Cher Monsieur Toubon,
Je m’adresse à vous dans l’espoir, ténu il est vrai, de provoquer en vous un soupçon d’intérêt en ma faveur. Espoir de ceux dont nous disons ici, entre nous, qu’il font vivre car en effet c’est de cela dont il s’agit. Vous voilà désormais Défenseur des Droits, quel beau titre, félicitations, que de responsabilités ; comme il n’est pas précisé lesquels j’en ai déduit qu’il s’agissait de tous les droits.
J’ai pris connaissance de vos déclarations depuis votre nomination dont il ressort que votre objectif est de faire respecter les droits établis si ceux-ci sont bafoués et d’en promouvoir de nouveaux dans les cas d’injustice ou de non réciprocité en particulier concernant des minorités. Noble programme semé d’embuches.
Dès lors j’ai pensé que vous étiez la personne la plus à même de vous pencher sur mon cas
Un léger souffle de vie m’anime encore mais pour combien de temps ? Certes je ne suis pas moribonde, néanmoins en grand danger d’accéder à cet état ultime. Aussi je viens simplement vers vous pour vous demander d’agir, afin que mon DROIT de vivre soit égal à celui dont jouit l’autre habitante de ces lieux. Elle est venue, il est vrai depuis fort longtemps, s’installer ici où elle a prospéré. Ce faisant, montrant ses biceps, jouant du coude et bénéficiant de son poids écrasant, elle m’a confinée, moi alors si menue mais néanmoins bien vivante et, je dois le souligner, qui était dans ces lieux bien avant, dans un espace où je puis à peine respirer.
Je résiste, certes, mais dois faire face à un ostracisme dégradant et injuste. En outre je dois affronter les quolibets du petit Robert, ce garnement à la langue bien pendue dont il use et abuse à me la montrer. Et que dire de ce couple infernal qui a juré ma perte : La….rousse et sa marâtre la vieille Dame du quai Conti ? Ah ! celle-là quelle arrogance, que pèsent en effet ses quatre cents ans d’existence et sa prétention à l’immortalité devant mon grand âge qui s’évalue comme vous le savez surement en dizaine de milliers d’années ?
Vous êtes d’autant plus la personne idoine pour me défendre que vous connaissez bien le sujet qui nous occupe tout autant qu’il nous préoccupe. En effet à une époque pas si lointaine vous aviez été ministre de la culture ; usant de vos prérogatives vous n’aviez pas ménagé votre peine pour défendre votre protégée contre les assauts de l’impérialisme linguistique anglo-américain. Ici nous avions tenté, en vain, d’attirer votre attention sur les dommages collatéraux, certes inhérents à nombre de batailles, mais dont nous avons été les premières victimes et dont les effets dévastateurs se font sentir encore aujourd’hui…
Ma demande est bien modeste, Monsieur le Défenseur des Droits, simplement me reconnaître celui d’exister ici chez moi, dans les lieux public, sur mon territoire.
Votre, l’euskara.
Mikel Dalbret Ziburu 20014, 10