Le 17 juin marque la fin d’un cycle électoral entamé avec les sénatoriales de l’an dernier, qui a vu le re-nouvellement de toutes les instances de pouvoir dans l’Etat français et laisse un paysage électoral bouleversé. Domination sans partage du PS, émergence d’un pôle sur sa gauche, quasi-disparition du centre droit, défaite sans appel de la droite et consolidation d’un vote FN en sont les principales caractéristiques, auxquelles il faut rajouter la progression régulière de l’abstention qui relative les scores de chacun. Le Pays Basque Nord, jusqu’alors souvent singulier par rapport aux tendances hexagonales, s’en rapproche fortement à quelques nuances (percée relative du vote Front de Gauche et succès moindre du FN) et une exception près: le vote abertzale.
Dans des conditions difficiles le mouvement abertzale de gauche tire son épingle du jeu à l’occasion de ces législatives. Les objectifs fixés par la coalition sont pour la plupart réalisés: campagne dynamique et visible grâce à une très bonne équipe de candidat(e)s et une grande implication militante, influence réelle sur les thèmes en débat, augmentation des scores, dé-passement des 5% dans la cinquième, 3ème position au 1er tour (grâce à l’éparpillement du centre il est vrai), position consensuelle construite pour le second tour lui assurant une présence politique malgré son élimination, un rôle déterminant dans les résultats finaux et des engagements écrits signés par les député(e)s élu(e)s. La gauche abertzale sort définitivement de la marginalité électorale sur la plus grande partie du territoire (même si il y a longtemps qu’elle ne l’était plus socialement ni politiquement). Elle commence à peser réellement. Le traitement médiatique accordé, y compris lors des présidentielles, ainsi que l’attention portée par les autres forces politiques sont là pour le confirmer. Ce poids électoral ap-porte aussi de la crédibilité aux idées et aux revendications défendues et renforce les opportunités de travail en commun avec tous ceux et celles qui veulent se battre à nos côtés dans les combats quotidiens pour la reconnaissance institutionnelle, la résolution du conflit ou les luttes sociales.
Certes la progression du vote abertzale est désespérément lente mais, victimes du système électoral et de la bipolarisation qu’il génère, les autres forces aussi sont à la peine et certaines laminées malgré leur projection hexagonale. Le BAB souvent considéré comme terre de mission pour les abertzale ne l’est pas moins pour les forces à la gauche du PS, écologistes compris.
Juin 2012 marque aussi la fin du cycle entamé aux législatives de 2007 avec la première candidature EH Bai. La constitution de la coalition, source de débats et de décisions parfois compliquées pour certains, répond incontestablement à une volonté largement partagée par la militance abertzale (volonté clairement exprimée dans l’enquête de fin 2011). A travers elle se poursuit la construction d’une force électorale autonome entamée par Enbata il y a 45 ans. Il faudra continuer à creuser le sillon indépendamment des partis hexagonaux. Cela n’exclut pas des alliances sur certains scrutins mais pour ouvrir cette opportunité il faut peser et pour cela exister en portant son propre message. EH Bai a gagné en maturité politique et constitue un outil indispensable. Car pour prétendre jouer un rôle dans les confrontations électorales il faut bien plus que des élu(e)s municipaux. Il faut un large réseau, une force militante organisée, confiante dans ses capacités.
D’ores et déjà une démarche est amorcée pour les échéances de 2014/2015 à partir de Bil Gaiten. Quel sera l’avenir d’Euskal Herria Bai? Il reste à définir, à débattre et à écrire. Entre les partis qui composent la coalition mais aussi avec la participation de tous ceux et celles qui s’y reconnaissent et ont contribué à son succès. Dans le cadre de l’ensemble de la stratégie politique abertzale dont la participation aux élections ne constitue qu’un aspect. Les débats ne manqueront pas. Il faudra utiliser l’expérience et la maturité acquises pour les mener et les trancher au mieux.