Le Comité National du syndicat ELA, réuni à Bayonne, a procédé à une analyse détaillée de l’état actuel du débat sur la reconnaissance institutionnelle du Pays Basque Nord.
ELA donne une grande valeur a toute la dynamique en faveur de cette reconnaissance tout au long de l’année 2012, dont notamment le travail réalisé par le Conseil de développement du Pays Basque, l’analyse minutieuse des différentes hypothèses de gouvernance spécifique, les différentes assemblées, et fi-nalement la réunion avec la ministre de la décentralisation. Pour ELA, le vote —quasi-unanime— du Conseil des élus du Pays Basque en faveur d’une collectivité territoriale à statut particulier le 24 novembre dernier a constitué un évènement marquant de cette phase politique mémorable pour Iparralde.
De fait —et quel que soit ce que décidera maintenant le gouvernement français— nous pensons qu’un résultat des plus importants a d’ores et déjà été obtenu: la revendication institutionnelle jouit aujourd’hui d’un niveau d’appui bien plus large que par le passé. Cette demande est aujourd’hui d’avantage plurielle, elle engage plus de forces politiques et d’élus, et elle jouit d’une adhésion sociale plus large. On peut dire, dans ce sens, que la situation est meilleure qu’en 1981, époque à laquelle le futur Président Mitterrand avait intégré dans son programme électoral la proposition de création d’un département Pays Basque.
Une référence
pour les organisations
Ces avancées sont fondamentalement le fruit du travail de la plateforme Batera qui, depuis plus de dix ans, travaille en faveur de quatre objectifs: un cadre institutionnel, la co-officialité de l’euskara, une université de plein exercice et une Chambre d’agriculture du Pays Basque. La victoire politique, sociale et judiciaire qu’a supposée la mise en marche définitive d’Euskal Herriko Laborantza Ganbara, ajoutée au processus institutionnel que nous analysons aujourd’hui renforcent de manière déterminante la stratégie de cette plateforme.
Le vote du Conseil des élus du Pays Basque, point d’orgue de ce travail collectif, est d’ores et déjà une référence pour les organisations —y compris du Pays Basque Sud— qui voulons avancer et construire l’avenir du Pays Basque. Nous pouvons apprendre de ce processus-là que le débat loyal et rigoureux autour d’objectifs politiques et d’outils de gestion concrète rend possible l’abandon de beaucoup de préjugés entre les différents acteurs, ainsi que le dépassement des positions d’immobilisme et de blocage. La définition d’objectifs partagés et le développement de stratégies définies en commun entre différentes forces politiques et sociales ont, aux yeux d’ELA, une valeur énorme.
Instance dirigeante d’une organisation travaillant au niveau syndical en Pays Basque sud, le Comité national d’ELA a particulièrement été marqué par les propos du ministre français de l’Intérieur, Manuel Valls. Le fait que sa première réaction publique à la question institutionnelle posée en Iparralde ait été exprimée dans un quotidien espagnol de premier plan a une signification des plus importantes, puisque cela revient à affirmer précisément ce qu’il prétend nier, à savoir l’existence d’une nation des deux côtés des Pyrénées, existence qui ne dépend pas de la reconnaissance administrative que son gouvernement lui donnera ou pas.
D’autre part, argumenter son refus d’ouvrir un débat sur la question d’une structure administrative pour Iparralde en affirmant que “les choses sont très claires pour nous et tant qu’ETA ne remettra pas les armes, nous serons inflexibles” est plus qu’une aberration. Remettre les clefs de l’avenir institutionnel basque dans les mains d’une organisation clandestine, est une claire insulte au peuple basque et le signe d’un profond mépris pour ses représentants démocratiquement élus et désignés, y compris, en toute logique, pour ceux de son propre parti.
Une adhésion sociale croissante
Il paraît évident que le gouvernement Hollande manque d’arguments politiques de poids pour freiner la dynamique basque en faveur de l’existence institutionnelle d’Iparralde. C’est pourquoi il a décidé de mettre en marche une campagne de dénigrement de cette revendication, en utilisant pour cela l’amalgame anti-terroriste. C’est ainsi qu’il faut comprendre, aux yeux d’ELA, l’arrestation puis la remise d’Aurore Martin à un tribunal d’exception tel que l’Audiencia nacional espagnole. Cette arrestation d’une militante politique, dont l’activité est totalement légitime et légale, a été guidée par la volonté de criminaliser de façon illégitime le débat politique. Elle constitue de surcroît un appui déplorable au dénommé “Pacte anti-terroriste” qui oriente la politique des gouvernements espagnols successifs en Pays Basque, et que le nouveau gouvernement français semble lamentablement faire sien.
ELA se réjouit fortement de l’adhésion sociale croissante au processus pour l’existence institutionnelle d’Iparralde et espère que le gouvernement français saura se montrer à la hauteur de la qualité démocratique du débat mené en Iparralde et de l’engagement pluriel manifesté par les élus et par la société bas-que, déterminée à prendre les rennes de son propre avenir, et qu’il finira par donner satisfaction à cette revendication institutionnelle, au cours des mois à venir.
Le 14 janvier 2013 à Bayonne
Les intertitres sont de la rédaction