Recemment, le Président de la République a inauguré à Lens l’antenne du Musée du Louvre, ce qui prouve l’importance de cette décentralisation en matière de culture dans une région sinistrée, celle d’un bassin minier en deshérence où le taux de chomage atteint les 18,9% selon la source INSEE en ce qui concerne la tranche des 15-64 ans. Il y a deux ans à peine, en 2010, la ville de Metz avait bénéficié d’une même décentralisation, en provenance cette fois du Centre Pompidou de Paris. Là encore il s’agissait de secourir la Lorraine en proie à la crise de la sidérurgie.
N’oublions pas que Jean-Jacques Aillagon, ancien président du Centre Pompidou, a été l’initiateur de la délocalisation à Metz et que, devenu ministre de la Culture, il mit en œuvre une politique de décentralisation des grands musées. Pour être plus précis et pour rendre à chacun ce qui lui est dû, Renaud Donnedieu de Vabres, successeur d’Aillagon, présenta à Jacques Chirac, Président de la République, le choix de Lens. Un bon quinquennat plus tard, l’ensemble est réalisé avec le concours de l’Etat, de la Région, du département et de la ville et il ouvre ses portes au public le 12 dé-cembre, date vraiment symbolique puisqu’elle correspond au douzième jour, du douzième mois, de la douzième année du millénaire.
L’inauguration de Louvre-Lens a fait l’objet de reportages où l’on a fait remarquer l’importance de cette décentralisation qui ne touche pas simplement la culture, mais qui peut être aussi un des moyens de développement économique d’une région sinistrée. Bien entendu, on a glosé dans l’audio-visuel sur cette nouvelle politique de l’aménagement du territoire, politique éminemment française, celle d’un pays qui, a défaut de pétrole, a des idées. Il n’a été nullement rappelé par les journalistes de l’audio-visuel qu’une expérience de ce genre avait été faite ailleurs, dans un petit pays qui s’appelle “Pays-Basque”.
Il convient de rendre hommage à la presse qui a plus de recul et sait se détacher de l’événement. Aussi bien, l’hebdomadaire La vie que le quotidien Le Monde (je ne lis pas toute la presse) ont rappelé “l’effet Bilbao”. Quand le directeur du Louvre-Lens souligne que l’antenne peut être un des catalyseurs de l’économie, il ne fait aucun doute que “l’on rêve que l’effet Bilbao se vérifie dans le bassin minier”, comme l’écrit Marie-Douce Albert, journaliste de l’hebdomadaire, en rendant compte de l’événement.
De même, dans Le Monde, Harry Bellet souligne à quel point les créateurs et ac-teurs du Louvre-Lens avaient en tête
le modèle de Bilbao: “Un bâtiment d’exception, des collections parmi les plus importantes au monde: le miracle du Guggenheim de Bilbao se produira-t-il à Lens?”
Le modèle était parfait. Une région sinistrée, la Biscaye, comparable à la Lorraine par la sidérurgie et à Saint-Nazaire pour la construction navale, l’acceptation d’avoir l’antenne du musée Guggenheim de New-York à Bilbao dans un bâtiment aux lignes futuristes, vaisseau amarré sur la rive gauche de l’Ibaizabal, des expositions temporaires attirant un vaste public —une moyenne de 900.000 à un million depuis 15 ans— un véritable miracle économique par des créations d’emplois directs ou indirects et, selon les sources, 600 millions d’euros injectés dans l’économie de la province qui, à la même époque, 1997, date de l’inauguration du Musée, créait aussi le parc technologique de Zamudio, véritable “Silicon Valley” basque.
Alors que l’on nous rebat les oreilles avec le fameux “modèle allemand”, il serait bon que nos dirigeants reconnaissent qu’il existe aussi un “modèle basque” utilisé en France, à Metz comme à Lens.