrès? Le “toujours plus”? Sur cette ligne-là, on va tout droit dans le mur. Comment l’ignorer?
Voilà justement le mensonge fondamental, source de tous les autres: faire comme si le monde était toujours un Far West illimité! Faute d’avoir quelques planètes de rechange, il faudra forcèment exclure le gaspillage et partager les ressources. Certains se chargent d’ailleurs du partage, mais à leur profit, de la façon la plus arbitraire, injuste, sauvage, égoïste: nos fa-meux actionnaires-dictateurs, avec leur cortège de traders et de banquiers et tous les gourous bananiers du néo-libéralisme triomphant à la Pyrrhus. Aux autorités politiques de reprendre leur pouvoir de contrôle aux différents niveaux et aussi à l’échelle mondiale: peut-on jouer correctement au foot ou au rugby sans arbitres? Quel massacre!
Malgrè tout, si le niveau de vie doit augmenter en Afrique, en Asie, en Amérique latine, le nôtre s’en ressentira forcèment. Il nous faut donc modérer nos appétits et renoncer en Occident au “toujours plus”. Il s’agit de répartir les efforts, les ressources et les résultats du travail avec plus de justice sociale, mais aussi d’améliorer en mê-me temps la qualité de la vie, par ex-emple avec moins d’hypercompétition, de pollution et de nuissances, de dégâts collatéraux et de stress… Pour le dire clairement, courageusement, je ne vois qu’un grand parti dans la République française: Europe Ecologie – les Verts. Je ne serai sans doute pas seul à le penser vers 2012, et même avant.
Jean-Louis Davant