Tragédies par Jakes Bortayrou

L’Europe vit une double tragédie. D’une part les mesures économiques mises en place face à la crise dans laquelle est plongée le système capitaliste sont une fuite en avant qui préparent une décennie chaotique aux conséquences sociales et politique imprévisibles. D’autre part, cette crise ne peut avoir d’issue heureuse pour la grande majorité de la population qu’à la condition de mener un affrontement de niveau élevé avec les classes dominantes, ce qu’aucune des for-ces qui se succèdent au pouvoir dans les différents pays européens ou sont susceptibles d’y accéder aujourd’hui n’est prête à assumer.
Un retour à l’ère du capitalisme «fordiste», plus ou moins régulé des 30 glorieuses est impossible. La phase dite «néolibérale» que nous connaissons depuis le début des années 80 était une réponse à l’essoufflement de ce modèle. Elle a favorisé un accaparement accru de la richesse produite au profit des détenteurs du capital, des classes possédantes. La répartition entre profit et salaires a clairement évolué au détriment de ces derniers. En corolaire, si certains se sont enrichis, beaucoup se sont appauvris et précarisés. L’augmentation de la productivité a été accaparé par les actionnaires au détriment de l’investissement productif à long terme ou de la poursuite de la réduction du temps de travail, seul à même de créer des emplois. Conséquences logiques, l’instauration d’un chômage de masse mais aussi une difficulté de plus en plus grande à «faire tourner» la machine économique par manque de pouvoir d’achat. Le développement du crédit a pu compenser pendant un temps mais la crise financière a mis fin à cet artifice. Les mesures imposées aujourd’hui partout en Europe ont de quoi atterrer non seulement bon nombre d’économistes (1) mais toute la population. Les politiques d’austérité sont absurdes car elles provoquent mécaniquement récession, baisse de l’activité, rentrées fiscales diminuées et donc de plus grandes difficultés à rembourser la dette ce qui affole les marchés, fait monter les taux et augmente les sommes à rembourser. La démonstration est éclatante en Grèce. La seule lo-gique de ces mesures est de profiter de la situation pour appliquer un traitement de choc afin de réduire encore les acquis so-ciaux et de dévaloriser encore plus le travail au prétexte d’un besoin de compétitivité. Le régime infligé au Grecs sert d’exemple. Il doit tou(te)s nous terroriser et nous persuader qu’aucune autre alternative n’est possible.
C’est là l’autre aspect de la tragédie. La profondeur de la crise impose des solutions radicales qui privilégient clairement les intérêts populaires en s’attaquant à ceux des classes possédantes: briser le carcan de la dette illégitime en la répudiant, s’émanciper du financement par les marchés, retourner au financement par les banques centrales et socialiser les banques, imposer une autre répartition des richesses par une réforme fiscale, rompre avec les dogmes néolibéraux européens, redévelopper les services publics et la protection sociale, poursuivre la réduction du temps de travail, amorcer la transition vers un modèle économique non productiviste et écologique. Soit un niveau d’affrontement social et politique élevé, un rapport de force dont la construction reste embryonnaire. Il n’existe plus aucune marge pour une politique social-libérale telle que la défend le candidat Hollande et les échecs de Zapatero et Papandréou sont là pour le démontrer. Miser sur un supplément de croissance (sans aucune remise en cause de sa nature) et une réduction des déficits à court terme n’est tout simplement pas crédible. Prétendre mener une politique sociale sans casser le diktats des marchés qui à la moindre mesure progressiste augmenteront leur taux d’intérêt, est au mieux irréaliste, au pire une escroquerie.
Comment casser le fatalisme et la résignation face à des enjeux qui nous semblent hors de portée? Comment lutter tou(te)s ensemble, comment agencer résistances et alternatives concrètes, comment lier combat au niveau local et mouvement plus global, comment pratiquer une solidarité concrète entre les peuples, avec les Grecs, les Roumains, les Espagnols…? Au-delà des nombreuses polémiques futiles des périodes électorales, telles sont quelques questions incontournables à débattre pour affronter les temps incertains à venir.

(1) http://atterres.org/page/manifeste-d’économistes-atterrés

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