Alors que le gouvernement français prépare une refonte de l’organisation territoriale de l’Hexagone, la question de la reconnaissance institutionnelle d’Iparralde reste en suspens. Pantxoa Bimboire revient sur ce qui peut se dessiner dans un avenir proche, suite aux propositions du préfet.
Même si la défaite de M. Habib à Pau en a réjoui plus d’un, ici, suite à l’attaque en règle qu’il avait menée contre sa collègue Colette Capdevielle lors de sa présentation de la collectivité Pays Basque au parlement, l’amertume reste importante dans la majorité des acteurs de la société civile en faveur d’un statut spécifique. Plusieurs personnes ont déjà avancé qu’il fallait d’abord convaincre les proches, et les cercles différents du territoire (mairies, collectivités, département, région) avant d’aller à Paris affronter un mur.
Le gouvernement, par l’intermédiaire du préfet, semble vouloir débloquer, en partie, la situation et proposer plusieurs scenarii, même si, pour raison de neutralité, due aux périodes d’élections, ce dernier a pu, au travers de conversations informelles et franches, en dévoiler quelques aspects.
Le contexte
La réforme des collectivités (économie projetée de 11 milliards d’euro), pour faire simple, passe par diviser par deux le nombre des régions, supprimer les départements et agglomérer les
communautés de commune, en laissant aux mairies un rôle très minime (36.000 dans l’hexagone, 3 à 5 fois plus en proportion que dans les autres pays de l’Europe).
La traduction basque de cette réforme est la proposition du préfet. Quatre scenarii seront proposés. Le moins intégré sera le statu quo, c’est-à-dire, il faut bien en convenir, une situation bancale d’hypertrophie de l’Acba (engluée dans sa stratégie dite du bassin de vie, appelée aussi Pays de l’Adour, relativement antinomique du vouloir vivre ensemble formulé par les habitants du Pays Basque et en contradiction avec les actions des Conseils des élus et de développement, entre autres) et une mosaïque de collectivités dont les tiraillements et les féodalités font peine à voir.
Le plus intégré sera une communauté de communes unique pour tout le Pays Basque. Nouveauté, pour nous ? Il semble que oui, car, dans le scénario intégré, la reconnaissance du territoire sera acquise et complète (pour la première fois). Oui aussi car des compétences supplémentaires (nous n’en connaissons pas le détail) seront ajoutées à la palette des compétences de ce type de collectivité.
Les quatre propositions seront précisées dans un document qui sera proposé à chaque maire du Pays Basque (sans doute pour simplifier, au cours d’une réunion dans la communauté de commune dont ils relèvent). Il appartiendra à chacun de voter. Et la majorité qualifiée, si elle se dessine, décidera.
Le scénario intégré est évolutif,
rien n’interdit de l’engager avec quelques compétences,
puis d’en ajouter d’autres s’il apparaît que l’expérience est positive.
Le scénario s’inscrit dans une réforme des collectivités
qui s’avère obligatoire en France.
Les dangers
Le vote des municipalités de l’Acba sera important et aussi le choix déterminant et stratégique de son président, défenseur de la collectivité à statut particulier. On observera aussi les capacités d’influence (de nuisance ?) des présidents qui étaient d’avis réservé dans le passé, comme le montrent les votes des municipalités de Xiberoa dont le sentiment d’appartenance est fort.
Comment réussir le pari? Je prends ici le risque d’affirmer que l’initiative du préfet me semble utile et intéressante. Il faut la saisir. Il serait prévu aussi que le Conseil des élus et le Conseil de développement puissent exprimer leur avis au travers d’une réunion préparatoire. La CCI Euskal Herria devrait aussi être intégrée dans ces premières réunions.
Ces premiers contacts me semblent primordiaux et être une condition de réussite de cette importante modification du paysage. En effet, rien ne serait plus dommageable qu’un panel de propositions du type “c’est à prendre ou à laisser” après tant et tant d’effort et de concertation pour intégrer le Pays Basque dans une réforme gagnante pour tous.
Une seconde condition serait aussi d’éviter un tout centralisme sur Bayonne (peut être, selon les compétences décentraliser les services et lieux de décision sur les pôles Mauléon, Saint
Jean de Luz, Garazi, etc.), en veillant très strictement à l’efficacité des personnels et des missions.
Cet aspect de l’organisation de l’espace est fondamental pour faire passer le dossier. Une concertation est donc aussi nécessaire sur cet aspect, et, surtout avec les dix communautés de communes, dans ce cas présent.
Enfin, la carotte fiscale doit être incitative et seul le préfet a les compétences pour orienter : les dotations de l’Etat devraient être plus fortes si les scenarii sont plus intégrés et la différence notable.
Avantages du scénario intégré
Le scénario est évolutif, rien n’interdit de l’engager avec quelques compétences, puis d’en ajouter d’autres s’il apparaît que l’expérience est positive. Le scénario s’inscrit dans une réforme
des collectivités qui s’avère obligatoire en France. Il n’est touché ni par la réforme de la région, dont je préfère qu’elle s’allie avec Midi-Pyrénées plus qu’avec Poitou-Charente, ni par la disparition du département que j’appelle de mes voeux. A contrario, sans département et avec une maxi région, l’ensemble Pays Basque aurait sa vraie personnalité.
Le rapport de l’inspection des finances sur les CCI est très nocif pour la nôtre : CCI Euskal Herria (en gros une CCI par région, un guichet par département et un remboursement pour les CCI de France de 1 milliard d’euros de trop perçu par l’Etat !). Cela sera peut-être le sujet d’un prochain article. A l’heure où je termine cet article, à Paris, a lieu l’AG des présidents des CCI de France. Leur président M. Bancon mettra au vote un projet catastrophique, engageant les CCIT dans la réforme de l’inspection des finances. Notre président Garreta défendra la position de la CCI Euskal Herria, avec la conviction qu’on lui connaît.
La situation des chambres des métiers et chambres d’agriculture est pire, avec des contextes financiers locaux mauvais. C’est le bon moment pour rechercher, à plusieurs, de la cohésion de stratégie et une construction à frais réduit de notre territoire.