Segur que tomba

A1-51101701.jpgDans quelle mesure la stratégie catalane d’avancer vers l’autodétermination en dépit de l’opposition de Madrid peut-elle aider le Pays Basque à ouvrir un deuxième front en Espagne ? Le rappel des paroles de la chanson culte de Lluis Llach L’Estaca: “Si estirem tots, ella caurà, si jo l’estiro fort per aquí i tu l’estires fort per allà, segur que tomba, tomba, tomba” permet  de répondre à la question.

Ce qui est en train de se passer en Catalogne restera dans les annales de l’Histoire. D’un côté l’attitude du PP permet de faire tomber les masques en mettant en évidence ce que n’a cessé de dénoncer la gauche abertzale depuis la mort de Franco, c’est-à-dire une transition démocratique non achevée au niveau institutionnel (du fait notamment de la non reconnaissance du droit à l’autodétermination de nos peuples), et une culture politique autoritaire qui imprègne encore les élites des différents appareils d’Etat, comme la magistrature, l’armée et la Guardia Civil.

D’un autre côté, face à la fin de non recevoir imposée par Madrid aux revendications de reconnaissance de nos identités nationales, le mouvement indépendantiste catalan démontre le potentiel d’une stratégie unilatérale, en faisant la preuve que la mobilisation et l’activation de la société peuvent aboutir à la mise en oeuvre du droit à l’autodétermination.

Unilatéralité du processus politique

En face, l’Etat espagnol ne peut accepter cette mise en oeuvre, car il craint que l’option du maintien dans l’Espagne ne ressorte minoritaire d’un exercice consistant à donner l’opportunité aux citoyen-ne-s de décider de leur avenir. La Catalogne constitue un exemple on ne peut plus éclairant et pédagogique du scénario de confrontation démocratique dont la gauche abertzale se réclame aujourd’hui.

A ce titre, il faut souligner que c’est justement en termes d’unilatéralité du processus politique que l’Etat espagnol a depuis le début analysé le changement de stratégie qu’a supposé la fin de la lutte armée de l’ETA. Et c’est pour cette raison que le PP a fait le choix de bloquer toute avancée dans la résolution du conflit en Pays Basque.  En effet, l’intensification des tensions et des contradictions internes à la gauche abertzale neutralise sa capacité d’initiative sur le terrain du processus souverainiste.

Au passage il est ainsi manifeste que les prisonniers politiques basques sont les otages du processus politique aujourd’hui en marche. Car la situation en Pays Basque et en Catalogne sont totalement imbriquées.

Faisons un petit retour en arrière pour nous en convaincre. Sous José Luis Zapatero, une nouvelle mouture du statut d’autonomie catalan obtenait une large majorité à l’occasion d’une consultation organisée en juin 2006. Ce nouveau statut aurait dû être appliqué si le tribunal constitutionnel espagnol ne l’avait bloqué en 2010. C’est ce blocage qui a crée les conditions de la dynamique indépendantiste unilatérale.

En 2006, nous étions en Pays Basque en pleine négociation de Loiola, et il est intéressant de se rappeler qu’ETA avait décrété en février 2004 une trêve de ses actions armées en Catalogne pour éviter toute ingérence dans le processus catalan.

Dans le contexe actuel,
du fait des effets ricochet
qui peuvent se produire
entre la situation en Catalogne
et celle du Pays Basque,
l’ouverture d’un second front
indépendantiste en Hegoalde
serait létal pour Madrid.

Débat relancé

Quel était le plan de Zapatero vis-à-vis de la négociation de Loiola ? D’une part fermer définitivement le chapitre de la lutte armée en Pays Basque, et devenir une sorte de Tony Blair espagnol (pour mémoire, l’annonce de la fin de la lutte armée de l’IRA date de juillet 2005). D’autre part, réaliser dans la même séquence une réforme la plus minimale possible de l’Etat espagnol pour clôre le débat en faveur de plus de souveraineté en Catalogne mais aussi en Pays Basque.

Car rappelons que la séquence de Lizarra-Garazi, puis le plan Ibarretxe (approuvé en décembre 2004) avaient relancé ce débat en Pays Basque.

Dans le contexe actuel, du fait des effets ricochet qui peuvent se produire entre la situation en Catalogne et celle du Pays Basque, l’ouverture d’un second front indépendantiste en Hegoalde serait létal pour Madrid.

Or, l’imbrication effective des deux situations fait que cette année le PP n’a pu faire passer son budget à Madrid que grâce au vote des députés du PNV en mai dernier. Vu le déploiement répressif avec lequel M. Rajoy répond à l’initiative du référendum en Catalogne, il est difficilement concevable que le PNV soutienne le budget 2018 du gouvernement PP actuel. Il se pourrait alors que la crise de gouvernabilité de l’Espagne qui a nécessité deux scrutins législatifs se ravive, suscitant la convocation de nouvelles élections législatives en Espagne.

En fait, personne n’est capable de prévoir ce qui va se passer dans les prochains jours.

Tout ce que l’on sait c’est que L’Espagne connaît sa plus grave crise depuis la fin du franquisme, et qu’elle est entrain de se fissurer.

Face à ce spectacle qui n’est pas pour nous déplaire, nous trotte dans la tête la magnifique chanson de Lluis Llach dont les paroles nous chuchotent: “Si jo l’estiro fort per aquí i tu l’estires fort per allà, segur que tomba, tomba, tomba, i ens podrem alliberar”.

Et de plus en plus d’abertzale se disent qu’il est temps de la mettre en musique également en Pays Basque.

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